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Les hommes-liges du prince

13 septembre 2010, 09:10

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Par un froid de décembre de l’An 1170, quatre chevaliers Reginald FitzUrse, Hugh de Moreville, William de Tracy et Richard Le Breton firent irruption dans la cathédrale de Cantorbery et assassinèrent son Archevêque, Thomas Beckett. Celui-ci avait osé défier son roi, Henry II d’Angleterre, en affirmant l’indépendance de l’Eglise par rapport au Trône. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, Henry II n’avait, à aucun moment, commandité ce crime crapuleux. Malade et cloué au lit, Henry II, n’en pouvant plus avec cet Archevêque frondeur, avait dit, dans un moment de grande lassitude en présence de ces quatre chevaliers, s’il n’y avait personne qui l’aimait assez pour s’en débarrasser. Ceux-ci interprétèrent ces propos comme une injonction  royale….C’est ainsi que Beckett est devenu martyr. Son histoire a été popularisée par la pièce de T.S. Eliott en 1935 ‘Murder in the Cathedral’ pour dénoncer aussi la montée du fascisme, les atteintes à la liberté et exalter la résistance à l’arbitraire.

Il y a quelques similitudes entre les événements de l’An 1170, des années 30 en Europe et de 2010 à Maurice. On ne trucide plus un  homme d’église. Mais dans un  climat de haute tension presse/pouvoir, quelques chevaliers autoproclamés des causes sectaires brûlent des journaux en public, tentent d’intimider des journalistes pour brimer la liberté d’expression afin de faire plaisir, non plus au roi, mais au Prince !

Ces exécuteurs de basse besogne croient anticiper le souhait princier. Car depuis quelque temps, le Premier ministre multiplie ses attaques contre la presse et avec l’affaire Choonee, elles se sont amplifiées. Pas plus tard que, dans le cadre des activités pour la fête Gunesh Chatturthi, NavinRamgoolam a encore une fois menacé la presse (‘pas zoué avec difé’) après avoir décrété pratiquement que l’opinion est presque un délit !

Que dans ce conflit qui oppose la presse à Navin Ramgoolam, quelques esprits serviles – comme les chevaliers de Henry II - aient estimé qu’ils étaient en droit d’ériger des autodafés pour brûler l’opinion dissidente, c’est un pas qu’ils ont franchi allègrement pour frotter l’allumette.

Henry II, après l’assassinat de l’Archevêque, la réaction de l’Eglise et l’immense réaction de l’opinion, se défendit d’avoir mis Beckett sous ‘contrat’ de quelques hommes de main. Il s’en ‘dissocia’ (le verbe est à la mode) et mit sur le compte d’un zèle aveugle cette opération commando.Nita Deerpalsingh n’en fit pas mieux lors de sa conférence de presse en prenant ses distances de ces pyromanes sans explicitement les condamner ! Qui sait, ils peuvent encore servir !

 Thomas Beckett pouvait difficilement penser qu’après 765 ans avec T.S. Eliott et huit siècles plus tard à Maurice que son  assassinat allait inspirer des démocrates pour dénoncer la montée de l’intolérance nazie et  les tentatives liberticides ramgoolamiennes.

L’histoire des hommes-liges est aussi plein d’enseignements.