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Worst-case Scenario for Air Mauritius: Qatar-Mauritius Airways ou Air Sino-Mauritius?

25 avril 2020, 07:48

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Selon un dicton en bhojpuri, il n’y a rien de plus facile au monde que de voler le lait de la vache qui appartient à un non-voyant. Durant toute son existence, Air Mauritius a été la vache laitière que tout le monde s’est amusé à traire. 

Il y a eu des moments où on ne s’est pas contenté que de son lait. On s’est également nourri de son sang. Comme les membres de certaines tribus en Afrique dont les combien fiers et féroces Kikuyu du Kenya – ceux-là mêmes qui défièrent la puissance militaire de la Grande-Bretagne – qui font une ponction du sang de leurs animaux. Les Kikuyu observent néanmoins un strict code d’honneur dans le traitement de leurs bovidés. Leur lutte pour l’indépendance du Kenya, menée par leur redoutable chef Jomo Kenyatta, suscita l’admiration des peuples encore colonisés du monde entier.

La vache Air Mauritius fournit bien de lait comme en témoigne la caisse noire constituée à partir de commissions douteuses. Mais la généreuse vache connut aussi quelques épisodes de saignement. Comme l’affaire du hedging. Il s’agissait de l’engagement d’acheter, à un prix arrêté, pendant une période définie, du jet fuel pour Air Mauritius dans l’espoir que la compagnie sorte gagnante dans un scénario où les prix ne cessent de grimper. Cette décision de prendre une couverture (hedging) avait été prise dans un contexte de flambée vertigineuse des prix. Or, les prix avaient baissé par la suite, ce qui fait que le pari d’Air Mauritius s’avéra coûteux. Heureusement pour la vache, elle était assez solide pour survivre à ce saignement.

Fini don de lait et de sang, la vache elle-même est très très malade actuellement, et on assiste à une ultime tentative de la sauver de la mort. Si la vache est condamnée à terme, que faire ? Soit la vendre à un boucher qui la dépècerait pour en vendre les morceaux. Soit la vendre sur patte à un éleveur qui dispose d’énormes moyens et qui pourrait faire appel aux meilleurs vétérinaires du monde pour sauver l’animal. Quant au deal avec le boucher, il aura droit à une bonne commission sur la recette de vente. Si cela ne marche pas à sa satisfaction, il pourrait toujours partir avec un quartier de l’animal sur l’épaule.

Quant à la vente sur patte à un éventuel éleveur, il coule de source que la vache serait offerte officiellement à un prix forfaitaire, pou dipain-diber, comme on le dit en créole mais l’acheteur ferait preuve d’appréciation d’une façon très discrète.

Dans le cadre de cette option de vente sur patte, les Mauriciens s’exclament tout de suite, ‘Modi, Modi, Air India !’. Il faudrait au départ même éliminer l’Inde, Air India, Jet Airways et les énormes empires financiers de ce pays. Car la démocratie est profondément ancrée en Inde où les médias sont intraitables. Une transaction autour d’une compagnie aérienne étrangère avec présomption de commission sous table pourrait ameuter les médias en Inde. D’autant plus que Maurice jouit d’une très mauvaise réputation en raison des transactions qui se seraient déroulées dans notre secteur offshore, ce qui a permis aux requins indiens d’échapper à la perception de l’impôt. D’ailleurs on appelle Maurice off-chor, les Indiens jouant sur offshore et chor, ce mot voulant dire voleur en hindi. En fait, il serait impossible pour le Premier ministre indien de décrocher son téléphone, à la manière de Jacques Chirac, et demander à une entité contrôlée par son gouvernement ou une grosse boîte du secteur privé d’ordonner l’acquisition d’Air Mauritius. D’ailleurs, si des barons indiens étaient vraiment intéressés à se lancer dans l’aviation, ils auraient depuis longtemps pris le contrôle d’Air India ou de Jet Airways, deux grosses compagnies gravement malades et qui désespérément cherchent preneurs.

India out mais il reste néanmoins deux possibilités que la vache soit vendue sur patte. Les riches nations du Proche-Orient pourraient potentiellement se trouver parmi les acquéreurs. Mais il est peu probable que l’Arabie saoudite soit partie prenante. Ce pays est devenu très prudent et très ‘politiquement correct’ depuis un certain temps. Les Emirats arabes unis sont frappés par le phénomène d’excess capacity en cette ère de pandémie et de toute façon leur compagnie se présente déjà comme un acteur incontournable à Maurice. Par contre, le Qatar pourrait prendre un certain intérêt à asseoir sa présence de façon solide sur le sol mauricien. Ce sera aussi l’occasion pour les Qataris de s’affirmer aux dépens de leurs rivaux saoudiens et émiratis.

Si l’option Qatar-Mauritius Airways ne décolle pas, on peut toujours compter sur les affables milliardaires chinois qui disposent de gigantesques ressources. Les transactions restent absolument discrètes. Il n’y a ni opposition, ni médias inquisiteurs en Chine. Mauriciens comme Africains aiment traiter avec les Chinois, no questions asked.

Les Chinois aussi adorent les Mauriciens. D’ailleurs comment expliquer que plusieurs pays ayant acquis des équipements chinois pour lutter contre le Covid-19 ont protesté contre la qualité des produits offerts alors que cela se passe comme une lettre à la poste ici ?

Faute de matches de football en Grande-Bretagne, les Mauriciens pourraient parier sans grand risque sur le décollage, dans quelques mois, d’Air Sino-Mauritius. Un nouveau monde pourrait s’annoncer pour les Chinois avec le coup mauricien, South African Airways et Ethiopian Airlines.