Publicité

Rester dans le jeu: Bodha … et les autres

27 août 2022, 08:34

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Pris à contre-pied par l’évolution de la situation dans l’Opposition, inquiet d’etre finalement court-circuité ou marginalisé, Nando Bodha fait ces jours-ci de la résistance: Il refuse de signer l’acte de décès de L’Entente de l’Espoir, malgré l’accord de principe intervenu à Riverwalk entre PTr, MMM et PMSD. Placant la barre très haut, il souhaite, au contraire, pouvoir convaincre qu’il est encore possible de faire de L’Espoir ‘la locomotive de toute éventuelle alliance de l’Oppostion’. Ce n’est pas là un mince pari !

Le dilemme Bodha est très réel. Jugé ‘Prime minister material’ au début de 2021 quand il quittait le gouvernement MSM, encouragé à se rapprocher d’un MMM qui lui ouvrait les bras mais préférant audacieusement former son propre parti, Nando Bodha voit ces jours-ci sa position objectivement affaiblie et ses options s’amenuisant progressivement.

Très à l’aise dans L’Entente de L’Espoir, dont il fut l’un des principaux promoteurs, le leader du Renouveau Mauricien sent aujourd’hui le terrain lui glisser sous les pieds. Paul Bérenger et Xavier-Luc Duval sont tentés d’aller voir ailleurs, du coté du PTr. Nando Bodha  n’a recu aucune invitation à se joindre à la rencontre au sommet de Riverwalk chez Navin Ramgoolam mais Bérenger et Duval n’ont pas eu d’état d’ame à y aller sans lui. C’est, pour Nando Bodha, un mauvais présage.

Bodha a, aujourd’hui, quatre soucis à se faire:

1. De toute évidence, le courant passe mal entre lui et Navin Ramgoolam. Ayant fait publiquement savoir qu’il n’est guère enthousiasmé par le retour  au premier plan du Leader Travailliste et qu’il n’entend nullement ‘servir les intérets et ambitions’ de ce dernier, il s’est fait rabrouer sans plus de manières par Navin Ramgoolam, qui laisse publiquement savoir qu’il n’a ‘pas vraiment besoin’ de Bodha dans la nouvelle configuration politique qu’il souhaite mettre en place. Bien mieux disposé envers Arvin Boolell (qu’il juge pouvoir etre un homme-pont entre toutes les oppositions], Nando Bodha est forcé de constater avec dépit que Boolell ne fait pas vraiment le poids au PTr face à Ramgoolam. Bodha a joué le mauvais cheval. Ramgoolam entend le lui faire payer !

2. Face à Paul Bérenger qui a toujours plusieurs fers au feu, Bodha peut cette fois craindre d’etre ‘lâché’ un jour ou l’autre.  Paul Bérenger a beaucoup d’amitié pour Nando Bodha, qu’il estime etre un gentleman et un homme de qualité, mais il fera toujours en priorité ce qu’il estime etre le mieux pour son parti. Pour Paul Bérenger, la politique n’est et n’a toujours été qu’un rapport de forces changeant et il mettra toutes les chances de son coté. S’il a toujours encouragé Bodha à ‘faire les bons choix’, sa patience envers son ami pourrait bien peu à peu  s’épuiser.

3. Concernant le PMSD, Nando Bodha sait parfaitement que le parti des Duval sera toujours là où seront le PTr et Navin Ramgoolam.

4. Enfin, son autre partenaire dans L’Entente de L’Espoir, Roshi Bhadain, s’en éloigne peu à peu. Son parti, le Reform Party, le presse d’aller cranement seul et a massivement voté une motion dans ce sens. Meme s’il tente de laisser la porte entr’ouverte à une réconciliation avec L’Entente , Bhadain va finir par se retrouver dans la position de Lord Melbourne:’ I am their leader. I must therefore follow them !’

La crainte justifiée de Nando Bodha est qu’il se retrouve, en fin de compte, ‘dans la plaine’, laché par Bérenger et Duval, snobé par Ramgoolam, présenté comme un ‘traitre’ par le MSM, abandonné par Roshi Bhadain et contraint d’aller seul au massacre. Ou de finir avec les petits partis à influence limitée. La perspective n’est guère réjouissante !

