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Les yeux sont aveugles…

Toutes les grandes personnes ont d’abord été des enfants, mais peu d’entre elles s’en souviennent… Cette petite phrase d’Antoine de Saint-Exupéry dans Le Petit Prince pourrait résumer à elle seule l’indifférence de nos décideurs politiques vis-à-vis du problème des enfants de rue. Voire la cécité de ceux qui sont nés avec une cuillère dorée dans la bouche.
Vous rendez-vous compte ? 6 780 de ces gamins ont été recensés par Safire, le Service d’accompagnement, de formation, d’insertion et réhabilitation de l’enfant, une Ong qui n’a jamais cessé de lutter afin qu’une poignée d’entre eux ait droit à un avenir meilleur. Le sort des enfants errants, victimes d’abus sexuels, de drogue, et de maltraitance, n’est pourtant pas nouveau.
Le cas le plus dramatique est celui de Sunil Hookoom. A 9 ans, il a été brûlé vif par ses camarades de jeu un dimanche de juin 2003. Sniffeurs de colle comme lui, issus d’un faubourg de la capitale, ils l’ont attaché à un arbre et gratté une allumette pour le forcer à leur remettre l’argent qu’ils avaient reçu en aumône. Ils voulaient avoir de quoi se remplir la panse après avoir vainement tenté de capturer des pigeons pour se mettre sous la dent.
Sam Lauthan, alors ministre de la Sécurité sociale, a pris le problème à bras-le-corps. En recrutant des travailleurs de rue. Ces personnes identifiaient les enfants laissés à leur triste sort, les encadraient et les aidaient à s’en sortir. C’était trop beau pour être vrai. Au retour des travaillistes au pouvoir en 2005, la décision la plus imbécile a été de mettre un terme à ce programme.
Si 6 780 gamins traînent les rues, ce n’est certes pas la faute au gouvernement. Mais il y a contribué. Faute de vision. Et de financement. Sheila Bappoo ne s’est-elle pas plainte l’an dernier que le Grand Argentier Pravind Jugnauth n’ait pas avancé des sous pour ses projets liés à l’enfance ?
C’était peu avant l’implosion de l’Alliance de l’Avenir suite à l’acquisition de la clinique MedPoint par l’Etat. Et voilà que le Mouvement socialiste militant (MSM) rue dans les brancards ce lundi, déplorant que les travaillistes n’aient rien fait pour les enfants de rue… Pourtant, beaucoup peut être fait.
Le MSM lui-même aurait pu, par exemple, créer un fonds grâce aux Rs 44 millions qu’il a engrangés suite au procès intenté à l’Etat pour avoir mis un terme à la location des étages entiers du Sun Trust. L’alliance Parti Travailliste-Mouvement militant mauricien élue en 1996 a voulu faire un croc-en-jambe au parti alors dirigé par sir Anerood Jugnauth en déménageant plusieurs ministères sans se soucier des contrats signés.
Si les élus, comme se l’était promis Richard Duval en 2000, versaient à un trust une part de leurs salaires et des per diem mirobolants qu’ils perçoivent à chaque voyage, le drame des enfants de rue serait de l’histoire ancienne. Pourquoi ne pas prélever un pourcentage des deniers publics versés aux associations socioreligieuses ?
La rédemption pourrait venir de Mireille Martin, ministre du Développement de l’enfant. Elle sait ce qu’est la misère et a été de l’équipe de 2000. Elle pourrait redonner un nouveau coup de fouet au projet des éducateurs de rue.
Les yeux sont aveugles, a aussi écrit Antoine de Saint-Exupéry. Il faut chercher avec le cœur.
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