Publicité
Dans le Sherrygate, qui gagne et qui perd ?
Par
Partager cet article
Dans le Sherrygate, qui gagne et qui perd ?
En attendant le tsunami du knock-out qui ferait Pravind Kumar Jugnauth (PKJ) perdre le pouvoir, il serait toujours intéressant de savoir quel est le score jusqu’ici du Sherrygate. Qui gagne et qui perd ?
Très certainement, New Delhi assiste à un type d’India-bashing qui ramène Maurice aux années 1950. Sherry Singh a parlé d’un espion indien moustachu et voilà que tout le monde est tombé sur Kumaresan Ilango, actuellement National Security Adviser de PKJ, moustachu lui aussi. Ilango est présenté comme un pestiféré qui s’était ingéré dans les affaires internes du Sri Lanka en favorisant les adversaires de Gotabaya Rajapaksa. L’Inde soupçonnait le dirigeant sri-lankais d’avoir été noyauté par la Chine, son principal rival sur le plan géopolitique dans l’océan Indien.
Donc, pour ceux s’opposant à la présence d’Ilango sur le territoire mauricien, Rajapaksa est vu comme un héros qui a réalisé l’exploit d’avoir chassé l’espion indien. Mais étrangement, dans la campagne contre le gouvernement de PKJ, on érige Rajapaksa en vilain et on annonce que PKJ subira à Maurice le même sort que le dirigeant sri-lankais, c’est-à-dire poussé par la rue à s’enfuir à l’étranger.
Ilango ne serait pas le seul Indien ciblé. Dans les jours à venir, au fur et à mesure que des révélations seront faites sur l’affaire de Baie-Jacotet, d’autres Indiens seraient démasqués. C’est dire que l’Inde laisserait des plumes dans cette controverse de soupçons d’espionnage par reniflage (sniffing).
Sur le plan purement interne, on dénombre déjà des victimes du Sherrygate. À commencer par Nayen Kumar Ballah, chef de la fonction publique, cousin de Lady Sarojni Jugnauth et toujours chairman de la State Bank, mais no longer chairman de Mauritius Telecom (MT). Ce Ballah aura bien des explications à donner sur son engagement personnel dans le Sherrygate, avec possibilité de poursuites judiciaires. Autres victimes collatérales: Dev Manraj et Dheeren Dabee. Ces professionnels de haut calibre sortent amoindris après leur passage au board de MT.
Toujours sur le plan des explications, Girish Guddoy aura sans doute l’occasion de faire des révélations. Qui en seront les victimes ? Déjà, ceux qui ont monté le coup Guddoy le lendemain des révélations de Sherry Singh sur Radio Plus auraient fait preuve d’une incompétence totale en sous-estimant le degré de loyauté de ce technicien envers Sherry Singh. Ceux qui connaissent les réalités sociologiques dans le Nord du pays savent que les Gowreesunkur et les Guddoy constituent un clan très soudé et que Sherry Singh est lui-même marié à une fille de la famille. D’ailleurs, il aurait éliminé d’autres cadres pour assurer la progression de Guddoy.
Les grands gagnants jusqu’à l’heure dans l’affaire Sherrygate sont sans conteste la France et la Chine. Alors que les Indiens sont acculés, les Chinois voient progresser leurs deux gigantesques projets à Maurice, à savoir le dispositif de Safe City qui leur permettra de récolter Rs 19 milliards des contribuables mauriciens et le complexe de Jinfei au nord de Port-Louis.
Avec le nouveau board à MT, douce revanche aussi pour Neermal Saddul, un brillant ingénieur dont l’ascension à MT fut stoppée nette après les élections de 2005. Petit-fils du grand Basdeo Bissoondoyal, Neermal Saddul, bien que marié dans une éminente famille travailliste, a toujours bénéficié du goodwill des Jugnauth. Voilà qu’il revient au board même de MT. Sur la base de ses compétences professionnelles, on dit qu’il aurait certainement fait mieux que Philippe Epaminondas Gaston Maxime Sauzier. Ancien député du MSM et très proche des Jugnauth, un parfait gentleman, ce dernier devra prouver qu’il est un digne successeur de Ballah. Éventualité qui n’obtient pas la faveur de Jean Claude de l’Estrac qui voit en lui un autre Ballah.
Tout ce scandale ne pourrait pas ne pas plaire à France Telecom dont le rôle semblait avoir été réduit à celui d’agneau tout doux sous le règne de Sherry Singh. Si Maxime Sauzier se montre accommodant envers FT qui détient 40 % des actions de MT et contrôle les postes de Chief Operating Officer (COO) et Chief Financial Officer (CFO) dans cette compagnie qui brasse des milliards, on pourrait même assister à l’émergence d’une nouvelle tendance à Telecom Tower. Le départ du tout-puissant Sherry Singh et les difficultés que rencontre le gouvernement ne pourraient pas ne pas réjouir l’actionnaire minoritaire.
Publicité
Les plus récents