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Guerre de lobbies autour de Roches-Noires
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Guerre de lobbies autour de Roches-Noires
Presque tous les ambassadeurs et hauts-commissaires étrangers qui ont servi à Maurice concèdent à la fin de leur mandant chez nous qu’ils n’ont toujours pas réussi à maîtriser toutes les complexités de la société mauricienne.
Les diplomates en poste à Maurice ont été sans doute intrigués par un exercice de relations publiques conduit le lundi 24 avril dans le village de Roches-Noires par une firme appartenant à deux ressortissants français qui cherchent à monter une véritable Smart City sur des terrains marécageux qui, selon des écologistes, serviraient d’habitat à des oiseaux et d’autres espèces.
Premier constat lors de cette rencontre de Roches-Noires: il semblait que ceux se trouvant à l’avant-plan et qui ont été les plus bruyants soient des «outsiders». Au fait, la région concernée abrite trois composantes différentes de la société mauricienne. Sur la côte, c’est une classe nantie existant depuis trois siècles. Puis des Mauriciens au bas de l’échelle vivant principalement mais difficilement de la mer. Enfin, des Mauriciens descendants de travailleurs agricoles et de petits planteurs.
Parmi ceux qui protestaient contre le projet des deux Français, on en décelait trois types de motivation. Il y avait tout d’abord des Mauriciens vraiment et sincèrement engagés dans la cause écologique. Pour eux, quelles que soient les mesures qu’on prendrait pour protéger l’environnement, les dégâts à l’écosystème seraient conséquents et irréversibles. Ils s’opposent farouchement à la bétonisation de la région, demandant aux Français d’aller monter leur Smart City plutôt à Côte-d’Or. Ensuite, on pouvait voir en action des vested interests qui voient leur propre business menacé par les deux Français.
Enfin, parmi ceux qui protestent contre l’implantation de ces deux étrangers dans cette partie de Maurice, on dénombre aussi ceux qui ont mené une vie hautement privilégiée, derrière une barrière géographique. A la longue, avec les activités dégagées par le nouveau business des Français, il y a la crainte que leur style de vie élitiste presque en vase clos, pourrait être compromis.
Une analyse des différentes tendances autour du projet de Roches-Noires permettrait de constater que les habitants se retrouvant dans les classes nullement privilégiées seraient favorables au projet de Smart City vu les bénéfices qu’ils pourraient théoriquement en tirer. Toutefois, on a constaté que des projets grandioses similaires n’ont pas créé des avantages réels pour les habitants du voisinage. Des gens venus d’ailleurs en ont profité.
Les promoteurs français du projet de Roches-Noires qui affirment vouloir investir Rs 41 milliards éventuellement pourraient bien témoigner de leur engagement envers les villageois en recrutant en priorité des jeunes de la région. Ils pourraient faire mieux en octroyant chaque année un certain nombre de bourses universitaires dans des institutions de renom à l’étranger à des jeunes du village ayant réussi aux examens de HSC.
Pour des jeunes moins performants aux examens, un plan de discrimination positive en leur faveur pourrait être engagé comme on le fait aux Etats-Unis et en Afrique du Sud et cela avant même que le mouvement Black Lives Matter ne prenne de l’ampleur.
Toutes les études devraient «empower» ces jeunes pour qu’ils occupent accessoirement des postes importants dans la gestion humaine et technologique de la Smart City à venir. Avec de tels investissements dans les ressources humaines, les entrepreneurs français aideraient dans une grande mesure à l’épanouissement de toute la région de Roches-Noires qui fait figure de parent pauvre auprès du mythique village de Rivière-du-Rempart.
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