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Honneur et responsabilité
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Honneur et responsabilité

Les accusations de « médiocrité » et « d’irresponsabilité » que subit la presse ont eu une telle résonance sur les estrades publiques que nous n’allons pas bouder le plaisir d’accueillir les accolades. À plus forte raison lorsqu’elles viennent d’un public autrement plus averti sur la question de la qualité du traitement journalistique que nos politiques. Un jury de journalistes internationaux a honoré, samedi dernier, le rédacteur en chef de l’express dimanche au CNN MultiChoice African Journalist Awards, d’une prestigieuse récompense. Il a parlé de l’article primé, intitulé « Le vrai pouvoir des castes », comme d’un « autre chef-d’oeuvre du journalisme d’investigation à Maurice », deux ans après qu’un autre journaliste mauricien, notre confrère Rajen Bablee, se soit distingué. Au-delà de la réjouissance qu’inspire la reconnaissance d’un travail bien fait, ce prix est une occasion de réflexion.
Pour la profession d’abord. Oui, elle est responsable, cette presse. Face à ce sujet sensible des castes, amené dans l’actualité par l’irresponsabilité d’un ministre qui a déclaré que le Premier ministre est celui « des vaishs d’abord » parce qu’élu par la caste majoritaire des vaishs, la presse aurait pu réagir de diverses façons : jouer à l’autruche, par peur, ou allumer une polémique sans pouvoir contrôler les réactions qu’elle aurait pu susciter. L’express dimanche a osé et usé d’un ton juste. C’est ce que dit ce prix.
Sans renier l’engagement pris de donner au citoyen les clés pour comprendre la société dans laquelle il vit, le journaliste a, avec de l’audace, beaucoup de documentation, une rédaction clinique et dépassionnée, de la retenue, et sans porter aucun jugement, décrypté un sujet délicat. De telles réussites montrent de quel journalisme nous sommes capables, de quel potentiel nous disposons. Lorsque les critiques sur la presse sont parfois justifiées, il est utile, pour s’améliorer, de tendre vers des exemples de bonne conduite.
Une occasion de réfl exion pour le citoyen aussi. Avant d’être primé, cet article a été très largement salué par des lecteurs de l’express dimanche. Un accueil qui dépassait nos attentes. N’est-ce pas le signe que la nation est prête et assez mature pour parler sans passion des questions qui dérangent ? Elle étouffe sous cette omerta bien mauricienne sur les questions de communauté, ce silence qui, sous le prétexte de la « stabilité sociale », tolère des dysfonctionnements. La nation sait, en outre, qu’il faut parler de certaines réalités qui empêchent le « good governance » en pesant sur les choix politiques et économiques. Parce que dans un environnement où les lendemains se révèlent de plus en plus fragiles, on ne peut pas tolérer l’amateurisme.
Une occasion, enfin, pour le gouvernement de mettre de l’eau dans son vin. Nous avions vu, dans la démarche de Somduth Dulthumun de brûler cet article de l’express dimanche, le résultat des incitations à la violence de Navin Ramgoolam. La haine pour l’express et l’express dimanche a été cultivée, nourrie. Nos publications ont été accusées de « faire un travail dangereux » de division. Cet article primé aujourd’hui montre qu’il n’en est rien. La campagne du gouvernement est inutile et mesquine parce qu’elle n’est motivée que par les intérêts de particuliers et non par l’intérêt du pays. Nous nous attachons à exercer le métier avec bonne foi, rigueur et professionnalisme. Et les accidents sont traités avec la plus grande importance. Toute récompense est un honneur et une responsabilité. Un journalisme digne de ses citoyens lecteurs, c’est à assumer cette responsabilité que l’express dimanche continuera à travailler.
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