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Chaos!

1 mars 2020, 09:05

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Chaos!

Il y a eu un premier mort sur la ligne de métro. C’est évidemment bien regrettable. Un jeune homme dans la force de l’âge qui perd la vie, cela secoue forcément, cela creuse l’émotion.

 Mais gardons, tout de même, de la perspective en la circonstance. Pour les six premiers mois de 2019, il y avait plus de 17 000 accidents sur nos routes, causant 64 mortalités. Nous n’allons pas en détailler toutes les circonstances, mais il est clair qu’un bon nombre de ces fatalités ont été la conséquence de la négligence ou pire, l’irresponsabilité des chauffeurs qui se sont retrouvés engagés dans ces accidents. Véhicules en mauvais état, trop d’alcool dans le sang, feux rouges brûlés, non-respect des droits de piétons sur des passages cloutés, véhicules dépassés en dépit du bon sens, vitesse anormalement élevée, conduite avec des paupières lourdes ; autant de raisons d’accidents et de mortalités qui mettent en cause la responsabilité personnelle de ceux qui font des accidents, qui s’y blessent ou qui en meurent. C’était fâcheusement le cas à Barkly, un feu rouge ayant été brûlé.

 La vie est malheureusement un risque permanent et il s’agit, quand on a le choix, de ne pas prendre des décisions qui pourraient aggraver ses chances de déconvenue ou de fatalité. Ça ne paraît pas compliqué, dit comme ça, mais quand on a acheté des légumes à la sauvette et a bon marché, on prend parfois le risque qu’ils soient arrosés de pesticides, ayant été fraîchement volés? Quand on prend ses vacances sur une piste de ski, on augmente ses chances d’un pied cassé ? Quand on fume du synthétique, on prend le risque certain de ne pas pouvoir respirer l’an prochain, six pieds sous terre ?

L’accusation a été faite que si le métro avait été aérien, il y aurait eu moins de risque d’accidents. C’est clairement le cas, mais on peut alors, selon la même logique réclamer que les croisées de routes soient toutes agrémentées de «overpass» (pont routier), afin d’éviter les accidents causés par le non-respect des lignes blanches ou des feux rouges ? Vous trouvez cela raisonnable d’essayer de compenser, à ce point, de possibles manques de prudence personnelle ?

 Et si on peut (doit) réclamer la démission d’un ministre dont la décision est directement responsable d’un problème ou qui doit endosser une décision qui est prise sous sa responsabilité et pendant son mandat, comment rationaliser la demande de démission du ministre Ganoo ? En effet !

 Et puisque nous sommes à l’île Maurice ; non, je ne suis pas dévot de Sai Baba. Mais alors, pas du tout !

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 Le coronavirus (Covid-19 pour les intimes) se sent pousser des ailes. Alors que le nombre de nouveaux cas en Chine semble marquer le pas, cette semaine voyait le nombre total de cas dépasser les 85 000 et trois pays, en particulier, la Corée du Sud, l’Iran, l’Italie, s’inquiéter au point où ils mettaient des villes entières en quarantaine, se positionnant solidement dans la colonne des pays «à risque», desquels il fallait désormais surveiller les passagers de près.

Mais rappelons tout de même quelques faits. Des 85 217 cas identifiés à samedi, 79 257 (93 %) sont en Chine. Des 433 nouveaux cas repérés en Chine ce jour-là, 400 étaient dans la seule province du Hubei. Si on fait grand cas des morts (2 924 jusqu’ici, planétairement), il faut aussi indiquer qu’en parallèle, 39 544 cas étaient considérés définitivement guéris. Des 42 748 autres cas identifiés et toujours suivis, 34 930 cas sont considérés «modérés» et seulement 7 819 sont considérés sérieux ou «critiques» (il y en avait 8 469 seulement ce jeudi !). Pour rappel, 612 000 Américains sont morts d’influenza lors de la saison 2018-2019.

