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La vie facile de l’opposition

13 septembre 2020, 14:00

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Ce n’est pas seulement le gouvernement qui est sous pression après l’admirable participation d’une société civile vivante, plurielle, créative, qui s’est fait voir et entendre encore une fois ce samedi dans les rues de Mahébourg.

Ce n’est pas seulement contre nos dirigeants du jour que toutes ces âmes patriotes manifestent, quadricolore en étendard et slogans originaux en porte-voix. Cela n’a échappé à personne que la rue, devenue le lieu cristallisant toutes les colères, ne se bat pas uniquement contre la façon de faire des dirigeants du jour mais rejette totalement tout le système politique dont l’opposition parlementaire fait aussi partie.

Ainsi, si les Bour li deor continuent à résonner, ce n’est pas pour autant que la nouvelle énième alliance rouge-mauve-bleu représente automatiquement l’alternance au pouvoir. Car notre drame est que les quatre partis traditionnels ne veulent nullement changer le système électoral qui leur permet de se retrouver à l’Assemblée nationale, fussent-ils dans les rangs de la minorité de la chambre.

Du reste, que fait l’opposition parlementaire actuelle, si ce n’est qu’elle surfe sur la vague de l’impopularité du gouvernement, tout en ayant la vie aussi facile qu’un long fleuve tranquille en critiquant (certes, avec raison) la manière de faire de Jugnauth et sa troupe, mais tout en étant incapable de faire des propositions concrètes et de montrer son efficacité ?

Un exemple parmi tant d’autres est la scandaleuse mise en congé du Parlement pendant deux mois. Que fait l’opposition, si ce n’est ce qu’elle a toujours pratiqué : dénoncer cette fermeture, qui reste un thème parmi d’autres dans une conférence de presse, en affirmant qu’il y aurait une éventuelle motion ? Mais encore ?

N’y avait-il pas là une nécessité d’utiliser une arme légale – et ce ne sont pas les hommes de loi qui font défaut au sein des trois partis – pour acculer le gouvernement et le placer devant ses responsabilités ? D’autant que non seulement le Parlement (qui, de manière générale, s’octroie trop de jours off) était en congé forcé pendant six longues semaines à cause de la Covid-19 mais aussi parce que nous sommes dans une situation de crise avec les récents tristes événements : naufrage du Wakashio, trois morts inacceptables à bord du remorqueur de la Mauritius Ports Authority…

Doit-on également souligner toutes ces questions sans réponse, à l’exemple de celle des résultats (toujours attendus) d’échantillons de dauphins morts envoyés – semble-t-il – pour expertise à l’étranger ? Est-ce que l’opposition ne pouvait être plus énergique en exploitant une voie judiciaire ou d’autres avenues sérieuses face à un gouvernement qui se croit propriétaire de l'Assemblée nationale ?

À moins que cette situation sied aux leaders fatigués, mais si l’opposition veut reconnaître que notre système est à bout de souffle, qu’elle le montre et qu’elle arrête de le nourrir en faisant pour la galerie des discours théoriques. Car il est trop facile de se mettre en position de wait and see, d’attendre les moindres faux pas du gouvernement pour mieux les critiquer – même s’il faut encourager toutes les opinions constructives – sans contre-proposition en amont. S’il faut réclamer également des comptes à l’opposition, c’est parce que sa classe politique est nourrie au même lait (expiré) que les élus de la majorité et que toutes ces voix, indépendamment des couleurs, sont unanimement décrédibilisées.

D’ailleurs, c’est parce qu’on a du mal à les entendre que les échos d’autres âmes sont plus audibles, à l’exemple de ceux salutaires du cardinal Piat cette semaine ou encore des discours de Laurette, qu’on apprécie ou pas, mais qui ont le mérite – on l’a encore vu à Mahébourg sur la question des squatters – de ne pas rester au stade des conférences de presse…