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Imperturbables parlementaires !

8 février 2022, 13:48

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La nouvelle demande – vaine – du leader de l’opposition en faveur de la réouverture de l’Assemblée nationale (dont la reprise est prévue pour fin mars) a tout son poids à un moment où plusieurs événements appellent à des débats cruciaux, des changements de fonctionnement, voire de nécessaires révisions de nos lois existantes. Ainsi, il aura fallu le décès brutal d’un travailleur consciencieux qui reprenait son travail au petit matin de la levée des classes cycloniques pour qu’on découvre l’importance tardive de revoir certains protocoles. Si cette situation interpelle, c’est parce qu’elle est symptomatique de plusieurs dysfonctionnements auxquels nous assistons de manière impuissante, sans moyen d’obtenir des réponses de la part des élus, grassement payés pour représenter les citoyens au Parlement mais toujours en congé en ce deuxième mois de l’année !

Outre le cyclone Batsirai qui laisse dans son sillage nombre d’interrogations que les dirigeants, siégeant sur le National Crisis Committee, auraient pu fournir à l’Assemblée nationale, ces derniers jours ont été le théâtre de plusieurs autres choquantes secousses. Entre les incroyables anomalies notées dans le recomptage des voix au n°19 (73 bulletins manquants, deux enregistrés sans le sceau officiel et un autre appartenant au n°1 retrouvé à Stanley/Rose-Hill), les nouvelles conclusions d’un foul play dans la réouverture de l’enquête judiciaire sur le meurtre de Kistnen et les rebondissements dans l’affaire Molnupiravir autour des prix disponibles et les achats des médicaments, ne devrait-on pas s’attendre à ce qu’on nous rende des comptes ?

Dans un pays où la proposition d’un Freedom of Information Act ne sert qu’à noircir des manifestes électoraux, dans une société où tout est fait pour tenter d’étrangler la presse libre, quand des internautes ne sont pas envoyés en prison pour avoir critiqué le pouvoir, le Parlement représente – malgré les tentatives de museler là-bas aussi l’opposition parlementaire – des voix citoyennes. Et ce n’est pas un service demandé que d’exiger qu’en ces temps de pandémie (qui a malheureusement gagné Rodrigues avec ses habitants en quête légitime d’informations), d’incertitude et de grands changements sur plusieurs plans, l’on réponde à nos questions ! Sauf que nous vivons dans une société où les gouvernements ouvrent et ferment le Parlement à leur guise, peu importe l’état du monde !

En décembre dernier, alors que Duval, soutenu par ses camarades de l’opposition, avait une première fois tenté par voie de motion de réclamer la non fermeture du Parlement, c’est sur un ton arrogant que le Premier ministre répondait alors, affirmant que l’Assemblée nationale était toujours ajournée en décembre. Certes, mais par ces temps de crise, n’aurait-il pas fallu que les élus retrouvent le chemin du Parlement dès janvier, à l’exemple de tous les travailleurs qui ne chôment pas depuis début 2022 ? 

Pour motiver ce comportement insouciant, Pravind Jugnauth devait ajouter qu’il n’a aucune leçon à recevoir de la part de ceux qui avaient fermé le Parlement pendant neuf mois en 2014 ! Et c’est ainsi qu’on pourrait continuer à justifier toutes les absurdités d’aujourd’hui en prenant (un mauvais) exemple sur d’autres idioties antérieures ! La réflexion aurait pu être plus simpliste : ce n’est pas parce que les autres inn fane ki nou bizin fane nou ousi !

À l’heure où chacun fait l’expérience d’un changement depuis 2020 avec l’arrivée du coronavirus, au moment même où des milliers d’enfants mauriciens s’apprêtent – difficilement pour nombre d’entre eux – à revivre une année scolaire à la place d’un trimestre, le Premier ministre ne voit pas pourquoi l’on aurait pu espérer une rentrée parlementaire plus tôt !

De janvier à fin mars, voici donc nos élus, privilégiés, qui, indignement, sont toujours en vacances parlementaires, à la manière de Jagutpal qui égrène des mesures pour le grand public, pendant que lui danse joyeusement sans respect de ce qu’il prône ! Pourtant, cela ne nous aurait fait aucun mal si nos dirigeants étaient en phase avec la société dans laquelle nous vivons !

Si les deux confinements qui se sont succédé depuis 2020 nous ont privés de quantités de séances parlementaires, nos honorables ne voient aucune urgence à rattraper le temps perdu et ne s’inquiètent nullement du devoir de rendre des comptes à leurs employeurs, soit les citoyens !  

Plus le Parlement reste fermé, plus le Premier ministre et les siens peuvent esquiver les questions de l’opposition parlementaire,  mieux la majorité se porte !