Je suis une femme. Je n’ai certes que 16 ans. J’aime un jeune homme. Du moins,je le crois. Je pense que je suis une femme mais je me sens encore enfant. J’ai envie de choses simples. J’ai envie de prendre la route. De prendre du bon temps. Chaque matin, lorsque je me lève, j’ai envie de vivre.

Chaque soir, lorsque je vais dormir, j’ai envie de mourir. C’est vrai, j’ai un homme dans ma vie. Et je me sens bien en sa compagnie.

Les choses adviennent parce qu’elles doivent advenir. Je croyais savoir jusqu’où je pouvais aller. Je me sentais forte. Je croyais qu’il était facile de dire non. Mais, cela ne se passe pas toujours de cette manière. Ma mère m’a parlé de ma réputation. L’école m’a parlé des normes. Les amis m’ont parlé du plaisir. Mais personne ne m’a dit que quand cela arriverait, le temps allait s’arrêter, mon coeur allait cesser de battre et je ne saurais quoi penser.

Tu peux avoir de moi l’opinion que tu veux. C’est ton droit. Que j’ai été stupide, perverse, irresponsable… Mais, au moment de l’acte, moi, je vivais quelque chose de si vrai et intense. Et je ne savais pas non plus qu’il y avait un prix à payer pour 12 minutes de plaisir. Je croyais que cela arrivait surtout aux autres.

Puis, je n’ai pas eu mes règles. J’ai fait un test de grossesse. Il était positif. J’étais très heureuse. Je me suis sentie femme. Ensuite, j’ai pris peur. Je croulais sous la peur. Je ne savais plus qui j’étais. Je sentais que la vie jouait avec moi. Je suis une femme mais, dans ma tête, je me sens enfant.

Pour 12 minutes de plaisir, je dois payer un prix. Et mon copain, lui ? Il n’a rien à payer. Il a pris son pied. Et maintenant, il m’a quittée. La vie, elle, a décidé que je devais être enceinte. Mais, je ne peux pas avoir un enfant. Je ne sais même pas encore comment vivre. J’ai commis une erreur. Il y a des précautions que j’aurais pu prendre.

Il y a le préservatif, la pilule, la pilule du lendemain… Ne me punissez pas aussi sévèrement que cela. Ne punissez pas cet enfant innocent en moi. Je n’ai pas envie de devenir une mauvaise mère. Je ne suis pas encore prête à être mère. Peut-être que dans dix ans, je regretterai mon choix. Mais donnez moi un choix. Ne faites pas que je devienne une double victime, Sitotex et avortement dans une ruelle malfamée.

Nazim ESOOF