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La peur
En cette période des fêtes, on croise les enfants. Ils semblent heureux. Ils retrouvent les parents, les amis, les proches… Ils reçoivent des cadeaux. Ils sont insouciants. Subitement, ils sont débarrassés de cette obsession de la réussite qui en fait des automates. Ils sont redevenus des enfants. Quel bonheur.
Nous, les adultes, il y a longtemps qu’on a oublié ce que c’est. Pendant toute l’année, pour une bonne partie d’entre nous, nous avons fait des promesses. Si l’enfant et le jeune réussissent son CPE ou son HSC, ils recevront de beaux cadeaux à la fin de l’année. C’est ainsi que nous récompensons. C’est ainsi que nous faisons du chantage. Du marchandage. Nous n’en sommes même pas conscients. Nous croyons faire le bien. Nous ne nous rendons pas compte que nous avons, pendant toute l’année, nourrit la peur chez nos enfants.
Voilà pourquoi j’en parle aujourd’hui, à la veille d’une nouvelle année. L’éducation est devenue source de peur.
Peur de ne pas bien réussir. Peur d’échouer.
L’instrumentalisation des enfants au service des fantasmes des adultes est le signal qu’une société s’est mise à la mode des artifices.
Ce régime que nous faisons vivre à nos enfants, nous n’en mesurons aucunement les conséquences. Nous développons chez l’enfant la peur. Et cette peur de l’échec va se transformer en peur de la vie.
Nous la voyons tous les jours. Mais nous l’assimilons à des causes externes au mal. Le mal, c’est notre obsession de la réussite pour nos enfants. Le mal, c’est cette course effrénée à faire mieux que l’autre.
Lorsque nous nous retrouvons en déphasage avec nos jeunes, nous mettons tout sur le compte d’une société ultra modernisée où règnent les technologies de toutes sortes.
Or, ce n’est pas toujours le cas. Si nous ne comprenons plus nos jeunes, s’ils semblent avoir des comportements étranges, s’ils font surtout valoir leur indifférence à la vie, s’ils continuent à avoir des rapports sexuels sans la capote malgré la menace du sida, ce n’est pas parce qu’ils sont inconscients. C’est simplement parce qu’ils ont peur de la vie. Quand on a cette peur là, on finit par développer une sorte d’apathie.
C’est étrange. C’est parce que nous avons oublié avec autant de facilités nos propres enfances que nous faisons en sorte que nos progénitures n’aient plus d’enfance du tout. Ce sont les peurs que nous portons que nous transmettons à nos jeunes et à nos enfants.
Après, nous dirons que nous les comprenons plus…
Nazim Esoof
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