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L’État de droit et le chaos sud-africain

14 juillet 2021, 07:33

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La semaine dernière, quand l’ancien président sud-africain, Jacob Zuma, se constitue prisonnier dans un établissement pénitentiaire de sa province d’origine, le KwaZulu Natal, la communauté internationale acclame. L’Afrique du Sud démontre ainsi son respect de l’État de droit, condition sine qua none du développement économique – à l’opposé d’une politique d’impunité.

Après avoir tout fait, durant plusieurs années, pour échapper à la justice, Zuma n’a eu d’autre choix que de se conformer à l’ordonnance d’incarcération rendue par la Cour constitutionnelle le 29 juin. Il a été trouvé coupable d’outrage à la justice et a été condamné à 15 mois de prison ; une première fois pour un ex-président en Afrique du Sud.

Plus tôt cette année, la Cour constitutionnelle avait sommé Zuma à comparaître devant une commission d’enquête judiciaire sur des allégations de «state capture» (détournement des biens de l’État), de corruption et de fraude dans le secteur public. Mais Zuma avait systématiquement refusé d’obtempérer et de collaborer avec la justice de son pays, car cela représentait un affront pour lui. Il pensait, comme grand chef de tribus, qu’il était au-dessus de lois.

Mais dans la rue, ces derniers jours, la tension dans le camp des pro-Zuma s’intensifiait. Et ce, même si le parti au pouvoir, l’ANC, (que Zuma avait dirigé pendant longtemps), a exprimé «un engagement sans équivoque et la défense de la Constitution, en particulier la suprématie de la Constitution, la primauté du droit et l’indépendance du pouvoir judiciaire, parmi les principes et valeurs fondateurs de la République». Mais Zuma n’était nullement d’accord et a commencé à chauffer ses partisans. Son fils, Edward Zuma, a juré, avant que son père ne se rende, qu’il y aurait une effusion de sang si l’ancien président était arrêté.

Et c’est précisément ce qui s’est passé…

Aujourd’hui, le chaos s’est installé dans le pays voisin, le géant de la SADC et du continent est devenu la proie de flammes, de pillage, d’émeutes, de désolation. Les militaires ont pris le relais de la police pour restaurer l’ordre et la paix. Déjà à terre par le Covid-19 – l’Afrique du Sud a subi la plus grave crise pandémique de toute l’Afrique –, l’économie sud-africaine suscite désespoir et colère. Le président Cyril Ramaphosa a prévenu sur les ondes : «Si les scènes de violence ne cessent pas, l’Afrique du Sud pourrait connaître une guerre civile et des affrontements inter-ethniques du début des années 90…» Ce qui constituerait un retour en arrière pour la plus grosse économie sub-saharienne.

Désormais, les Sud-Africains en général et les investisseurs en particulier ont peur. Beaucoup ne veulent pas être prisonniers du brasier qui s’annonce. Le risque d’afflux de réfugiés et, partant, du virus Delta, dans les pays voisins, y compris à Maurice, est sérieux. Les autorités mauriciennes ont intérêt à s’y préparer, surtout avec l’ouverture de nos frontières.

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Si on pensait en 2018 que l’arrivée de Cyril Ramaphosa à la tête du Congrès national africain (ANC) allait améliorer la donne, on aurait péché par excès d’optimisme. Car, sous les cendres, il y avait du feu qui couvait. Les choses se sont précipitées – l’incarcération de Zuma si elle a mis le feu aux poudres n’est qu’un prétexte. Le terrain était explosif, car la corruption et les inégalités ont pratiquement tout gangrené en Afrique du Sud, les institutions sont presque à genoux, suspendues à des symboles ethniques. La pandémie est venue jeter du kérosène sur les pneus qui brûlaient çà et là.

Sans une politique de rupture et une reprise en main de l’ordre public, tout l’espoir suscité par la fin de l’apartheid risque de tomber à l’eau. Entraînant vers l’abîme tout le parti de Mandela, au pouvoir depuis 1994... et aussi, (et c’est bien cela le plus grand drame), une bonne partie de l’Afrique australe, dont nous faisons partie.