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L’impossible Maurexit

18 juillet 2018, 05:15

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«There is no such thing as a sovereign country anymore. It is an illusion the Brits are all chasing, but it has gone.» Tels sont les propos d’un officier de l’Union européenne, cité par le Financial Times, à propos des démissions en série dans le gouvernement de Theresa May.

L’aventure du Brexit aura mis en exergue la complexité des règles commerciales, financières et réglementaires qui régissent l’ordre du monde. Des règles qui aujourd’hui s’imposent aux gouvernements les plus puissants. Même un pays du G8 comme la Grande-Bretagne ne peut s’imaginer construire son destin de manière libre et indépendante. Et si Theresa May pensait instruire un Brexit ‘soft’, la ligne dure de son parti lui a rappelé le peu d’intérêt de ce concept. Une telle formule ramenait la Grande-Bretagne en alignement avec des règles européennes qu’elle suivrait par opportunisme (pour que les produits anglais soient vendus sur le marché européen), mais sans conviction et sans possibilité de contribuer à définir ces règles.

Il lui restait comme alternative de demeurer dans l’Union européenne. Une solution qui, à défaut de libérer la Grande-Bretagne des obligations de la coalition, lui permettrait au moins d’exercer une influence dans l’élaboration des règles du jeu de l’Union européenne et, par ricochet, au niveau des organisations internationales.

Si les Anglais sont déçus de leur influence dans l’Union européenne, que penser de celle de Maurice dans l’OCDE ? Aurions-nous la tailleou les moyens d’infléchir des règles que les organismes internationaux édictent à notre insu? Ou d’y déroger en passant par la petite porte?

Tels étaient cependant les derniers espoirs au moment de la signature de l’accord multilatéral de l’OCDE. Espoirs de «Maurexit soft» qui auraient préservé les derniers acquisde l’offshore... Un an plus tard, les voies de sauvetage apparaissent de plus en plus étroites. Toute tentative de maintenir les «avantages» de l’offshore semble condamnée à être épinglée soit par des organismes internationaux ou même des organismes privés, qui protègent leurs arrières.

L’actualité récente nous rapporte des pressions émanant de l’OCDE, mais aussi del’Eastern and Southern African Anti-Money Landing Group (ESAAMLG), ou même de banques dépositaires (custodian banks). Ce sont des banques qui offrent des services de garde de titres très spécialisés et qui doivent ellesmêmes rendre des comptes sur la transparence des opérations sous leur gestion. Du coup, il faut changer les lois pour montrer la preuve de sa bonne volonté.

Autre constat : il ne s’agit pas seulement de changer les lois pour adhérer aux règles générales. Il faut aussi s’assurer que les institutions censées les appliquer fonctionnent et apportent la preuve de leur efficacité. Dans un contexte où la judiciarisation des affaires entraîne une obligation de confidentialité.

Une première étape sera de gérer les relations avec l’ESAAMLG. Cet organisme a pour but de faciliter la mise en oeuvre des recommandations de la Financial Action Task Force, soit celles de l’OCDE. S’il n’est pas une émanation directe de l’OCDE, c’est un organe qui est sous son influence. Le rapport immiment ne serait pas en faveur de Maurice. L’objectif est donc d’en retarder la publication finale afin de protéger la réputation et la légitimité du business africain.

L’autre étape sera d’aller en Inde convaincre les organismes à la fois privés et publics de la bonne foi des Mauriciens dans l’alignement aux règles de l’OCDE. Tous ces organes d’influence n’entendent pas lâcher prise sur les détails. Une à une les failles du système financier mauricien seront mises à jour. Une à unes elles seront utilisées dans une stratégie de communication afin de ramener la juridiction mauricienne dans les normes de l’OCDE.

S’agripper aux règles et à l’esprit de l’OCDE, pour rester dans la course. On peut le prendre comme une perte de souveraineté. Cela semble le prix à payer pour maintenir la légitimité du secteur financier mauricien et la pérennité de son ouverture internationale.

 

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