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Bilan d’une défaite

14 mars 2021, 07:49

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Bilan d’une défaite

Quand un gouvernement mise autant sur la vertu de fermer les frontières pour garder le pays ‘Covid-safe’ ; ne plus être ‘Covid-safe’ est une cinglante défaite, une incroyable claque dans la figure ! 

D’autant que le reconfinement qui, selon les plans, n’aurait jamais dû avoir lieu, va évidemment rajouter aux difficultés économiques qui étaient, au départ, ‘misés ‘ou payés pour soi-disant assurer le ‘Covid safety’ de la population ‘...* 

Ainsi le bilan de 12 mois de fermeture des frontières, c’est 12 mois de pénibilité atroce dans le tourisme et dans tous les secteurs qui en dépendent, des entreprises endettées jusqu’au cou (y compris à travers le MIC), des compagnies sévèrement secouées qui ont déjà licencié une partie de leur personnel pour tenter de survivre et qui devront en faire encore maintenant que l’activité est stoppée a nouveau, des milliards de ‘Wage Assistance’ qui ne bouchent évidemment pas entièrement les trous et… un pays infesté de Covid-19 qui n’a vacciné qu’environ 47,000 habitants à ce stade, soit moins de 4 % de sa population ! On en est à la première dose évidemment. 

L’illusion a été que nous pouvions être un ‘triomphe’ sanitaire depuis juin 2020, au risque de pertes économiques supportables. L’hypothèse faite était que le virus allait être contrôlé dans un délai plus ou moins court (d’abord, implicitement, en septembre 2020 selon le dernier budget; puis avec prolongements multiples depuis) alors qu‘il est clair depuis des mois que, vaccins ou pas, le virus va rester sur la planète et que sous ses diverses variantes, il sera finalement endémique et qu’il faudra vivre avec pendant longtemps encore ! Des pays disciplinés comme la Corée du Sud ont encore des cas. Comme la Chine ! 

L’hypothèse maintenant c’est que dans 15 jours, nous aurons, à nouveau, maîtrisé la bête. La probabilité c’est que dans 13 jours devant l’ampleur de nos difficultés, on en rajoutera une couche en prolongeant le lockdown plus encore. Partout dans le monde, c’est comme ca que ça a procédé, y compris chez nous au deuxième trimestre de 2020… Cependant, ‘credit where credit is due’ : contrairement à beaucoup de situations de par le monde, nous ne pouvons être accusés d’avoir enlevé les restrictions imposées trop rapidement ! 

Ajoutons la déclaration de vendredi soir du ministre Jagutpal lors de son briefing quotidien : les cas cette foisci paraissent bien moins virulents ! Et aussi que seules les informations de la MBC et du ‘Government Information Service’ (GIS) doivent désormais être écoutées. Ca ne vous rappelle rien ça ?

Qui veut maintenant revoir l’autre scénario en face ? Celui qui, contrairement au premier scénario, n’interdit pas de mourir du seul Covid-19. Car c’est de cela qu’il s’agit dans le 1er scenario qui va tant nous en coûter : on peut mourir de tout , mais pas du Covid ! 

Dans le scénario alternatif, on raisonne. On contrôle les frontières avec intelligence et discipline, mais on les laissent ouvertes**. On protège rapidement les plus vulnérables avec le vaccin ou l’isolement et la vaccination se poursuit à haute cadence pendant le lockdown. Pour cela il faut des stocks, bien entendu, pourvu qu’on n’ait pas ‘dilwil dan zorey’. On impose les gestes barrières avec un maximum de sévérité. On s’appuie, sans honte et sans complexe, sur les capacités du secteur privé, que ce soit pour gérer les queues ou utiliser leur séquenceur ou fournir des respirateurs qui marchent. Il y aura peut être plus de morts, mais on meurt toujours de quelque chose éventuellement n’est-ce pas ? et notre ‘herd immunity’ s’établira alors peu à peu (infections locales plus vaccins). Le taux de mortalité est d’environ 3 % sans immunité aucune… il n’y presque aucune immunité de troupeau dans notre pays... 

Un des problèmes à ce stade c’est qu’un retour des touristes ne se fera pas, de toute facon, du jour au lendemain. Mais les pays vaccinés se sentiront peut-être pousser des ailes pour visiter, dans les mois qui suivent, un pays ayant été officiellement…’Covid-safe’ pendant 9 mois ? 

Reste à établir le diagnostic de la débandade. Les frontières fermées, c’est bien, pour sûr, sauf quand on commence à y façonner des exceptions. Les pilotes d’avion et les stewards supposés se confiner chez eux, les diplomates, les délégations officielles, ceux qui auraient pour une raison ou une autre échappés a la quarantaine stricte , ceux qui auraient, pour une raison ou une autre, échappé à la quarantaine stricte, ceux qui, relâchés après 14 jours ayant été testés négatifs, avaient, semble-t-il, selon la Dr Gaud, une infime chance d’être vecteur quand même, ceux qui ont peut-être été testés ‘false negative’, les visiteurs par jets privés… qu’en sais je ? Ça en fait des trous dans le filet ! Ce qui rendait la probabilité d’une infiltration assez haute, tôt ou tard. Le triomphe, c’est que l’on ait passé presque neuf mois à l’abri grâce aux gestes barrières, encore partiellement pratiqués en interne. Puisque des cas traînaient chez nous depuis quelques semaines déjà, avant l’arrivée de la délégation indienne… (Jagutpal dixit) 

Un sage que j’ai beaucoup pratiqué disait toujours qu’à vouloir tout contrôler, on finissait évidemment par être responsable de tout. Le gouvernement de Pravind Jugnauth ne pouvait cesser de jubiler de son triomphe sur le Covid ? Il faudra bien qu’il assume maintenant la défaite et la casse qui va avec. Il contrôle à peu près tout dans le pays et ce n’est ni la presse, ni le judiciaire, ni le DPP qui peuvent être tenus pour responsables.

Qui est celui qui aura fauté ?

On aimerait bien le savoir !

On sait déjà qui va payer…

 

*la politique fiscale du pays dans le sillage du Covid (et pour payer ce qui précédait aussi, comme la pension de vieillesse...) est, selon Moody’s «one of the largest amongst Moody’s-rated sovereigns»

**pour les hôtels, on recoit des vaccinés d’abord, des testés PCR ensuite, on fait un test payant tous les trois jours et on prévoit une aile isolée jusqu’au départ pour ceux testés positifs. Heureusement que les cas ne semblent pas aussi virulents qu’en 2020, nous dit notre ministre de la Santé. Ce qui est fait pour nous rassurer.