Publicité

Ingratitude et naïveté

28 novembre 2011, 08:34

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Contradictoire. On se plaint de la fuite des cerveaux mais on la finance avec l’argent du contribuable, quand bien même les boursiers signent un bond de Rs 500 000. Alors pour éviter qu’ils ne prennent la poudre d’escampette, le ministre Bunwaree ramène à deux ans au lieu de cinq l’engagement des lauréats à bosser à Maurice. A priori, ce sera loin d’être suffisant pour motiver leur retour au bercail.

Pour le coup, on peine à les garder nos compétences. Quoi de plus normal que l’envie de tâter le pouls de l’étranger ? Le hic, c’est que souvent ces jeunes élites finissent par trouver que l’herbe est plus verte ailleurs.

Au lieu de toucher à la période de « service- à- la- nation- qui- a- financé- tes- études » , l’idéal aurait été de créer les conditions propices au retour.

Ces conditions tiennent aux opportunités d’embauche et de carrière, aux rémunérations, au cadre de vie et à l’ouverture, etc. Pour le coup, comment motiver un jeune diplômé à revenir pour Rs 20 000 par mois ou même Rs 30 000 ? Ah oui, le patriotisme ! Le service rendu à la Nation ! Le sentiment supérieur de participer à la construction du pays ! Et la construction de soi ? De sa maison ? De son futur ? Les idéaux sont vite malmenés par tout ce qui préside aux destinées personnelles.

Autre motivation : proposer de l’emploi dans la fonction publique. Là encore, on se trompe : ceux qu’on considère – à l’excès - comme la crème de la crème voudront- ils engraisser le mammouth de la fonction publique que le cornac politicien a presque rendu corvéable ? Pas très sexy comme expérience.

Tous les ans donc, c’est la même chose : on dépense l’argent du contribuable en espérant former une élite assez reconnaissante pour revenir.

Naïf, non ? Et si on faisait en sorte que nos élites boursières trouvent localement leur bonheur ? Les facultés de droit, d’agriculture ou de sciences sont reconnues pour leur niveau et la compétence de leurs professeurs, non ? Manifestement, on a encore du pain sur la planche pour que les « élites » voient dans les formations locales des sésames aussi performants que ceux délivrés par des universités étrangères, trop souvent européennes ( pour info, l’université de Cape Town est mieux notée que nombre de « prestigieuses » universités du Vieux continent).

C’est donc aussi un changement des mentalités qui doit s’opérer. Un jeune diplômé de l’Université de Maurice sera moins bien considéré qu’un jeune, qui plus est lauréat, fraîchement émoulu d’une université étrangère. Et pourtant, le second est- il forcément plus compétent, plus apte à accomplir une tâche ? Le système de lauréat pose lui- même des questions parce qu’il est élitiste, parce qu’il déifie presque de jeunes écoliers bûcheurs mais pas toujours aussi brillants qu’on veut le croire. Einstein, par exemple, enfant dyslexique au parcours scolaire et universitaire irrégulier n’aurait jamais été un lauréat ; et pour sûr, ce n’est pas le seul exemple.

Fini le temps des bourses d’Angleterre, fi ni le temps de la médiocrité des formations locales, on doit bien avoir les reins assez solides pour faire comprendre que la prise en charge d’une formation universitaire de premier cycle à Maurice est déjà une chance ( quitte à creuser le deuxième et troisième cycle à l’étranger). C’est qu’en plus, on veut être un centre d’excellence pour l’éducation et la recherche dans la région. Y a pas comme un paradoxe encore là ?

Publicité