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À force de crier au loup...

24 avril 2023, 09:03

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En fin de semaine, ceux qui se passionnent pour la chose politique se demandaient 1) pourquoi est-il si difficile pour un Premier ministre de demander à son Attorney General de «step aside» le temps que les enquêtes sur la terrible affaire Franklin (qui comprend plusieurs volets : commission rogatoire, trafic de drogue, blanchiment d’argent, corruption et baux pour les terrains de l’État contre paiement allégué sous la table) soient bouclées; 2) pourquoi trois partis qui veulent gérer ou «redresser» le pays n’arrivent pas à se mettre d’accord pour tenir un meeting ensemble ? 

Les réponses se trouvent dans la complexité du jeu politique, où les ego des uns et les lobbies des autres se heurtent en permanence, dans un fracas indescriptible, imcompréhensible. 

Tentons d’y voir plus clair, en focalisant sur quelques éléments du puzzle. 

Les élections qui permettent de rebattre les pièces demeurent surtout une affaire de chiffres, personnes, consciences, circonstances, hasards et familles. Le système n’arrive pas à changer. 

Aux dernières législatives, on recensait 941 719 électeurs. Un nombre record qui devrait remettre en juste perspective la densité et la diversité des foules des meetings que chaque bloc se dispute à l’approche du scrutin. Les foules que l’on déplace dans des autobus loués se veulent une démonstration de force – ou de faiblesse. Ceux qui se rendent aux meetings sont des agents ou des gens qui n’ont rien d’autre à faire, ou qui aiment manger un briani gratuitement. Il y a une poignée d’observateurs aussi, mais ils sont insignifiants et se déplacent par leurs propres moyens. 

Si on regarde de près les listes des candidats, en termes de nombre, les femmes demeurent, comme à l’accoutumée, à la traîne, en revanche, les mêmes patronymes, fringants et souriants, continuent d’occuper les devants de la scène et sont mêmes annoncés comme des «top of the list». 

En 1982, Anerood Jugnauth, alors fringant quinquagénaire, et Paul Bérenger, quadragénaire à la moustache noire, jadis champions de la lutte des classes – et non des races – jouaient aux révolutionnaires pour chasser d u pouvoir l’octogénaire sir Seewoosagur Ramgoolam (alors âgé de 82 ans). Aujourd’hui, le fils de sir Anerood doit se battre contre celui de SSR, aidé de celui de SGD, et de Paul et Joanna Bérenger pour conserver le poste de Premier ministre. Et nous, docilement, nous irons voter, en plaignant notre sort. Et d’autres iront grossir les rangs des abstentionnistes.

*** 

Àvoir le ton de la campagne qui n’a pas encore vraiment commencé, l’argument ethnique, l’accumulation de coups bas, la bassesse des arguments, l’élection à venir alimente déjà une volonté de revanche. Elle va encore laisser, dans les rapports personnels entre les chefs de parti, des cicatrices qui pourraient rester ouvertes. 

Sur le plan économique, la spirale de promesses ajoutera plusieurs dizaines de milliards au Budget déficitaire. Mais n’oublions pas un principe cartésien qu’on doit défendre : quel que soit le gouvernement, l’État doit continuer à tourner, les ministères doivent fonctionner. Cependant, quand les fonctionnaires voient les dirigeants politiques profiter à outrance de l’appareil d’État, peut-on les blâmer s’ils baissent la garde, malgré les avertissements saisonniers du Directeur de l’Audit ? A force de crier au loup, plus personne ne vient en aide au crieur...sauf la presse et ceux qui y contribuent, au nom d’une démocratie qui existait jadis...