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Le front commun des racistes

10 février 2013, 07:34

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Il est hors de question d’insulter la moitié de la population de la République en l’associant à l’action de quelques excités. Nous utiliserons donc le juste qualificatif pour désigner le regroupement d’associations socioculturelles que dirige Somduth Dulthummun : le Front Commun des Racistes ( FCR).

Le président de la Mauritius Sanatan Dharma Temples Federation est une vieille connaissance de l’express dimanche. Il faut avouer qu’avec ses pitreries, consistant à brûler à grand peine un numéro de ce magazine, ou alors ses diatribes pour répondre à des éditoriaux dénonçant la tiédeur de l’implication des associations socioculturelles dans la lutte contre le VIH, Dulthummun est devenu au fil des ans ce meilleur ennemi pour lequel on se prend presque d’affection.

Mais depuis quelque temps, Dulthummun ne nous fait plus rire. Il est loin également de susciter le moindre sentiment amical chez nous tant il se mue, jour après jour, en un dangereux pyromane dont l’objectif semble être de faire se dresser une partie de la population contre une autre. Il faut prendre cette menace au sérieux et rester vigilant. Tout en préservant notre foi dans le vivre-ensemble des Mauriciens qui ont su cohabiter pacifiquement, hormis les épisodes de tensions interethniques de 1965, 1968 et 1999.

Avant de réfléchir à ce que chaque citoyen pourrait faire à son échelle pour prévenir l’embrasement, il nous faut toutefois réduire Dulthummun et son FCR à leur portion congrue. Car à écouter leur rhétorique perfide, on pourrait aisément croire que ce regroupement d’individus parle au nom de toute la population hindoue du pays. Il n’y a rien de plus trompeur.

En effet, si les 70 députés de notre Assemblée nationale peuvent s’enorgueillir d’y avoir été envoyés par le suffrage cumulé de 80% des votants de la République, les dirigeants des associations socioculturelles sont très loin de pouvoir brandir la même légitimité démocratique. Ils ne sont élus que par quelques centaines de membres actifs de leurs associations respectives.

A bien y voir, ils ne représentent donc qu’eux-mêmes et les intérêts de leurs généreux bienfaiteurs politiques ou économiques. Dulthummum se ridiculise donc à chaque fois qu’il se fait le porte-parole de la communauté hindoue et qu’il s’exprime en son nom. Il n’a aucune légitimité pour le faire.

Il faut toutefois reconnaître qu’une étincelle peut parfois être à l’origine d’un départ d’incendie. Le FCR semble en avoir parfaitement conscience et use donc à outrance d’un argumentaire tendant à faire croire que la communauté hindoue est victime de « menaces, de harcèlement, de mépris et d’insultes » de la part « d’une certaine presse » . Le shérif Dulthummun donne « un avertissement très sérieux » et menace de lancer « d’autres actions qui s’imposent » . Parlet- on d’actions violentes ?

Si Dulthummun et ses acolytes ne s’en prenaient qu’à la presse, cela passerait encore, mais ceux-ci sombrent doucement dans la paranoïa et recouvrent désormais tout d’un voile de racisme. Si l’on en croit Dulthummun, toute personne hindoue est forcément vertueuse. Par conséquent, porter un jugement critique sur son action consiste à faire preuve d’un acte de racisme. C’est ainsi que par un amalgame ridicule, Dulthummun en vient à faire croire que tout le mouvement de protestation anti-CT Power n’a pour origine qu’un sentiment antihindou à l’égard du promoteur du projet.

Le problème, désormais, c’est que le FCR dispose d’outils de propagande pour amplifier son message. Plus que jamais, la télévision nationale relaie son message rétrograde avec bienveillance. Tandis que des torchons qui se spécialisent dans l’outrance se font un devoir de jeter de l’huile sur le feu. En espérant démontrer un prétendu complot d’une frange raciste de la population contre la majorité hindoue.

Les fous qui pensent ainsi doivent répondre de leurs actes. L’article 282 de notre code pénal traitant de l’incitation à la haine raciale punit « any person who, with intent to stir up contempt or hatred against any section or part of any section of the public distinguished by race, caste, place of origin, political opinions, colour or creed » . Nous invitons donc Dulthummun, s’il croit vraiment en ce qu’il déblatère, à aller porter plainte contre les journaux et journalistes qu’il accuse d’être racistes. Par la même occasion, nous ne pouvons qu’encourager les citoyens du pays à exercer une vraie vigilance sur toute possibilité de dérive. Si une loi punissant l’incitation à la haine raciale existe, c’est pour qu’elle soit utilisée. Il est peut-être temps.