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La guerre des patronymes
Le descendant de la dynastie Nehru- Gandhi a été condamné, jeudi, par un tribunal local de la ville de Surat, au Gujarat (dont l’annuaire téléphonique regorge de… Modi), à deux ans de prison. La justice l’a trouvé coupable d’avoir proféré des propos diffamatoires contre les Modi, patronyme du Premier ministre indien.
«Pourquoi tous les voleurs portent le nom de Modi ? Nirav Modi, Lalit Modi, Narendra Modi», s’était exclamé Rahul Gandhi, le leader du parti d’opposition du Congrès, le 13 avril 2019, rappelle la presse indienne. Qui en rajoute une couche pour contextualiser : «Nirav Modi est un magnat du diamant qui est en fuite, Lalit Modi est un ancien dirigeant sportif banni à vie par le conseil de cricket de la Grande péninsule. Narendra Modi est, lui, au pouvoir depuis 2014» – tout comme le patronyme Jugnauth. La plainte contre Rahul Gandhi a été logée par… Purnesh Modi (qui ne serait pas apparenté à Narendra Modi)…
Rahul Gandhi, 52 ans, qui est l’arrièrepetit- fils de Jawaharlal Nehru – qui a donné trois Premiers ministres à la Grande péninsule, a commenté le verdict (duquel il fera appel) en un simple tweet : «Ma religion se fonde sur la vérité et la non-violence. La vérité est mon Dieu. La non-violence est le moyen de la réaliser…» Le Congrès a été interdit de manifester contre l’inflation et le chômage et subit les actes d’intimidation des agences gouvernementales d’investigation. Toute ressemblance avec Maurice serait purement une… coïncidence !
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A Maurice, quand l’on parle de tickets, on remanie ceux d’en bas, mais à la tête du système politique, c’est toujours les mêmes patronymes qui tournent et qui tirent les ficelles. Si la méritocratie n’est pas programmée dans nos gènes, cependant elle s’infirme ou se confirme dans l’action, dans la durée, dans la transmission des valeurs. Qu’on doit placer dans le contexte de la brève histoire des dynasties politiques du pays. Et qu’on discerne entre les deux ou trois dynasties que nous connaissons : Ramgoolam, Duval, Jugnauth et Bérenger.
Face à la realpolitik mauricienne, les guéguerres de pouvoir pour contrôler telle ou telle frange de l’électorat, ou tel ou tel arrondissement d’une circonscription ne sont en fait que des divertissements de pacotille. Les affrontements médiatisés sont des jeux de façade. Ce sont des seconds couteaux, des gens, certes, passionnés par la politique mais qui l’exercent à un niveau bien inférieur à celui pratiqué par les détenteurs des patronymes en or.
Qualitativement et quantitativement, les dynasties politiques mauriciennes sont dissemblables. Chez la famille Jugnauth (en incluant la belle-famille de Pravind et en excluant l’oncle Ashock), la dynastie vise à asseoir son pouvoir et tout l’argent que ce pouvoir rapporte. C’est une succession voulue, encouragée, imposée.
Chez les Ramgoolam, c’est autre chose. SSR ne voulait pas que son fils fasse de la politique. L’histoire nous dit que c’est Paul Bérenger qui l’a encouragé à délaisser les brumes londoniennes pour contrer l’empereur soleil. En l’absence de successeurs naturels, on ne peut en revanche accuser Navin Ramgoolam de vouloir, comme SAJ, bâtir une dynastie.
Paul Bérenger, lui, n’a pas de père politicien. D’ailleurs, c’est sir Gaëtan Duval qui déclare, en 1995, que «mon héritier politique c’est Paul Bérenger», surprenant ce dernier et tous les militants ! Mais par contre Bérenger ne surprend pas grand monde quand il a offert un ticket à sa fille, et deux autres à ses proches par alliance. Comme dans le cas des Jugnauth, ce n’est pas nécessairement la méritocratie qui provoquerait ce choix patronymique, mais cela pourrait être des intérêts politiques, et surtout le plaisir d’influencer et d’orienter. Quelqu’un qui connaît bien le leader du MMM explique ceci : «Bérenger est plus compatible à l’image du politicien européen ou américain qui tout en acceptant tous les bénéfices que sa position lui conférera, n’ira pas jusqu’à mettre ouvertement la main dans le coffre, ce qui jaillirait sur l’image ‘propre’ dont il essaie tant bien que mal de faire usage dans sa vie politique, contrastant avec celles des autres qui sont ouvertement achetables.»
Il est évident qu’outre l’héritage politique, les fils ou filles des propriétaires des partis politiques (aur)ont à gérer de gros sous, des caisses occultes. Ces sous dont on ne voit qu’une partie de l’iceberg dans quelques rares rapports financiers, mais qui restent quand même largement cachés, en l’absence d’une loi sur le financement des partis politiques. Ce financement politique qui demeure un indicateur incontournable de la bonne gouvernance et dont la législation possible reste aux mains de ceux que cela gênerait le plus. Pas surprenant donc que ni Ramgoolam, ni Jugnauth, ni Bérenger n’ont pris d’initiative à ce propos. L’affaire des coffres-forts va-telle changer la donne ?
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