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Baie-Jacotet au centre de la rivalité pour le contrôle de l’océan Indien
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Baie-Jacotet au centre de la rivalité pour le contrôle de l’océan Indien
Pour mieux comprendre l’affaire Sherry Singh, il faudrait prendre la mesure des données géopolitiques nouvelles qui ont émergé dans l’océan Indien ces dernières années. Ces données ont complètement bousculé l’ordre ancien établi par les puissances colonisatrices occidentales.
Avec les Anglo-Saxons qui contrôlent l’archipel des Chagos et gèrent une importante base aéronavale à Diego Garcia, deux acteurs sont montés en scène ces dernières années. Il s’agit de l’Inde et de la Chine.
Des faits majeurs à noter dans ce nouveau millénaire. La Chine est devenue une gigantesque superpuissance économique et l’Inde aussi a connu un spectaculaire développement mais sans pouvoir rivaliser avec son voisin de l’autre côté de l’Himalaya.
Dans le contexte purement géopolitique de l’océan Indien, la Chine disposant d’une puissance de feu économique nettement supérieure à l’Inde est en mesure d’appâter bon nombre de pays riverains de l’océan Indien et s’engager dans son projet grandiose de Belt and Road Initiative (BRI). Lequel projet voit la Chine regrouper un grand nombre de pays de l’Asie, de l’océan Indien et d’Afrique pour tout connecter avec l’Europe. A l’exclusion de l’Inde évidemment. Le BRI contourne magistralement l’Inde dans cette configuration.
Mais l’Inde est loin d’être assommée par la montée en puissance de la Chine. Avec l’avènement du phénomène Modi, l’Inde n’est plus dirigée par une élite bourgeoise et intellectuelle souscrivant au socialisme de salon des années 1950 mais par une nouvelle classe politique qui s’est vite acoquinée avec les Etats-Unis, les autres pays anglo-saxons et Israël. Comme les Chinois, les Indiens disposent de gigantesques ressources et ils ont vite fait comprendre à l’Australie, aux Emirats arabes et à l’Arabie saoudite qu’ils sont unis par des intérêts communs.
Au niveau de l’océan Indien même, la grande réussite des Indiens aura été la bénédiction que ce pays a reçue des puissances occidentales, des pays arabes et africains pro-occidentaux et de l’Australie pour contrecarrer la ‘menace’ chinoise. A un certain moment, l’Australie prenait des positions nettement anti-indiennes mais face à la ‘menace’ chinoise, le coeur du kangourou a opté pour le curry végétarien. D’autre part, qui aurait cru qu’un jour les autorités françaises à la Réunion allaient dérouler le tapis rouge pour accueillir des avions-espions venus de l’Inde ? Que les Indiens étaient most welcome pour accéder aux facilités américaines à Diego Garcia ?
Il ne serait nullement nécessaire d’avoir soutenu une thèse de doctorat dans une université pour savoir que le plus sûr allié ou ‘pion’ de l’Inde dans l’océan Indien ne soit nul autre que la belle île Maurice, l’ancienne Isle de France, le pays tant admiré et connu des Biharis et des gens de l’Uttar Pradesh comme ‘Marich’.
Face à l’Inde, la Chine n’a nul besoin de jouer du dholok ou danser le Bharat Natyam pour conquérir ce qui compte à Maurice. La Chine n’a qu’à faire bon usage de sa puissance de feu économique et financière. Comme elle l’a fait en décrochant le contrat de Safe City qui coûtera Rs 19 milliards, soit autant que le tramway Metro Express.
Avec Safe City, les Chinois n’ont besoin ni d’un ‘survey’ ni d’un équipement de sniffing pour savoir quand Navin Ramgoolam a sorti son Aston Martin pour réchauffer les 12 cylindres du monstre britannique ou si le ministre Avinash Teeluck ait changé de ‘suta’ de corde rouge. Il s’agit là d’une avance considérable sur l’Inde au niveau de ce qu’on appelle l’accès à la mine des ‘data’. Le plus cocasse dans cet avantage stratégique, c’est que cela se fait aux frais des contribuables mauriciens.
Enter India. Pour quelle raison des Indiens ont-ils été amenés à visiter la landing station du câble SAFE à Baie-de-Jacotet ? Les Indiens y sont partis pour espionner quoi ? Au fait, les spécialistes disent que l’Inde dispose d’un service de renseignement hautement performant mais certainement pas au niveau de celui des Israéliens. Au lieu d’une intervention physique à la James Bond, ils sont capables d’espionner à distance comme le font d’ailleurs les Israéliens qui connaissent tout sur le train-train quotidien des généraux et des scientifiques iraniens.
D’autre part, si les Indiens cherchent à accéder au câble SAFE, ils peuvent bien le faire à loisir dans leur landing station à Cochin. Ce qui vient démontrer que si problème il y avait, c’était au point de connexion de Baie-de-Jacotet.
Plusieurs possibilités sont à considérer à partir de là. Il se peut qu’un malin ait déjà installé un petit truc, soit un équipement, soit un software, à Baie-de-Jacotet et que les Indiens l’avaient découvert et en avaient averti le grand boss à Maurice. Donc, décision fut prise de laisser les Indiens y renifler le truc. Vu le niveau de compétence technologique dans les institutions officielles de Maurice, vu encore le degré de corruption dans notre système, on a opté pour des scientifiques indiens.
L’autre possibilité serait que les Indiens sont partis installer un software d’espionnage à Baiede- Jacotet. Six heures pour le faire ? Mais encore une fois, en prenant en considération l’extrême compétence scientifique et technologique des Indiens – ce ne sont pas les Américains de NASA et de Silicon Valley qui diraient le contraire – cela aurait pu être effectué à distance en ‘tapant’ sur le système.
Donc, ce n’est pas de sitôt qu’on comprendrait toutes les complexités de cette affaire. Mais vu objectivement, tout laisse croire que Maurice serait pris en tenaille dans la rivalité qui oppose les deux futures hyperpuissances dominantes du monde et dont la stratégie d’épanouissement à l’échelle planétaire passe nécessairement par le contrôle de l’océan Indien. Et de Maurice, un pion-clé dans le jeu.
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