La stratégie du silence pour ne pas répondre sur les allégations de pot-de-vin impliquant un ministre et un PPS plonge le pays dans une ambiance malsaine ! Si le MSM a tenté de gagner du temps en privant les membres de l’opposition de leur droit des questions parlementaires la semaine dernière – la séance ayant été consacrée aux débats autour de plusieurs projets de loi –, le mutisme observé par le tandem mis en cause et toute l’équipe du MSM, dont le silence semble complice, ne fait qu’augmenter les suspicions sur des accusations graves.

Même si Gobin a finalement choisi la plateforme sécurisante de la MBC pour parler de «spéculations» et brandir des menaces de se saisir de la justice contre les articles de presse ; même si, comme on pouvait s’y attendre, il montre l’armure de la clause de confidentialité de l’ICAC – avec toute la perception de voie de garage que cela entraîne aux yeux de l’opinion publique –, ces allégations sont suffisamment sérieuses pour que le public ait droit à une version des faits de ceux pointés du doigt.

Car il ne s’agit pas ici de n’importe quel citoyen lambda mais de deux personnalités (ainsi que d’un nominé politique) qui occupent des postes publics dont les salaires sont payés par les contribuables ! D’où l’interrogation légitime du droit de savoir ce qui s’est passé dans cette affaire qui jette une nouvelle fois de la boue sur un MSM déjà bien englué dans une succession de scandales.

Le choix de Maneesh Gobin – cité dans l’histoire – d’avoir recours à la MBC n’apporte toutefois aucun nouvel éclairage ! Quand l’on sait que d’habitude, il est prompt à organiser des conférences de presse ! Que ce soit pour attaquer férocement l’opposition ou pour défendre l’équipe gouvernementale, Gobin s’en va toujours en guerre ! Son empressement, il y a quelque temps, à convoquer les médias pour défendre l’honneur de son leader en demandant qu’il n’y ait pas «d’amalgame dangereux» à cause d’une photo du Premier ministre et d’un suspect, prête-nom dans l’affaire Franklin, avait toutefois démontré ses limites !

Ce jour-là, débarquant seul au front et visiblement impréparé face au feu roulant de questions des journalistes qui voulaient savoir pourquoi les autorités mauriciennes n’avaient pas collaboré avec La Réunion, Gobin, n’ayant pas de réponse, avait quitté nerveusement la rencontre qu’il avait lui-même initiée ! Tout en laissant les interrogations du public derrière lui, dans une affaire aussi sérieuse que le trafic de drogue !

Aujourd’hui, l’Attorney General, devenu, du coup, peu loquace, ne semble pas intéressé à défendre sa propre personne, ayant choisi de ne pas répondre directement sur ces accusations où son nom est jeté en pâture ! Pourtant, les questions sont simples : est-ce que ces allégations qui remplissent les colonnes des journaux avec, au centre, le versement de pot-de-vin (ayant même bénéficié de facilités de paiements [!]), sont fondées ? Est-il vrai que le ministre a participé, au fameux ranch, à une soirée privée bien arrosée, alors même que son ministère était en négociation d’un renouvellement de bail ? Si toute cette affaire n’est qu’un tissu d’invention et de spéculations, quelles seraient les motivations des dénonciateurs qui ne se privent pas de moult détails à l’ICAC ? Et, finalement, pour quelles raisons est-ce que ces élus du gouvernement ainsi que le nominé politique mis à l’index, ne se sont pas défendus jusqu’ici pour dissiper les doutes, tout en rassurant les citoyens ?

Gobin, tout comme ses camarades payés des fonds publics, doivent, telle la femme de César, être non seulement insoupçonnables mais ont aussi l’obligation d’être sans reproches ! Or, ici, le manque de transparence, le refus de rendre des comptes dans toute cette révoltante affaire Franklin, véritable boîte de Pandore, le recours à la tactique de l’esquive pour empêcher les membres de l’opposition d’exercer leur droit de porte-voix du peuple au Parlement – avec la complicité d’un Speaker dont la petitesse est sa marque de fabrique – ont l’effet inverse et donnent lieu à toutes sortes d’interprétations !

La stratégie du silence nous plonge dans une ambiance malsaine !