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La MIC peut-elle intervenir sans frontières ouvertes ?
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La MIC peut-elle intervenir sans frontières ouvertes ?
Nous ne connaissons pas le mécanisme détaillé par lequel les demandes faites à la Mauritius Investment Corporation, filiale de la Banque centrale, sont en train d’être considérées. À ce stade, on sait que les compagnies étudiées devront avoir un chiffre d’affaires de Rs 500 millions au minimum (156 compagnies se qualifiaient selon le Top 100 de 2019) et qu’elles doivent être systémiquement importantes pour l’économie (on a d’abord mentionné les groupes hôteliers et textiles). On sait que la somme non négligeable de Rs 80 milliards est éventuellement disponible ! Pour mettre en perspective, l’endettement du secteur hôtelier en était à approximativement Rs 38,5 milliards à août 2019. On ne sait pas qui sont les personnes qui étudient les dossiers : des officiers de la BoM ou des professionnels indépendants de 1re ligne ? On ne sait pas si les banquiers sont dans le coup ou s’ils sont consultés. On nous annonce qu’il y a 40 dossiers devant la MIC et que deux premiers dossiers sont déjà approuvés. On ne sait pas lesquels. Ni pourquoi. Ces financements en sus de couvrir la casse déjà consommée envisage-t-elle de continuer, dans le futur, à couvrir le ‘manque à gagner’ par rapport à la situation ‘normale’ pré-Covid ? Le ministre des Finances parlait de l’aide de la MIC qui doit assurer un retour sur investissement et qui demande des garanties alors que le communiqué de départ de la Banque centrale parlait de «equity/quasi equity». Peut-on réconcilier ? Quelle «gouvernance» est prévue ? Une commission indépendante est-elle prévue éventuellement pour jauger, ex post facto, de la pertinence des interventions et de leur capacité à ‘sauver les meubles’ pour l’économie nationale ?
«La MIC ne devrait pallier que les difficultés causées par la Covid-19 et le ‘lockdown’ ordonné par l’État, et non pas celles qui existaient déjà avant la mi-mars 2020»
Devant toutes ces interrogations, un article de M. Gilles Michel, ex-directeur général du Fonds Stratégique d’Investissements (FSI) français, publié le 2 juin dernier par le Charles Telfair Institute (http://charlestelfaircentre.com/) décrit quelques pistes intéressantes qui mériteraient considération et, le cas échéant, adoption. L’approche de base du FSI, créé pour répondre aux conséquences engendrées par la crise financière de 2008-2009, avait été alors résumée dans une formule captivante et juste : «Répondre aux difficultés des entreprises, mais pas aux entreprises en difficulté». Le sous-entendu pour nous étant, que la MIC ne devrait pallier que les difficultés causées par la Covid-19 et le ‘lockdown’ ordonné par l’État, et non pas celles qui existaient déjà avant la mi-mars 2020. Ce qui est loin d’être un exercice facile à mon sens… Le FSI allait même plus loin en se portant responsable d’investir dans des «entreprises porteuses du renforcement de la compétitivité française», y compris au niveau PME et DTI ! Le FSI semble avoir mené sa mission à bien grâce à son approche professionnelle, sa transparence et sa réactivité, intervenant dans 800 entreprises, et le rapport de juin 2011 du sénateur Fourcade à la commission des Finances en atteste. M. Michel, étant basé à Maurice, pourrait possiblement être de bon conseil ?
Des questions qui se poseront sans doute dans ce secteur du tourisme mis en panne presque totalement par le coronavirus pourraient comprendre les suivantes : Doit-on soutenir un secteur dont on ne sait même pas quand il générera des revenus ? Si la reprise, après l’ouverture des frontières est, comme on peut le postuler logiquement, relativement faible et prolongée, n’est-il pas concevable que la situation déficitaire de ces entreprises soit pire, pour entamer la reprise, que la fermeture totale elle-même ? Y a-t-il un scenario envisagé ou la reprise est tellement longue ou faible que l’on doive se poser la question de la fiabilité intrinsèque de cette activité ? Quels sont les critères selon lesquels on jugerait pareil scénario ?
À mon avis personnel, le secteur hôtelier remontant tout juste la pente jusqu’en 2019, va être ébranlé, mais s’en sortira, parce qu’il va s’adapter, mais il est probable qu’il ne fera pas partie des secteurs de croissance de ces prochaines années ! L’horizon immédiat que nous scrutons va probablement inclure une absence de nouvelles chambres et une halte aux nouveaux permis, une réorientation de nos offres vers les vacances à plus long terme (les billets d’avion qui pourraient coûter plus cher avec la distanciation physique seront sans doute mieux amortis sur 14 plutôt que 7 jours…), les offres plus luxueuses, des hôtels peut-être partiellement fermés, le «work from Covid-free Mauritius» (voir l’express du 18 juillet, Réquisitoire pour de la transparence, dernier paragraphe) et même l’industrie de la retraite, ce qui demanderait, dans tous les cas, une procédure de tests Covid quasi quotidiens dans nos hôtels et la mise sur pied d’unités de traitement de première qualité si jamais un visiteur se révélait être positif.
On n’a pas fini d’en voir avec ce coronavirus ! On ne sait pas trop ce dont l’avenir sera fait, mais garder les frontières fermées, c’est sans doute assurer le scénario le plus prévisible : celui de la calamité garantie ! Y compris pour les groupes hôteliers qui auront été, entre-temps, aidés par la MIC…
L'édito paru cette semaine dans Business Magazine
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