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Comprendre pour juger

4 juillet 2018, 07:37

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Comprendre pour juger

Dans la présente édition, Business Magazine océan Indien ouvre ses colonnes au directeur régional de l’Insee Réunion-Mayotte. Un échange très riche en enseignement car il braque les projecteurs sur certaines pratiques qui devraient inspirer l’administration publique à Maurice. D’autant plus que ces dernières semaines ont été marquées par une véritable guerre de chiffres entre opposants et gouvernants lors des débats sur la loi de finances à l’Assemblée nationale. Un affrontement qui, très souvent, se déroule sous le regard médusé du citoyen lambda. Non pas par manque d’intérêt, mais plutôt en raison d’une incompréhension des chiffres qu’on égrène à longueur de discours.

Pourtant, comme le rappelle Aurélien Daubaire dans l’interview, les statistiques compilées permettent de dresser un panorama de la société et des enjeux qui la confrontent.

À l’initiative de l’Insee, des conférences de presse sont organisées «pour relayer auprès du grand public les résultats des enquêtes». Des rencontres régulières avec la population baptisées les «Rendez-vous de l’Insee» favorisent ainsi le débat. Des thématiques comme le «portrait économique et social de La Réunion» ou encore «La population réunionnaise à l’horizon 2050. Autant de seniors que de jeunes» sont ainsi abordées.

Avec Statistics Mauritius, Maurice n’a probablement rien à envier à l’Insee Réunion en matière de production de données. En revanche, le pays ne partage pas la même culture pour ce qui est des débats pouvant faciliter la compréhension des chiffres. Cette absence de taille réduit le Mauricien au statut de simple spectateur lorsque des questions qui le touchent directement sont débattues par les législateurs. Dans une démocratie qui se respecte, de telles faiblesses obtiendront une attention particulière car s’assurer que le citoyen dispose des outils nécessaires est la condition à la formation d’une opinion publique éclairée capable de critiques constructives.

Il est donc nécessaire de rectifier le tir. À moins qu’on ne préfère les échanges au ras des pâquerettes à une émancipation démocratique ? Le changement de cap que nous appelons de toutes nos forces passe également, et dans une grande mesure, par l’adoption de pratiques plus transparentes. Des feuilles de route ainsi qu’une communication plus détaillée et explicite sur les objectifs budgétaires nous économiseront d’inutiles débats sur la manipulation des chiffres du déficit fiscal ou encore de la dette publique. Ces questions reviennent chaque année, surtout de la part de ceux qui ont déjà été à la manette, en raison du manque de conviction de la part des détenteurs actuels du cordon de la bourse à dissiper la perception de colourable accounting.

Un cadre transparent avec des règles préalablement définies nous évitera certainement à l’avenir des discussions d’apothicaire sur l’utilisation de fonds hors budget pour maquiller le déficit budgétaire ou encore l’utilisation de véhicules de titrisation pour ramener le niveau de la dette publique à des niveaux acceptables. Cela est d’autant plus nécessaire car il y va de la crédibilité de nos institutions.

Parallèlement, une refonte du processus d’élaboration du budget de l’État devrait améliorer la capacité des agents chargés de sa mise en oeuvre d’évaluer son impact réel et d’apporter des modifications là où c’est nécessaire. Actuellement, l’exercice d’évaluation consiste à comptabiliser à la fin de l’année fiscale le nombre de mesures qui ont été exécutées. Une méthode pour dire le moins rudimentaire et qui n’est malheureusement d’aucun apport lorsqu’il s’agit de jauger de la pertinence des politiques publiques.