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La bouteille et la seringue
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La bouteille et la seringue
Le ministre de la Pauvreté et de l’Intégration sociale, Xavier-Luc Duval, a annoncé la semaine dernière la fusion du programme Eradication of Absolute Poverty et le Trust Fund for the Social Integration of Vulnerable Groups pour un meilleur ciblage des familles pauvres et de leurs besoins.
Sur le plan administratif, c’est peut-être pratique pour offrir des solutions individuelles à chaque famille pauvre, mais encore très loin pour éradiquer la pauvreté chez nous. Des années au chevet et à l’écoute des plus démunis nous permettent de prétendre que c’est une mission quasi impossible car la pauvreté est un virus tenace et ceux qui en sont atteints ne sont pas toujours disposés à suivre la thérapie appropriée pour s’en sortir.
Il s’agit avant tout de séparer le bon grain de l’ivraie, de distinguer les vrais pauvres des faux. De ceux qui préfèrent de loin végéter dans l’assistanat, estimant que tout leur est dû parce qu’ils vivent depuis des lustres dans la précarité et qu’ils arrivent à survivre parce qu’ils bénéficient d’une assistance sociale, parce qu’ils vampirisent l’Etat-providence avec toutes les astuces possibles.
Avec une riche panoplie : ici, une pension d’invalidité doublée de celle pour un ou deux enfants scolarisés; là, une aide sociale pour un élément du 3ème âge à charge ou encore un recours à une aide d’urgence. Ceux-là frappent à toutes les portes pour faire fléchir les bonnes âmes généreuses promptes à délier les cordons de la bourse devant le récit de leur calvaire permanent.
Leurs supplications, leurs larmes ne sont pas feintes. Ils sont vraiment dans le besoin. Mais pourquoi devraient-ils travailler si l’Etat peut pourvoir à leurs besoins ? A l’instar de cette dame forte d’une quarantaine d’années avec deux enfants ‘pensionnés’ qui refuse de travailler pour ne pas perdre sa propre pension de Rs 2 000 !
Et puis, il y a les autres, ceux qui ont quitté depuis longtemps la précarité pour s’enfoncer dans l’extrême pauvreté : de véritables épaves, imbibées d’alcool, qui ont rendu les armes, qui ne se battent plus parce qu’ils sont écrasés par une fatalité de naissance. Ils ont une famille nombreuse (souvent une dizaine d’enfants) vivant dans une extrême promiscuité aggravée par l’adjonction de petits-enfants livrés à eux-mêmes parce que les parents séparés (et qui ne travaillent pas non plus) ne s’en occupent plus.
Chez ceux-là, on vit d’expédients : de petits boulots sans lendemain qui assurent le quotidien minimal (au moins un repas frugal par jour), de mendicité permanente, de chapardages de fruits de saison, de petits larcins etc... Des êtres vulnérables pour le ‘dealer’ du coin qui en fait des accros de Subutex en quelques semaines… avec au bout la prison.
Il faudra un véritable plan Marshall anti-pauvreté pour redonner espoir à ces nombreuses familles. Seul, le ministère de l’Intégration n’y arriverait pas. Les ministères de l’Education, la Santé, de de la Sécurité Sociale et les ONG devraient être mobilisés pour des opérations coups de poing, car la distribution de feuilles de tôles et de poteaux ne suffirait pas pour que ces voyageurs de la désespérance ne fassent plus la navette entre la bouteille et la seringue.
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