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Questions économiques à ne pas occulter

14 juin 2022, 09:37

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Le premier round de débats budgétaires, hier dans l’Hémicycle, a surtout été une occasion pour la majorité de s’auto-congratuler en défendant le «Budget le plus difficile de notre Histoire» et en critiquant les parlementaires des oppositions, ou vice-versa, quand le slogan «For the people, with the People» est détourné par les anti-GM. Cet affrontement systématique entre les deux côtés de la Chambre, ou ce duel manichéen entre les extrêmes, devient alors un match politique, surtout pour la galerie, qui ne nous permet pas vraiment de nous focaliser sur l’état de l’économie. Pourtant, il y a beaucoup de points sur lesquels on devrait s’attarder davantage. 

Quelles sont, de manière dépassionnée, les sources de préoccupation sur le plan économique, puisque la crise est loin d’être derrière nous ? Citons, pêle-mêle, le déficit énorme et durable du compte courant, le déficit croissant de la balance des paiements, la baisse inquiétante des réserves qui vont alimenter des «Extra-Budgetary/Special Funds», la dépréciation constante de la roupie, le taux d’inflation élevé (qui pourrait atteindre 15 % d’ici décembre, si l’on se base sur la tendance mondiale), le niveau d’endettement insoutenable, l’absence d’investissements propices à la croissance et la création d’emplois productifs, le faible taux de croissance, la baisse des normes et le manque d’indépendance des principales institutions chargées de l’élaboration des politiques, le bilan gravement dégradé de la Banque centrale et l’absence des réformes significatives pour une croissance et un développement soutenus… la liste des challenges purement économiques est longue ! 

À écouter les politiciens qui caressent uniquement dans le sens du poil, on pourrait croire, à tort, que nous sommes sortis de l’auberge, grâce à Pravind Jugnauth et Renganaden Padayachy, qui ont pu venir à bout de la pandémie et neutraliser Vladimir Poutine. 

Ils se basent uniquement sur le discours officiel qui contient juste une déclaration sommaire, selon laquelle le ratio de la dette au PIB sera réduit, sans même reconnaître que son poids a déjà paralysé plusieurs politiques budgétaires. 

Autre question importante : le Budget a-t-il vraiment défini notre objectif économique national ? 

Il n’y a rien dans le discours du Budget qui indique que le gouvernement corrige le cap. L’absence de vision est frappante (hormis les efforts pour la sécurité alimentaire et plus de transition écologique). Le manque d’accent sur l’investissement et la croissance saute aux yeux. Un expert de la finance me faisait la remarque que le chiffre de 8 % pour las croissance nominale des exportations a été mentionné dans le discours. Selon lui, ce chiffre tient compte de la dépréciation de la roupie. Nos exportations sont principalement destinées au marché européen et sont majoritairement facturées en euros. Face à l’euro, la roupie s’est dépréciée de plus de 8 %. Aplanir l’effet de la dépréciation donnerait alors un chiffre qui indique une contraction des exportations. Les recettes d’exportation demeurent le principal déterminant du PIB de Maurice. Avec la performance extrêmement morose de nos secteurs d’exportation, on ne peut alors pas s’attendre à un rebond de l’économie. Est-ce pour cela que le ministère des Finances n’a pas proposé sa propre projection ?

Autre interrogation : la Banque de Maurice émettra des obligations avec un rendement annuel de 4 %. Sauf que le bilan de la BoM a besoin d’être recapitalisé. Alors d’où la BoM obtiendra-t-elle l’argent pour les paiements de 4 % ? Un habitué des réserves de la Banque centrale indique que la BoM n’obtient pas 4 % sur sa gestion des réserves. D’où le paiement de 4 % sera-t-il effectué ? Les fonds seront-ils collectés par voie de dépréciation de la roupie ?