Publicité

Content, pas content ?

31 octobre 2020, 08:24

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Quand on regarde ce qui se passe dans le reste du monde, il y a évidemment lieu de mettre les choses en perspective et d’être plutôt content d’être à Maurice, sans Covid ! 

En effet, la France reconfine depuis cette fin de semaine parce qu’elle prévoit, au regard des chiffres de contamination, que dans quelques jours, sa capacité hospitalière pour traiter les contaminés du Covid 19, sera saturée. Ce n’est pas seulement la France, mais son nombre de nouveaux cas sur les 14 derniers jours, par millier de population, est le plus élevé d’Europe ces joursci et tout le monde sait que le refrain d’une telle envolée c’est, qu’au cours des prochaines semaines, il y aura bien plus de cas, potentiellement fatals, à l’hôpital. Au titre du nombre de morts de Covid-19, c’est la Grande-Bretagne qui est en tête du tableau macabre européen : 45 000 morts ! Le taux de propagation actuel chez eux (Ro) est estimé à 1,56 et annonce évidemment pire en aval. L’Allemagne, pourtant disciplinée, est maintenant, malgré tout, au double du nombre de nouveaux cas quotidien par rapport à sa première vague et impose donc un lockdown sévère aussi. Les cas en Europe de l’Est (Pologne et République tchèque surtout), peu nombreux jusqu’ici, explosent. En Inde, les nouvelles contaminations sont en baisse, mais tous redoutent la 2e vague qui pourrait arriver lors de la saison des festivals*. L’Irlande et le Pays de Galles sont reconfinés depuis le 22 octobre, même si les écoles restent ouvertes. En Belgique, en Italie et au Portugal, le nombre de nouveaux cas flambe. Même la Suède, qui avait choisi une voie différente moins restrictive sur ses citoyens et son économie, a vu son chiffre de nouveaux cas atteindre un sommet inégalé jusqu’ici. 

Parmi les études de ces dernières semaines (et elles sont pléthoriques !), citons celle de King’s College qui sur un échantillon malheureusement faible, arrive à la conclusion que les anticorps générés par le Covid-19 sont à leur maximum numérique et donc d’efficacité, trois semaines après l’infection, mais que ceux-ci chutent dramatiquement par la suite, ce qui vient refroidir sérieusement toutes les théories d’immunité collective (herd immunity) propagées jusqu’ici. Une fois infecté, on serait loin d’être immunisé à vie ! Cette première indication suggère aussi que le Covid-19 n’est pas très différent des autres virus qui causent l’influenza classique. En effet, un vaccin contre le Covid ne protégerait alors que pour un temps et demanderait évidemment des rappels ou au moins des injections saisonnières, comme pour la grippe**. 

Si les vendeurs de vaccins seront contents, cela va évidemment compliquer la logistique de diffusion de tout vaccin homologué, aux dépens des pays les plus pauvres, puisque les pays nantis vont augmenter leurs achats ! Autre conséquence : si l’on pouvait, ici, mieux protéger nos citoyens les plus vulnérables et fortement imposer les gestes barrières en permanence, il me semble pour le moins illusoire d’attendre un vaccin ou un tassement «permanent» de la propagation du virus ailleurs, pour ouvrir nos frontières ! Le Covid et l’influenza se ressemblent beaucoup. Les deux semblent être aussi contagieux l’un que l’autre. Le Covid-19 paraît être 10 fois plus mortel, mais pour mettre les choses en perspective, l’influenza n’est mortelle que dans 0,065 % des cas identifiés***. Et nous ne saurons pas si le Covid-19 est la plus dangereuse des maladies contagieuses, tant que nous n’aurons pas eu un temps comparable pour affûter nos thérapies et nos vaccins à un niveau au moins équivalent. Ce n’est pas pour demain… 

D’autant que le Covid-19 a déjà entamé une 1ere mutation, selon le Financial Times. Le nouveau virus, baptisé 20A.EU1., est déjà responsable de 80 % des cas en Espagne, 40 % en France et 60 % en Irlande. On ne sait pas encore si ce mutant est plus ou moins mortel que le Covid-19. Pour finir avec la mise en perspective du jour, sir David Attenborough se fait maintenant le porte-parole de ceux qui, depuis quelque temps déjà, préviennent que c’est l’HOMME qui est le premier responsable des récentes pandémies et que notre pouvoir destructif grandissant sur les écosystèmes de la planète va déclencher de plus en plus de pandémies, de plus en plus fréquemment****. 

