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Le MSM de retour au centre du jeu
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Le MSM de retour au centre du jeu

En un temps deux mouvements, sir Anerood Jugnauth vient d’accomplir ce qui était, il y a quelques mois, inimaginable : remettre au centre du jeu politique le MSM, hier moribond, sous l’autorité chancelante de son fi ls. Le parti retrouve aujourd’hui toutes ses couleurs et sa superbe, au point d’imposer insidieusement au MMM sa volonté sur de nombreuses questions.
Toute l’habileté de SAJ, depuis son ascension politique des années 70, a toujours consisté à assumer une posture gagnante à tous les coups : en se rendant indispensable ou en créant la perception d’être indispensable ! Sir Anerood vient peut- être de jouer, une fois encore, le même tour à Paul Bérenger et au MMM, après s’être entraîné à ce jeu 40 ans durant, sur à- peu- près tous ses interlocuteurs politiques.
En 2011, le MSM était littéralement à genoux, poussé à la démission du gouvernement ; mortellement décrédibilisé par l’affaire Medpoint ; ses stratégies alternatives limitées ; ses leaders sous le coup de sérieuses inculpations judiciaires ; une réforme électorale projetée, menaçant de porter le coup de grâce au parti pour sa représentation parlementaire future ; sa force de frappe électorale publiquement évaluée par le pouvoir à 3 % des intentions de vote.
Six mois après, avec la carte SAJ revenue sur la table, le MSM se retrouve à parité avec un MMM objectivement beaucoup plus fort que lui ; crédité sans grande diffi culté ni négociations laborieuses de la moitié des futures investitures et des trois cinquièmes du primeministership éventuel ; imposant littéralement des candidatures « sûres » dans des bastions de son allié, en retour d’un soutien aléatoire dans d’autres circonscriptions marginales ; embrigadant son partenaire consentant dans une stratégie de collision directe avec un autre allié potentiel et menant la charge anti- PTr avec un char d’assaut dans lequel le MSM, l’an dernier, ne pouvait espérer – au mieux – qu’être un passager et dont il est, aujourd’hui, le chauffeur… Dans son enthousiasme habituel à accommoder ses partenaires, Bérenger prend même un double risque dont on se demande s’il mesure bien la portée. Celui, d’abord, dans les paramètres actuels de l’accord, de se retrouver ( en cas de succès électoral du « remake » ) dans une situation où SAJ pourrait disposer de davantage d’élus que le MMM, avec la possibilité en cas de désaccord d’aller pêcher dans le bassin mauve ou encore de tendre la main comme en 1983 aux élus PTr, frustrant le MMM de sa part du pouvoir et de primeministership proposée. Celui, ensuite, d’avoir ( à la faveur d’une alliance supposément limitée à Bérenger/ SAJ) installé en fait Pravind Jugnauth au primeministership sans effort, en cas d’indisponibilité ou d’impossibilité pour SAJ d’assumer totalement sa charge pendant toute la durée de l’accord.
Quelles seraient alors les dispositions d’exercice du pouvoir ? En votant le « remake » , l’électorat voterait- il ( dans un scénario que personne ne souhaite mais que la maladie peut rendre crédible) en faveur d’un éventuel primeministership de Pravind Jugnauth ou d’un autre dirigeant MSM ? Tout cela, il importe de le savoir et de l’évoquer par souci d’honnêteté intellectuelle.
Il n’est pas du tout sûr, en effet, que le MSM laisserait le MMM s’éloigner de lui, une fois les accords scellés.
Le parti orange est assez pragmatique pour menacer d’opérer un retour vers le PTr si demain les circonstances l’exigent. Il faut donc savoir avant plutôt qu’après.
La situation, pour l’heure, ne pousse toutefois pas dans ce sens. Le MMM a déjà décidé, contre vents et marées, de jouer crânement, au cours des prochains mois, la carte de l’alliance Bérenger/ SAJ. Le 1 er Mai le confi rmera sans doute dans ce choix. Le MMM devrait s’y conformer pendant le reste de l’année. C’est après quelques mois de vie en commun, une fois l’excitation des retrouvailles retombée, que les choses pourraient commencer à sérieusement se compliquer entre MMM et MSM.
Pourquoi ? Paul Bérenger l’a dit à ses délégués le 14 avril : le MMM est certain de pouvoir gagner seul les élections dans une lutte à trois et la tentation a été grande pour lui d’y aller. Il préfère toutefois faire alliance avec SAJ parce que, d’une part, cette alliance est supposée précipiter la chute du régime Ramgoolam et provoquer des élections « rapides » alors que « chaque jour compte » , et d’autre part, SAJ travaillerait activement et personnellement à susciter la défection de plusieurs ministres et parlementaires rouges et aidera donc à renverser constitutionnellement le gouvernement par une motion de censure au Parlement.
Or, si rien de tout cela n’intervient au cours des prochains mois ? Si Ramgoolam continue tranquillement son chemin, sans élections, et si son régime ne s’écroule pas, que resterait- il aux yeux de Bérenger de la supposée « force de frappe » de SAJ ? Et si aucun « patriote » rouge travaillé par SAJ ne déserte le navire travailliste, que restera- t- il de la « force de persuasion » de l’ex- président ? Quelles têtes SAJ ramènerait- il alors au MMM ? Bérenger serait- il, dès lors, davantage à l’aise pour une autre manifestation publique de ses changements d’humeur habituels ? Après l’euphorie des chaudes retrouvailles, le grand désamour ?
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