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Quel plan d’avenir ?
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Quel plan d’avenir ?
À vrai dire, cela commence à être plutôt lassant (par moments même, désespérant) de répéter les mêmes constats depuis des mois déjà sans que l’on ne voie des changements de politique ou de comportements qui donneraient des raisons d’espérer.
Parmi les rares nouvelles positives récentes pour le pays, citons tout de même le tourisme où le pari d’un million de touristes pour 2022 sera, semble-t-il, atteint. Malgré les sceptiques (dont je faisais partie encore en août (*)), il semblerait que la rareté de main-d’œuvre, la crainte d’un manque de sièges d’avion et le nombre de lits limité dans les catégories hôtelières les plus huppées – c’est-à-dire celles qui sont favorisées par ceux qui ont encore les moyens de voyager malgré l’inflation généralisée – ont été surmontés d’une manière ou d’une autre. Nous en étions donc à 755 000 touristes réceptionnés à fin octobre et les milieux hôteliers, faisant confiance à leurs réservations, sont maintenant presque certains d’aligner les 245 000 touristes qui manquent pour atteindre le million recherché cette année. Atteindre cet objectif sera d’évidence éminemment positif ! Si les autorités font ce qu’il faut pour atteindre le prochain objectif de 1,4 million de touristes pour 2022-23, nous serons encore mieux lotis, puisque les dépenses moyennes des touristes, à Rs 62 400 pour le trimestre à septembre 2022 progressent, en parallèle, de 37 % par rapport à la moyenne de 2019, soit bien plus que ce que promettait seule l’érosion de la valeur de la roupie. Un bémol toutefois est que la durée des séjours tend, depuis peu, à se tasser à la baisse…
Le ministre de l’Industrie a aussi tenté de faire grand cas de la reprise vigoureuse des exportations, mais si Rs 100 milliards de recettes (FOB) sont effectivement atteintes en 2022 et si ce chiffre serait alors le plus fort jamais atteint en roupies nominales, il faut malheureusement souligner que notre appétit pour les importations a encore crevé des plafonds cette année et qu’elles atteindront probablement le chiffre fabuleux de… Rs 290 milliards ! Plus grave encore est le fait que le taux de couverture de ces importations baisse d’année en année, passant de 55,5 % en 2015 à seulement 34,5 % en 2022, ce qui est infernal dans la durée, puisque malgré l’apport des recettes touristiques, la balance des comptes courants continue à se creuser, atteignant le niveau absolument insupportable de -14,4 % du PIB cette année ! Pourquoi qualifier ce chiffre d’insupportable ? Mais parce que même avec les recettes du tourisme rétablies l’an prochain au niveau maximal de 2019, le déficit commercial est maintenant tel que la balance des comptes courants est prévue à environ -10/11 % pour 2023, ce qui forcera le pays à emprunter encore plus ou à puiser encore dans ses réserves !
On n’est décidemment pas sorti de l’auberge !
Et quand ceux qui nous gouvernent ne nous expliquent pas comment on va sortir de cette situation plutôt inquiétante, on a des raisons de plus de transpirer pour notre futur ! Car, pour retrouver nos équilibres extérieurs essentiels, il nous faut soit réduire nos importations, soit augmenter nos exportations et nos recettes touristiques, à moins que l’on ait découvert, non pas des réserves de pétrole, mais des réserves de dollars dans les eaux territoriales du ministre de l’Économie bleue, qui nous promet tant depuis si longtemps…
Or, au niveau des importations, si l’on pouvait, un temps, espérer que les achats faits à l’extérieur du pays pour compléter le métro de Port-Louis à Curepipe (Rs 20 milliards ? Plus ?) allaient éventuellement se terminer, on y a depuis rajouté les 3,4 kilomètres de la ligne reliant Rose-Hill à Réduit (Rs 4,6 milliards) et l’extension vers Côte d’Or, 10,5 kilomètres plus loin, pour encore Rs 14,6 milliards de plus. Il n’est pas clair si ce serait enfin la fin de ces investissements ou si d’autres bras ‘stratégiques’ viendront s’y rajouter, ni si le matériel roulant y est inclus, ni si le gouvernement a déjà provisionné pour la subvention opérationnelle nécessaire pour couvrir les pertes éventuelles du métro et les dégâts causés au cash-flow des compagnies opérant des bus, ni encore si la rumeur qu’Air Mauritius veut à nouveau acheter des avions, ayant récemment vendu quelques-uns, est fondée ou pas. Car la transparence, ça ne fait pas partie des valeurs fortes de ce régime… Mais alors, pas du tout !
