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Mieux que Trump !

8 septembre 2020, 16:13

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Trump !

C’est à peine croyable, mais Trump existe ! Et il ne cesse d’enlaidir l’image présidentielle de son pays. Prenez dimanche dernier où dans un blitz particulièrement dense de tweets, le président des États-Unis donnait crédit et retweetait des théories conspirationnistes évidées de preuves, proclamant, par exemple, que le nombre de morts du coronavirus était volontairement exagéré et que les troubles civils à Portland étaient en fait un début de coup d’État contre sa personne ! 

Cet homme qui a aussi flirté avec l’idée de se désinfecter du Covid-19 en utilisant du lysol renchérissait en demandant que l’on mette le gouverneur de New York, Andrew Cuomo en prison, en menaçant les protestataires devant la Maison- Blanche d’un envoi de troupes fédérales, tentait d’infantiliser son adversaire Biden, s’attaquait à CNN et NPR, offrait son soutien à un de ses partisans accusé de meurtre à Portland et allait jusqu’à rendre publics le numéro de téléphone et l’adresse du maire de cette ville alors que des convois de ses partisans, armés comme il se doit, étaient dans cette ville pour «mettre de l’ordre». Je suppose qu’il est plutôt évident d’être le candidat de la «paix et de l’ordre» quand on se retrouve systématiquement dans le rôle de celui qui divise la nation et encourage les confrontations ? 

Cela fait, par ailleurs, quelques mois déjà que Trump essaie de protéger ses arrières et d’expliquer une défaite éventuelle à la présidentielle de novembre, en prétendant, sans aucune preuve, qu’il y aura une fraude massive notamment au niveau du vote postal. L’on se souviendra qu’avant son élection en 2016, il avait aussi, dans le même but, jeté le discrédit sur les résultats éventuels, prétendant que plus de 5 millions de votants étaient des votes «illégaux». Une commission d’enquête nommée par lui-même, après son élection, fut cependant dissoute après quelque temps faute de se trouver de quoi se mettre sous la dent pour contrer la victoire, au vote populaire de Hillary Clinton ! Ce fut pareil pour son affirmation, pendant des années, que le président Obama n’était pas né à Hawaii, mais en Afrique d’ailleurs ! 

Or, maintenant, une enquête du NewYork Times vient révéler qu’alors même que le président Trump parle des risques de fraude sur le vote postal, son équipe de campagne fait de la publicité avec ses propres partisans pour en faire usage (1). Ainsi, alors même que l’équipe de campagne Trump dépensait 200 000$ sur Facebook, depuis mai, pour dire comment le vote postal va «kidnapper» l’élection, elle dépensait aussi 650 000$ sur Facebook pour demander à ses partisans d’utiliser ce même vote postal. Pour ne pas être à une contradiction près, il invitait ses partisans en Caroline du Nord à voter physiquement en sus d’utiliser un vote postal, ce qui est un acte illégal. 

Lors de sa visite à Kenosha où un policier avait tiré la semaine dernière… sept balles dans le dos d’un Jacob Blake désarmé, le président Trump, lors d’une visite non souhaitée, défendait ce policier en disant que dans ces moments de stress intense, un policier pouvait s’étrangler (choke), tout comme un joueur de golf qui rate un putt de trois pieds dans un tournoi ! 

Ce qui est certain c’est que George Floyd, qui n’était pas un saint, a été, lui, très effectivement étranglé et que Jacob Blake, qui n’était pas un saint non plus (au moment des faits il était chez sa petite amie, malgré un ‘protection order’ et il l’aurait agressée sexuellement…) ne pourra sûrement pas jouer au golf si cher à Trump, étant maintenant paralysé des deux jambes ! 

Pirouette finale pour la semaine Trump. Le grand matamore qui voulait régler les comptes de la Chine commercialement a, cette semaine, eu une mauvaise surprise. Le déficit commercial de 347 milliards de dollars que Trump trouvait choquant en 2016 et qu’il voulait réduire notamment à travers tarifs douaniers et négociations fortes ‘à la Trump’ a en effet été réduit en 2019 à… 345 milliards de dollars. Alléluia ! 

C’est à peu près la seule grâce qu’a désormais Pravind Jugnauth à mes yeux : il n’est pas Donald Trump ! 

