Publicité
Le doute
Les citoyens avisés auraient pu s’en réjouir. Le projet de construction d’une centrale solaire photovoltaïque à Bambous a tout pour plaire. Mais l’on ne peut pas négliger un petit détail qui agace. Le promoteur, Shyam Seetaram, a su convaincre les autorités de l’opportunité de son projet et s’est vu octroyer 80 arpents pour sa ferme solaire sans passer par un appel d’offres.
Il est en effet intéressant pour le pays que des investisseurs locaux et étrangers aient décidé de miser sur la filière des énergies renouvelables pour produire 15 MW d’électricité. Cet apport, même petit, à la production globale d’électricité, sert à prouver que le charbon, le fuel et le gaz ne sont pas fatalement les seules options pour notre pays. Les sources d’énergie durable deviennent peu à peu viables.
Ce qui est grave, cependant, en termes de gouvernance publique, c’est que Shyam Seetaram et ses partenaires n’ont pas été retenus après un exercice d’appel d’offres. Ils avaient soumis un «unsolicited bid», procédé qui pollue le climat des affaires comme le charbon pollue l’atmosphère. D’ailleurs, le Premier ministre, lui-même, ne cache pas ses réserves par rapport au principe de la démarche.
La question s’est posée une première fois dans le cas de CT Power. Rompant avec la tradition des appels d’offres, invitant les éventuels soumissionnaires à soumettre leur projet à l’examen des autorités publiques, le gouvernement avait donné son feu vert au groupe malaisien sans chercher à savoir si d’autres offres plus avantageuses existaient pour le pays. Interrogé au Parlement en 2009, le ministre de l’Energie d’alors, Abu Kasenally, devait promettre que «nous allons arrêter avec les unsolicited bids».
Outre le fait que l’absence d’appels d’offres jette un doute sur l’ensemble de l’exercice, tout marché public octroyé à l’issue de négociation de gré à gré comporte d’autres inconvénients. Ainsi, lorsqu’un promoteur soumet un «unsolicited bid», il n’a aucun critère préétabli à respecter. Il n’y a pas, non plus, de garantie de transparence.
Un pays qui prétend respecter les normes établies de gouvernance ne peut cautionner le système des offres spontanées. Un pays qui privilégie les lobbyistes aux dépens des plus méritants n’est plus une démocratie. Il devient une lobbycratie.
Publicité
Les plus récents