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Dividendes et libertés

8 mai 2022, 09:21

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La montée des prix a enflammé les passions au point où il y a eu des protestations sonores, un peu partout sur la planète, et même quelques débuts d’émeutes, y compris ici dans divers endroits de l’île. Fort heureusement, cela n’a pas duré, malgré les tentatives de certains de fouetter communalement une équation purement économique, en déséquilibre temporaire. Avec l’accent, espérons-le, sur le mot ‘temporaire’.

Car la spirale ascendante des prix sur le marché mondial, alimenté en cela par une dose certaine d’opportunisme capitalistique, ne devrait pas durer. En effet, comme toujours, deux forces irrésistibles sont inévitablement en marche quand les prix se déchaînent sur les marchés mondiaux. La première de ces forces, c’est la demande. En effet, aucun prix ne peut grimper éternellement car au-delà de certains niveaux, la demande sera forcément réduite proportionnellement jusqu’au point de trouver un point d’équilibre inférieur. Les économistes se réfèrent ici au phénomène de l’élasticité de la demande ; et si le kilo de riz valait Rs 500, vous pouvez être sûr que l’on en mangerait moins au bénéfice d’un autre féculent. Comme le manioc, par exemple.

De même quand le prix d’une commodité augmente, cela stimule inévitablement de nouvelles productions, ce qui équivaut à une augmentation de l’offre, ce qui fait baisser les prix, même si cela, parfois, peut prendre un peu de temps. La flambée des prix des légumes peuvent ainsi générer de nouvelles plantations, dont les résultats se feront voir quelques semaines plus tard. Quand le prix du fret se voit multiplié par quatre, l’armateur-type voudra en profiter au maximum et tentera donc d’accélérer la mise en route de nouveaux tonnages, parfois bloqués dans des ports encombrés comme Los Angeles ou Shanghai, parfois alignés dans une chaîne de production dans un chantier naval. Ces processus seront forcément plus lents…

Revenons au prix du baril de pétrole, point d’orgue de tant de nervosité chez les consommateurs de la planète. Il n’y a pas très longtemps, puisque c’était en mars 2020, au début de la pandémie de Covid, le prix du baril touchait un fond absolu de 22.81$ en moyenne du mois, alors que les lockdowns réduisaient dramatiquement la demande. Depuis, la reprise d’optimisme dans les marchés mondiaux avait graduellement gonflé les prix jusqu’à 77 dollars en décembre dernier. C’est Mr Poutine, avec son invasion de l’Ukraine, qui paniquait les marchés quant aux offres futures et fit exploser les prix jusqu’à une pointe de 124 dollars. Le prix du baril est depuis redescendu à 105 dollars. À moyen terme, soyons en sûrs, cette explosion de prix va certainement souligner les vulnérabilités d’une trop grande dépendance sur les hydrocarbures et accélérer la migration vers les énergies renouvelables, le nucléaire, la voiture électrique…

Pour le gaz, beaucoup de similitude. Les pointes de prix à 16/18 dollars le MMBTU entre 2000 et 2010 mènent à la montée du fracking, principalement aux États Unis et à la chute des prix (à entre 2 et 5 dollars le MMBTU) entre 2010 et 2020. Déjà à 5,70 $ en janvier 2022, la guerre d’Ukraine pousse le prix à 6,89 $ en avril 2022. Ce qui va inévitablement accélérer les productions alternatives au LPG russe, notamment celle du LNG, même si les stations de stockage vont prendre un peu de temps pour se mettre en place.

Après les grandes pluies, l’hiver aidant, on s’attend aussi à une baisse graduelle des prix des légumes. Par ailleurs, le taux de renchérissement des prix des commodités montre des signes de ralentissement face aux risques de stagflation et à la demande chinoise qui toussote sous la menace du Covid à Shanghai, à Pékin et ailleurs. Le Covid, contrairement aux humains, est apparemment plus difficile à contrôler, même par un parti communiste tout puissant, affichant pourtant un bilan économique époustouflant !

