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Quel scénario après le «recount» ?

25 janvier 2022, 13:46

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De deux choses l’une : soit le recomptage dans la circonscription n°19 maintient Collendavelloo dans son rôle d’élu, avec un exercice qui n’apporterait aucun changement sur l’échiquier politique. La situation prendrait alors une allure de «back to square one», doublée d’une impossibilité de contester la légitimité de Collendavelloo qui retrouverait et son siège et son honneur. Pour autant, si le recount confirme l’élection de l’ancien vice-Premier ministre, cela n’aurait aucun impact sur le plan politique quand l’on sait que depuis qu’il a été révoqué par Pravind Jugnauth en juin dernier, le leader du ML – dont le parti n’a jamais eu un poids conséquent – se fait plutôt discret.

D’ailleurs, non seulement le MSM n’accorde pas d’importance à son partenaire d’alliance MSM-ML mais les camarades de parti de Collendavelloo ne sont pas tendres envers celui qui, malgré sa révocation par le Premier ministre, est resté député. C’est ainsi qu’avant même que la cour ne rende sa décision pour un recount, le président du Mouvement Liberater, Anil Gayan, n’a pas épargné le député du n°19, affirmant (sur Radio One) que, quels que soient les résultats du recomptage, le ML a un avenir sans Collendavelloo. «Quand vous êtes un leader d’un parti révoqué par le Premier ministre, la révocation étant que le Premier ministre ne vous fait plus confiance, votre devoir est de démissionner et de ne pas faire partie du gouvernement. Il est resté. C’est un manque de dignité.» C’est dire que, même si le recount est en faveur de Collendavelloo, il n’y aura pas de grand impact politique sur l’alliance MSM-ML.

Soit nous assistons à l’autre scénario, c’est-à-dire à un revirement de situation avec un recount en faveur de la candidate Adebiro. Ce serait alors un ébranlement sur plusieurs plans. D’abord concernant les deux ans perdus de députation de la candidate, légitimement éprouvée dès le jour de la proclamation des résultats en décembre 2019. Ceux qui avaient suivi les événements ce jour-là ne peuvent oublier toute la tension qui avait entouré les dernières heures cruciales du dépouillement où la crise de nerfs des militants mauves – qui avaient déjà cru à un 3-0 en faveur du MMM – était palpable dans une ambiance confuse, remplie de cafouillage, et un résultat qui avait créé la surprise quand on a vu sur la photo finish, que c’était Collendavelloo qui avait coiffé Adebiro par 92 voix ! 

Sur le plan politique, même si numériquement, un membre additionnel du MMM ne changera pas la donne dans le camp de l’opposition, si ce n’est que la situation mettra (avec raison) du baume au coeur mauve, une arrivée éventuelle d’Adebiro pourrait susciter un bouleversement sur l’échiquier politique. Une permutation des places au travers du système de Best Loser fait partie des probabilités avec le risque qu’un/e député/e perde sa place, obtenue sur la base d’une «erreur» ! Ce qui serait une situation inédite. 

En attendant l’issue du recomptage, pour l’heure, toutes ces agitations illustrent des incohérences et ne peuvent empêcher une perception d’anomalies, avec la possibilité d’une conclusion d’un acte de grande injustice. Mais les secousses auxquelles nous assistons ont des répercussions allant au-delà du n°19. L’événement suscite une quantité d’interrogations dans les autres circonscriptions – ou des pétitions sont en cours –, surtout dans celles où l’écart fut moindre à l’exemple de la circonscription n°1 où 61 voix séparent Dorine Chukowry, arrivée à la deuxième place, d'Arianne Navarre-Marie, sortie quatrième, tandis qu’il y a 47 voix d’écart entre la plaignante et le député du PMSD Patrice Armance, arrivé, lui, en troisième position.

Au final, le jugement de la cour en faveur d’un recount donne un caractère nouveau à toutes les pétitions électorales en nourrissant soupçons et doutes sur plusieurs maillons de la chaîne de l’organisation des élections. Si pendant des années, la commission électorale avait bonne réputation, son image prend un coup avec toute cette affaire. D’où l’appel des leaders des partis de l’opposition pour que le commissaire électoral ne s’oppose pas au recomptage réclamé dans d’autres circonscriptions. Au-delà de tous ces bouleversements, nous ne pouvons que saluer le judiciaire qui, encore une fois, traduit ce rempart permettant à notre démocratie –souvent bafouée – de sortir grandie et gagnante !