Si la migration vers de l’énergie renouvelable à 60 % de nos besoins jusqu’en 2030 (Paragraphe 182 du Budget 2022-23) ne semble pas avoir fait beaucoup de chemin jusqu’ici, il faut quand même espérer que notre facture de pétrole (17 % de nos importations de 2021) baisse quelque peu, notamment avec la perspective de la récession qui s’annonce en 2023. Par contre, la production alimentaire locale à un niveau qui réduirait la note d’importation de manière significative ne paraît pas se concrétiser malgré les incitations budgétaires, notamment parce que les items les plus importants (produits laitiers, viande, riz, céréales, fruits, etc.) sont difficiles à produire économiquement au pays. Et clairement, si le nombre de touristes augmente, il faudra s’attendre à un impact d’un certain niveau aux importations !
Pour nos exportations de produits manufacturés, si elles sont en ‘hausse’, il faut d’abord reconnaître que la hausse n’est pas de nature volumétrique mais qu’elle est, avant tout, de nature financière et due à la dévaluation de la roupie. Il ne faut certes pas cracher là-dessus, cette dévaluation ayant sans doute aidé, avec, en parallèle, une bonne amélioration de la productivité de la main-d’œuvre, à sauver de l’activité et des emplois. Cependant, les espoirs attendus de l’Intelligence Artificielle, de la blockchain, de la pharmacologie, du Big Data, etc., tous articulés autour de Côte d’Or, ne sont pas encore, à ce stade et à quelques exceptions près, descendus… du petit nuage des rêves.
Le tourisme a ses contraintes propres et ce secteur ne pourra à lui seul tout colmater, tout cautériser dans les années à venir. Admettant pour peu que nous retrouvions 1,4 million de touristes en 2023, nous aurons amélioré les recettes de devises du secteur d’encore 40 %, soit par environ Rs 25 milliards. Or, le trou au niveau de la balance des comptes courants qui est de 14,4 % du PIB équivaut à plus de… Rs 70 milliards ! À plus long terme, le défi du tourisme va aussi devoir se conjuguer avec au moins trois évidences compliquées : il n’y a plus de place sur le littoral pour de nouveaux développements de type balnéaire – ce qui reste quand même notre attrait majeur –, la montée des eaux à mesure que la planète se réchauffe va continuer à éroder les plages et la main-d’œuvre va exiger d’être mieux payée au risque d’aller offrir ses services et sa bonne formation… ailleurs et aux autres, y compris aux concurrents.
Ce qui affectera, à terme, les bilans du secteur hôtelier et donc le bilan de la MIC (Rs 12,6 milliards investies dans l’hôtellerie et Rs 25,25 milliards investies dans la nébuleuse «others») et donc éventuellement celui de la Banque centrale… qui affiche déjà, nominalement, des fonds propres négatifs (voir Figure 1). Cette situation est au mieux incommodante, même si elle n’est clairement pas interdite pour une banque centrale qui a de larges pouvoirs, y compris celui de ‘création’ d’argent si cela lui chante et s’il peut vivre avec les conséquences qui en découlent ! Voir, à cet effet, le cas de la Banque centrale tchèque dont les fonds propres ont été négatifs pour la majorité des vingt dernières années (*) !
(*) https://www.ft.com/content/ddc5d867-59fe-4c9b-a588-4066304318b6
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