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La pollution des mots
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La pollution des mots

5E - 2A - 1H - 1T- 1C. Non, ce n’est pas le numéro d’identifi cation du télégramme qui vous révélera tout sur la cession de Diego en 1965.
C’est une proposition de slogan. Car il faut sauver le projet MID, menacé d’insignifi ance.
Pour mieux l’inscrire dans nos réalités, nous avons rajouté quelques notions : A pour air et alimentation, H pour habitat, T pour transport, C pour Culture. Voilà qui devrait le faire éclore, d’un « projet énergétique à un projet de société » , comme l’a souhaité, à deux reprises cette semaine, le Premier ministre.
Pas convaincant ? D’accord. Il ne suffi t pas de quelques E pour faire monter la mayonnaise. Que faut- il pour que nous adoptions cette idée centrale à notre devenir ? Il convient parfois de tout mettre à plat pour comprendre où ça coince.
Revenons alors à la défi nition.
Développer Maurice « durablement » , c’est prendre des décisions aujourd’hui de telle manière que celles- ci laissent à nos enfants la possibilité de décider, eux, demain, comment ils voudront vivre. C’est préserver leurs possibilités d’exercer leurs propres choix de développement. Toutes leurs possibilités.
Leur intelligence, leurs espaces, leurs ressources naturelles... A partir de cette défi nition, il s’agit donc de relever les éléments du patrimoine - tous les E, soit - que nous avons obligation de protéger pour nos successeurs.
Dans l’exercice d’identifi cation de ces éléments, nous avons deux approches possibles. La première, c’est de considérer que nous parlons bien là, d’environnement. Les considérations environnementales demeurent l’enjeu central. La deuxième, c’est d’élargir le concept à d’autres questions. Par exemple, celle de l’Equité dans le partage des richesses - ce E ajouté par le Premier ministre - aussi connue comme la démocratisation de l’économie. Bien que pertinent, ce concept n’a pas besoin du MID. La fragilité du climat ou la rareté des ressources ne sont pas responsables de l’appauvrissement des pauvres.
Les nôtres, du moins.
Le problème avec la première approche, c’est qu’elle risque de vite se limiter à l’énergie. Résultat : la population n’est pas vraiment impliquée et n’intègre pas l’importance de changer son mode de vie. C’est ce qui se passe. Le problème avec le second, c’est qu’il est trop large, trop dilué. On y met tous nos combats, et on perd notre vision. En somme, le MID ne devrait être ni « un projet de société » dans le sens large du terme, ni « un projet énergétique » … dans le sens restreint du terme. C’est un projet de société axé prioritairement sur des considérations environnementales.
Mais clarifi er notre vision, s’assurer que conseillers et dirigeants regardent bien dans la même direction, ne suffi t bien sûr pas.
Le Premier ministre a posé le doigt sur ces autres aspects qui empêchent le projet d’avancer.
Le MID a manqué d’un plan d’action. Une fois l’exercice d’identifi cation évoqué plus haut complété, il est majeur que l’on sache ce qui n’est pas « soutenable » dans notre contexte, ce qui pourrait l’être, et quelle action prendre. Exemple, l’Education. N’est pas « soutenable » , une éducation purement « académique » , qui ne donne pas conscience aux enfants de la réalité qui les entoure, eux qui ne prennent pas le temps d’apprécier la pureté exceptionnelle de l’air qu’il respire. Une éducation aussi qui ne développe pas toutes les ressources intellectuelles du pays, en laissant quelques « possibilités » sur le bord. L’action à prendre : des écoles vertes et ouvertes, des programmes qui prennent en compte toutes les dimensions de la personne, qui cultivent la capacité d’innovation pour que ces enfants demain maîtrisent leur environnement.
De l’action défi nitivement. Rapide et énergique de préférence.
De l’humilité aussi. Navin Ramgoolam l’a compris.
« The MID project belongs not to me, not to Prof Joel de Rosnay, not to Mr Osman Mohamed, but to the whole Mauritian nation » , a- t- il dit à l’Assemblée nationale vendredi. Ce qui concerne le développement durable dépasse donc les considérations politiques, ethniques, partisanes du gouvernement du jour.
Par conséquent, pour gérer l’Eau, nous nous attendons que le gouvernement pense expertise étrangère au lieu d’y voir une occasion de caser un nominé. Pour l’Energie, il dépassera les lobbys d’intérêt et les petits copains pour voir lequel du charbon ou de l’incinérateur est le moindre mal. Il sera transparent dans ses choix – s’il détient des informations sur le CT Coal Power, il ne les gardera pas « for ( his) « personal consumption » . They belong to the Mauritian nation.
Et l’Ile durable, enfi n, c’est en grande partie la Ville durable.
Par la ville, énormément d’actions peuvent être prises et d’attitudes, changées. L’amélioration de l’habitat existant, le tri des déchets, le développement d’écoquartiers… Asphyxier l’administration régionale, ce n’est pas MID compatible. Que le gouvernement applique ce qu’il dit. La pire des pollutions, disait un sage, c’est la pollution des mots.
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