Mais encore ! Faut-il se contenter de si peu ? 

Dans son message à la nation lundi, après la marche pacifique colossale du 29 août, le PM laisse, encore plus, le pays sur sa faim. 

S’il a raison de dire que cette marche pacifique de samedi est une «preuve de démocratie vivante», il néglige complètement de prendre note que cette marche était largement motivée par SES propres atteintes à la démocratie et aux libertés fondamentales ! Le Prosecution Commission Bill, la clause 146 de l’ICTA, le boycott – publicitaire et autre – des médias libres, les arrestations arbitraires pour «met enn cracking», le Parlement systématiquement démonétisé, la loi anti-Hofman, la MBC partisane, le… ce sont tous des détonateurs de cette marche et c’est lui-même le poseur de bombe ! 

Quand il dit que «tou létan finn respekté rézilta éleksion», il néglige de dire que ce sont ses propres nominations partisanes à l’Electoral Supervisory Commission qui ont permis de semer plus de doute ! Quand, en plus, les procès en cour ne peuvent pas s’entendre rapidement, comme souhaité par l’ESC lui-même d’ailleurs, parce que les hommes de loi des défendeurs sont à la manoeuvre, debout sur les freins, ça n’aide pas non plus ! 

«Mo finn res konstan lor mo bann Valer… dan divizion péna progré» est une belle phrase, un credo valable s’il est sincère. Cependant, comment le réconcilier avec des années de népotisme, de favoritisme, de chances et de traitements inégaux ? La méritocratie est une des clés de voûte qui tient une nation unie. Est-il satisfait de la pratiquer ? Est-ce ce qui mène, par exemple, à licencier un conseil d’administration entier au Mauritius Standards Bureau parce qu’il refuse de nommer Mme Boygah qui représente le «voeu du chef de parti» ? À l’autre bout du recrutement privilégié, les Coast Guards savent-ils tous nager ? Sont-ils tous à l’abri du mal de mer ? Ou y a-t-il d’autres critères en jeu ? Peut-il comprendre que les nominations pipées causent la «division (ki) péna progré»

Ce lundi soir, le PM a tenté de séduire les jeunes, en leur balançant un nouveau «Council» **: «Gouvernman finn pran not dé zot préokipasion : lanvironnman… Lanvironnman enn priyorité pou mo gouvernman.» Allez réconcilier cette déclaration avec un pays de plus en plus sale, une véritable poubelle, que ce soit sur le bord des routes publiques, dans les rivières, les plages publiques ou les lagons*. Allez réconcilier cette déclaration avec le problème des chiens errants ou des rats ou celui de la gestion des dépotoirs. Est-ce que le problème de pesticides dans l’alimentaire est réglé, même si nous ne contrôlons ni le riz, ni les grains importés par exemple et ne faisons, au ministère, que 35 tests incomplets par mois ? Si nous renforçons bien nos plages avec des murs en béton et des gabions, que fait-on de solide pour réhabiliter la vie de nos lagons et s’il s’y trouve des succès, ou sont-ils depuis le pennaeus jugnauthii lâché, à l’époque, dans le lagon de Bambous-Virieux (l’écloserie des Japonais ayant coûté Rs 75 M en 1986) ? 

Enfin, quand dans cette déclaration de lundi, Pravind Jugnauth évoque la possibilité du naufrage «délibéré» du Wakashio et d’une enquête menée par le juge Hamuth dont il appliquerait les conclusions, comme pour la commission d’enquête sur la drogue, on croit rêver ! Pour deux raisons. D’abord parce que cette enquête serait essentiellement technique et ne concernerait que les insuffisances côté Wakashio, mais pas celles des autorités locales. On en attend toujours les «terms of reference» pour confirmer… Ensuite parce que parmi les mesures fortes du rapport Lam Shang Leen, nombreuses ont été celles mises de côté ! Comme le «sea lane», les radars à moderniser, les mesures préconisées pour la NCG, l’ADSU, etc. 

Le ton utilisé lundi était bon, le contenu pas. Le malaise va demeurer !


*Chapeau bas aux manifestants du 29 août, pour la propreté des rues après, tout étant relatif !
**Combien en avons-nous de ces Commissions, Authorities, Councils et autres et qui s’assure de leur Cost/Benefit au pays plutôt qu’au… parti ?