Le ministre des Finances pourrait donc, avec un peu de chance, bénéficier d’un dividende inattendu, mais bienvenu sur les prix. Espérons-le. Espérons aussi que ce ne sera pas une occasion, ni pour festoyer, ni pour déraper. Plus que jamais, nous avons besoin de mesure, de discipline et de réflexion profonde pour protéger l’avenir du pays.

Ils ont pourtant récemment changé d’uniformes. Mais ce n’était, semble-t-il, pas une bande-annonce pour un changement d’approche ou de mentalité…

La police n’est certes pas controversée seulement à Maurice. On a entendu parler des policiers racistes et violents aux États Unis qui auront mené aux suggestions extrêmes et peu raisonnables de punition sous forme de réductions de budgets. On connaît le cas de George Floyd («I can’t breathe !»). Ce n’est malheureusement pas le seul. En France, on reproche systématiquement aux policiers d’être trop musclés contre les manifestants, mais il ne faut surtout pas négliger ou excuser les amateurs de pavés et de casses que sont les Black Blocs et qu’ont été certains gilets jaunes. En Russie ou en Chine, la police chante sa partition de l’ordre public à tout prix, ce qui en clair interdit aux citoyens de contredire le pouvoir en place ou même de dire leur exaspération ! En Russie, on risque, par exemple, une arrestation et 15 ans de prison pour avoir dit que la Russie est en guerre en Ukraine. En Chine, la promesse «d’un pays, deux systèmes» faite aux Hong-Kongais a volé en éclats face aux besoins de paix d’esprit des dirigeants et les protestataires sont désormais tous aux arrêts ! Au Bénin ou au Soudan, les policiers ont fait face à la société civile en colère, avec des morts à la clé.

Nous n’en sommes pas encore là, ici. Heureusement. Mais nous sommes, depuis longtemps déjà, dans une spirale dangereuse qui nous y mènera pour sûr, si on ne fait pas attention. Ce sera d’autant plus le cas que l’usage abusif de provisional charges dure depuis des années et que la réforme promise sur ce plan n’est toujours pas là. Qu’est-ce qu’on attend ? Devons-nous nous réconcilier à l’idée que cette réforme de la provisional charge (qui n’existe pourtant pas dans de nombreux pays – références) tarde parce que «lord la vinn depi lao» ? Dans une démocratie où le législatif est à la botte de l’exécutif, cela ne surprendrait guère ; aucun dirigeant, une fois élu, ne souhaitant se séparer de ce qui lui convient et lui permet de montrer son pouvoir ; d’une télévision nationale totalement acquise à l’exercice des provisional charges, d’une Quarantaine Act qui renforce les pouvoirs potentiellement liberticides, aux initiatives de nominations à diverses institutions sans même en référer au leader de l’opposition, sauf par un clignement de l’œil goguenard. On étrangle la démocratie municipale avec des prétextes particulièrement frivoles. On déterre même la vieille loi coloniale de la sédition, alors que nous ne sommes plus supposés faire comme ‘eux’, les «triangueurs» de Diego, depuis 1968 ! Il ne reste, dans ce schéma-là, que le judiciaire et le barreau, parmi les rares contrepouvoirs pour défendre le citoyen ; et quand l’on commence à bousculer, comme Me Varma, ou à arrêter, comme Me Bissessur sans beaucoup de gêne, l’on peut entrevoir, sur la toile de fond d’un Prosecution Commission Bill qui voulait émasculer le Directeur des poursuites publiques, une vague dangereuse qui, dans d’autres pays aura mené à l’éteignoir des derniers bastions indépendants comprenant le judicaire, la basoche et la presse…

Ne vous y trompez pas ! Les appétits totalitaires s’affûtent et se précisent d’autant plus que la situation ambiante se détériore et ne peut se rattraper sans sacrifices. On peut, bien entendu, s’en laver les mains, mais que l’on ne se plaigne alors pas, un jour, de les trouver sales pour avoir été victime consentante et complice silencieux !