Voilà, on est prévenu ! 

****** 

Aucun Premier ministre et aucun Président d’aucun pays ne devrait être soumis à des accusations farfelues, à des insinuations légères, à des incriminations fantaisistes et encore moins à des mensonges délibérés. Il y va du respect de la fonction de chef d’un État et du pays qui va avec. 

Mais que fait-on quand il y a des faits troublants dûment documentés qui deviennent disponibles et auxquels le principal intéressé refuse de réagir pendant des semaines, au demeurant refusant de répondre à des questions précises qui lui sont posées en brandissant à la place des menaces de poursuites anticipées de diffamation ? 

La vie publique en démocratie est ainsi faite que la population a le droit de savoir ce que fait et ce dont est capable leur leadership politique. L’intérêt public le réclame ! Cela peut être inconfortable pour celui qui doit répondre en toute transparence bien sûr, mais c’est le prix à payer pour assumer son mandat de responsabilité à la tête d’un pays démocratique. C’est assurément plus simple dans une autocratie, bien sûr, où l’opposition, la presse et la société civile ne sont pas libres, parfois même cadenassées et doivent raser les murs. Il est sans doute plus commode de diriger pour Messieurs Erdogan, Biya, Xi, Kagame, Putin, Rakhmon ou Kim, du moins jusqu’au jour où il leur faudra rendre compte. Et ce jour finit bien par arriver comme pour Loukachenko ces jours-ci ou dans un passé plus ou moins lointain Pinochet, Baby Doc, Mussolini, Marcos, Ceausescu ou Ben Ali. 

Mais nous sommes, ici, en démocratie ! Aussi imparfaite soit-elle ! Et comme le disait si bien le Président Mitterrand : «La liberté de la presse présente des inconvénients, mais tout de même moins que l’absence de liberté.» 

Le dossier d’Angus Road est sur la place publique depuis des mois, sans que le PM ne se sente le devoir d’y répondre. De nouveaux éléments documentés, dûment réunis par l’express, sont publiés et diffusés la semaine dernière, malgré une mise en demeure et révèlent, a priori, des situations peu usuelles et plutôt alarmantes. Pour le bon ordre des choses, un journal publie de bonne foi ce qu’il vérifie et sait et la/les personnes(s) incriminée(s) doivent tenter d’expliquer. Comme ont dû le faire les importateurs d’occasion de masques médicaux, sous certificats d’urgence, Nixon dans Watergate, Clinton avec Lewinsky, Park en Corée du Sud, Gurib Fakim à Maurice, Trump en Ukraine ou Dilma Rousseff au Brésil. Les faits actuellement rassemblés par le PM donneront des explications plausibles ou pas. Ce sera à la cour de l’opinion publique de juger d’abord. La cour de justice suivra peut-être si Pravind Jugnauth croit devoir poursuivre et suppose pouvoir ainsi se mettre dans un box pour être éventuellement contre-examiné. 

Content ou pas, c’est comme cela que ça devrait se passer dans une démocratie qui s’estime et dans un État de droit qui se fait encore respecter.

*https://www.bbc.com/news/world-asia-india-54596707
**https://www.theguardian.com/world/2020/jul/12/immunity-to-covid-19-could-be-lost-in-months-uk-study-suggests
***https://www.hopkinsmedicine.org/health/conditions-and-diseases/coronavirus/coronavirus-disease-2019-vs-the-flu
**** BBC. Extinction: The facts