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Brève histoire de nos dynasties politiques

7 juin 2013, 18:28

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Brève histoire de nos dynasties politiques

Certes, on remanie ceux d’en bas, mais à la tête du système politique mauricien c’est toujours les mêmes patronymes qui tournent et qui tirent les ficelles. Si la méritocratie n’est pas programmée dans nos gènes, cependant elle s’infirme ou se confirme dans l’action, dans la durée, dans la transmission des valeurs. A l’heure où l’on parle du néophyte (en politique) Emmanuel Bérenger, il importe que l’on place cette éventualité dans le contexte de la brève histoire des dynasties politiques du pays. Et qu’on discerne entre les deux ou trois dynasties que nous connaissons : Ramgoolam, Jugnauth, et maintenant peut-être, nous dit-on à demi-mot, Bérenger. A un degré moindre, nous avons les Duval. 

 

Ainsi face à la realpolitik mauricienne, les guéguerres de pouvoir pour contrôler telle ou telle frange de l’électorat, ou tel ou tel arrondissement d’une circonscription ne sont en fait que des divertissements de pacotille. Les affrontements médiatisés entre Abdullah Hossen et Reza Issack, entre Lysie Ribot et Deven Nagalingum ou encore entre Michael Sik Yuen et Richard Duval sont des jeux de façade. Ce sont des seconds couteaux, des gens certes passionnés par la politique mais qui l’exercent à un niveau bien inférieur à celui pratiqué par les Ramgoolam, Jugnauth et Bérenger. 

 

Qualitativement et quantitativement, les dynasties politiques mauriciennes sont dissemblables. Chez la famille Jugnauth (en incluant la belle-famille de Pravind et en excluant l’oncle Ashock), la dynastie vise à asseoir son pouvoir et tout l’argent que ce pouvoir rapporte. C’est une succession voulue, encouragée, imposée.

 

Chez les Ramgoolam, c’est autre chose. SSR ne voulait pas que son fils fasse de la politique. L’histoire nous dit que c’est Paul Bérenger qui l’a encouragé à délaisser les brumes londoniennes pour contrer l’empereur soleil. En l’absence de successeurs naturels, on ne peut en revanche accuser Navin Ramgoolam de vouloir, comme SAJ, bâtir une dynastie.  

 

Paul Bérenger, lui, n’a pas de père politicien. D’ailleurs, c’est sir Gaëtan Duval qui déclare, en 1995, que «mon héritier politique c’est Paul Bérenger», surprenant ce dernier et tous les militants ! Mais par contre Bérenger ne surprend pas grand-monde quand il laisse planer le doute sur l’entrée en scène de son fils. Comme dans le cas des Jugnauth, ce n’est pas nécessairement la méritocratie qui provoquerait ce choix biologique, mais cela pourrait être des intérêts politiques, et surtout le plaisir d’influencer et d’orienter. Quelqu’un qui connaît bien le leader du MMM explique ceci : «Bérenger est plus compatible à l’image du politicien européen ou américain qui tout en acceptant tous les bénéfices que sa position lui conférera, n’ira pas jusqu’à mettre ouvertement la main dans le coffre, ce qui jaillirait sur l’image ‘propre’ dont il essaie tant bien que mal de faire usage dans sa vie politique, contrastant avec que celles des autres qui sont ouvertement achetables.»

 

C’est évident qu’outre l’héritage politique, les fils des propriétaires des partis politiques (aur)ont à gérer de gros sous, des caisses occultes. Ces sous dont on ne voit qu’une partie de l’iceberg dans quelques rares rapports financiers, mais qui restent quand même largement cachés, en l’absence d’une loi sur le financement des partis politiques. Ce financement politique qui demeure un indicateur incontournable de la bonne gouvernance et dont la législation possible reste aux mains de ceux que cela gênerait le plus. Pas surprenant donc que ni Ramgoolam, ni Jugnauth, ni Bérenger n’ont pris d’initiative à ce propos. 

 

Et si l’engagement d’Emmanuel n’était pas une question d’homme, mais une question de gros sous ?