Toutefois, on n’en est pas encore là. Heureusement pour Bodha, Paul Bérenger ne souhaite pas encore formellement proclamer la fin de ‘L’Espoir’ – du moins pour le moment. Le Leader du MMM a précisé Samedi que, ‘pour l’heure, l’Entente est still on’. Une réunion des leaders est prévue ce mercredi et un premier congrès conjoint fixé au 3 Septembre. Paul Bérenger insistait samedi que  ‘rien n’est joué pour 2024’ et qu’il est ‘trop tot pour décider qui sera présenté comme Premier ministre’ aux prochaines élections, faisant retomber la pression.

Ce début de ‘backpedalling’ du leader MMM par rapport à l’accord de Riverwalk, constaté Samedi, ne peut signifier que l’une de deux choses:

1. Soit c’est là une nouvelle manifestation de l’inclinaison naturelle de Paul Bérenger à se réserver toujours une ‘fall back position’et à etre perpétuellement ‘between two minds’. Bérenger n’a jamais compris que ‘choisir, c’est renoncer! ’

2. Soit la proposition nouvelle de Nando Bodha de négocier avec Ramgoolam de bloc à bloc (Espoir uni face au PTr) au lieu de parti à parti commence à séduire le leader MMM. A bien y songer, la proposition de Bodha est audacieuse mais aussi astucieuse. Dispersés, les interlocuteurs de Navin Ramgoolam pèsent moins lourd dans la balance d’un PTr qui veut clairement être, dans son projet d’alliance, le soleil autour duquel gravitent tous les autres partis. Forcé de négocier avec une Entente de L’Espoir plus unie et exigeante, le PTr serait peut-etre plus accomodant et moins arrogant, lui qui clame partout pouvoir ‘aller seul’ aux élections si nécessaire.

Paul Bérenger pourrait bien aimer cette approche et donc vouloir garder ‘L’Espoir’ vivant, en y attirant meme d’autres partis autour de lui, dans un Front Commun qui, ensuite, négocierait, le moment venu, avec le PTr pour 2024 ou les Municipales.

Il n’est, en effet, un secret pour personne que Bérenger n’aprécie guère la manière vexante  dont le Parti Travailliste à travers Patrick Assirvaden et autres Eshan Jomun tape bruyamment son tambour, proclamant partout qu’il peut éventuellement se passer de tout le monde, celà alors meme qu’ils négocient. Par ailleurs, un Espoir élargi et plus représentatif  pourrait aider à contrer l’offensive MSM en régions rurales à l’effet que Ramgoolam deviendrait l’otage des minorités dans tout pacte électoral et n’aurait comme alliés extérieurs que des éléments de la Population Générale (Bérenger et Duval).

Qui sait ce que pense vraiment le leader du MMM, devenu aussi mystérieux que Ramgoolam?

Le Congrès du PTr Dimanche prochain devrait pourtant permettre d’en savoir davantage sur l’orientation que Navin Ramgoolam souhaite donner au PTr, face à ses adversaires comme à ses partenaires. Ses précisions seront plus que bienvenues.

L’heure est, en effet, plus que jamais à la clarté : Le PTr est-il pret à accueillir d’autres alliés, hormis le MMM et le PMSD ?  Voudra-t-il demain négocier avec un bloc Entente de L’Espoir élargi ? Jouera-t-il vis à vis du MMM le jeu de la transparence ou continuera-t-il à traiter ce parti comme une maitresse que l’on tente plus ou moins de cacher, dans la peur permanente du Qu’en-dira-t-on rural ? En 2014, les deux alliés se sont mutuellement fait du tort par de grosses maladresses. Mais en 1995, les memes campagnes communales n’ont pas empeché un accord PTr-MMM conclu en pleine lumière de gagner. Navin Ramgoolam est-il aujourd’hui tétanisé par la peur de perdre à nouveau ?

Tout le monde s’est désormais largement défini. Navin Ramgoolam reste le seul à ne pas avoir abattu ses cartes. De ce fait,il tient littéralement toute l’Opposition en otage. Chacun attendra donc Dimanche un grand discours définissant une vraie vision de l’avenir et ceux qui éventuellement y travailleraient.