 Le fait que 42 pays ont, à ce stade, identifié des cas chez eux, ajouté aux nouveaux foyers d’infection plus importants, en Italie, en Corée, au Japon, à Hong Kong, à Singapour, a fini par ébranler les marchés financiers qui dévissent sérieusement. Quand le coronavirus monte, les bourses baissent, évidemment. Au grand dam de Donald Trump, qui ne voit pas d’un bon œil cette menace à son bilan économique et donc à ses ambitions de réélection en novembre. Les mesures prises à Maurice, auront aussi un impact certain, notamment sur le tourisme, surtout si le foyer italien se répand en France, juste à côté, mais il est clair que même au prix de perturber la lune de miel de couples coréens, il vaut mieux payer le prix de la prudence que d’être, par la suite, désolé face à une épidémie locale incontrôlée !

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 Qu’est-ce qui nous vaut une telle ascendance de nationalistes de par le monde. On ne parle pas ici des nationalismes qui prennent corps dans la revendication d’être libérés d’un joug quelconque et donc du droit des peuples de disposer d’eux-mêmes. On parle, à l’opposé, d’idéologies souvent nourries de nostalgie dominatrice, de racisme, de xénophobie, soumettant les problèmes de toute nature à la domination hégémonique d’un pays. Dans sa forme la plus extrême, ce nationalisme mena aux fascismes les plus divers, ainsi qu’au nazisme. Si nous n’avons pas encore totalement dérivé dans cette direction à nouveau, il n’y a cependant aucun doute que nous avons mis les pieds sur ce même chemin, reniant le multilatéralisme, rejetant la libre circulation des immigrés, répudiant la globalisation, récusant le libéralisme, résolvant d’être moins tolérants. L’État nation des frontières est à nouveau à la mode, nourri par la déception de ceux qui ont le moins bien profité de la globalisation. Une pandémie de coronavirus ne va pas arranger les choses !

Make America Great Again (MAGA) promet un retour vers un ordre démographique déjà perdu ou sérieusement menacé. En Grande-Bretagne, le slogan «Take back control» promettait aussi un retour en arrière vers le monde perdu des uns et des autres, y compris vers la nostalgie de l’impérialisme. Ce faisant, comble d’ironie, les Anglais déclenchaient cependant, à leur tour, un retour en arrière des Écossais et des Irlandais. Pour ces derniers, la barrière douanière en mer d’Irlande assurera une coupure de plus qui aidera sûrement à refaire, à terme, l’unité de l’Irlande. Les nationalistes polonais, hongrois, tchèques n’entendent pas parler d’ouvrir leurs portes aux immigrés, même si les leurs vont ailleurs en Europe. Ajoutez Bolsonaro, Duterte, Erdogan, Modi, Xi, tous des hommes forts, nationalistes, centralisateurs.

Pour aujourd’hui arrêtons-nous en Inde, a l’occasion de la visite de Trump et quelques semaines après des initiatives rétrogrades du BJP contre la minorité musulmane, ce qui a mené à bien des protestations partout en Inde. Comme on pouvait s’y attendre dans un pays qui vient d’accorder 55 % des sièges du parlement au BJP et a sa politique déclarée de nationalisme hindou (pour 37,4 % des votes), il y a un retour de manivelle à ces protestations, notamment au nord de Dehli. Des foules violentes ont attaqué des quartiers entiers et mis le feu à tout ce qui leur paraissait le mériter, y compris des mosquées. Quelques dizaines de morts en ont résulté. La police, se disant dépassée par les milices nationalistes, n’est pas beaucoup intervenue. Heureusement qu’au Pakistan, le PM Imran Khan n’a pas jeté de l’huile sur le feu et, au contraire, a dit garantir les droits des minorités, cependant que dans un climat pourri, on l’accusait aussitôt, en Inde, d’opportunisme. La première réaction du gouvernement BJP a été un appel au calme. La deuxième a été d’offrir une compensation de 2 500 euros environ à chaque famille ayant perdu un des siens…

 Les citoyens de la planète les plus rationnels prient pour que ce nationalisme hindou n’embrase pas tout le pays. J’en fais partie. C’est dire !