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L’histoire révoltante de nos dialysés

11 avril 2021, 07:41

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Habib Unjore, 73 ans, est décédé vendredi soir des suites d’une mauvaise dialyse ou du Covid-19 ou d’un mélange des deux en sus d’une éprouvante pression psychologique. La communication du gouvernement ne dit pas tout quand elle essaie de retourner la situation en sa faveur. 

Ce militant de Souillac, connu pour son engagement politique en faveur des défavorisés, est devenu le sixieme dialysé à mourir en une dizaine de jours ! Vous vous rendez compte ? 

Il faisait partie du malheureux groupe de 87 patients-dialysés à l’hôpital Souillac ; desquels 36 ont chopé le coronavirus, alors même qu’ils étaient dans un centre de santé. Ont-ils été contaminés par ceux qui, eux-mêmes, ont été contaminés par le patient zéro ? On ne le saura, sans doute, jamais, n’est-ce pas Dr Jagutpal ? 

Le plus révoltant dans cette tragédie c’est que les Unjore ont dû se battre contre un système bancal, malade, sans coeur. «Mon mari faisait ses dialyses depuis cinq ans et il menait une vie normale. Tout bascule le 26 mars dernier quand Habib est placé en quarantaine alors qu’il dépendait de moi pour ses besoins quotidiens. En quarantaine, on lui a servi des repas pas appropriés, il a dû faire lui-même sa lessive. Toutes mes demandes pour pouvoir le voir ont été refusées. Il ne comprenait pas pourquoi je ne pouvais pas le voir alors qu’il avait besoin de moi. Il se sentait comme dans une cellule…» nous a raconté, hier, sa veuve, Aziza Unjore.

Et quand la mort survient, la souffrance ne s’arrête pas là. Elle se prolonge. Les proches de Habib Unjore n’ont pas pu voir son visage, une dernière fois. Même pas à travers une vitre. 

Le sort de Habib Unjore est une histoire révoltante puisqu’elle concerne aussi les cinq autres dialysés qui viennent de mourir et les dizaines d’autres qui sont actuellement en traitement, au sein d’un service hospitalier, qui est lui-même au coeur de la propagation du virus. 

Ivan Collendavelloo, qui s’y connaît en dialyse, s’est retenu quand il a critiqué le traitement inhumain et criminel qu’on inflige aux dialysés. Il parle de «solidarité impuissante» car il ne peut grand-chose, comme simple député aujourd’hui, face à la communication toute puissante du National Communication Committee ou du High-Level Committee, qui prend des décisions de vie ou de mort, sans procès-verbal aucun, comme pour ne pas laisser de traces. 

Mais l’histoire de Habib, dont le nom ne viendra pas s’ajouter à la liste des 12 victimes – officiellement du moins – du Covid depuis mars 2020, et celle des autres dialysés resteront, comme pour contredire les manquements et les non-dits de ce gouvernement. 

Le drame humain qu’on vous relate n’est pas un fait-divers face à une situation dans l’ensemble favorable. Aujourd’hui, nous avons affaire à un Premier ministre invisible après son incommunication, un ministre de la Santé qui dit tout et son contraire dans la même phrase, et des conseillers en com’ qui veulent tout positiver, au lieu de faire preuve de compassion, d’empathie, d’humilité. Voilà des gens qui monopolisent les ondes et qui pensent pouvoir s’en sortir en imposant leurs discours si décousus, en évitant les questions qui dérangent. 

Après avoir 1) chanté que le pays est Covid-safe quand il n’était plus Covid-free; 2) détourné des milliards sous le couvert des Emergency Procurement Procedures; 3) jeté des centaines de millions de notre argent par les fenêtres en invitant les fans de Liverpool à venir chez nous alors que nos frontières sont fermées et que les Britanniques nous placent sur leur liste rouge ; 4) recouru au reconfinement tout en distribuant plus de 530 000 WAPs ; 5) refusé la main tendue des députés de l’opposition avant d’expulser trois d’entre eux ; 6) échoué à sécuriser notre dose nationale de vaccins parce qu’on n’était «pas pressé» (dixit Jagutpal et Gaud) ; 7) braqué la communaute internationale sur la politique fiscale bancale du pays dans le sillage du Covid… 

… on arrête de se bomber le torse à la télé et on demande des excuses au peuple souverain. Le bilan de la gestion du Covid-19 après plus d’une année de fermeture des frontières, qui prend de plus en plus des allures d’une défaite sans appel, va bientôt nous exploser à la face, malgré toute la propagande gouvernementale… Ce jour-là n’est pas trop loin.