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Lunettes déformantes, lucidité compromise
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Lunettes déformantes, lucidité compromise
Quand on a écrit, ici même à l’express, que les 18 tickets donnés au MSM en 2010 relevaient du théâtre de l’absurde, est-ce que le partage de tickets 50/50 au sein du Remake pourrait relever d’une logique différente ? Oh que non ! Même si l’on prend en compte que les « cinq sous » apportés par le MSM valent électoralement beaucoup plus pour le MMM que pour le PTr… nous sommes toujours dans le scénario de la transfiguration du nain MSM à cause de la logique bancale du First Past the Post.
Si l’on écrit que la sortie de Paul Bérenger contre la visite du Premier ministre de la Malaisie, au motif que ce dernier n’est pas un parfait démocrate, pue l’hypocrisie, est-on pour autant « progouvernemental » ? Sûrement pas ici, à l’express, où la motivation est de rechercher la vérité et où il faut donc rappeler à M. Bérenger sa propre partialité de circonstance en faveur de divers non-démocrates, comme Albert René par exemple. Sans compter qu’il faudra peut-être maintenant défendre la crédibilité de l’Arabie Saoudite sur le plan de la démocratie ?
Si on applaudit la réalisation d’un nouvel aéroport à Plaisance, la création du « hub » qu’est devenu l’ICT d’Ebène et la réforme constitutionnelle qui rend les élections obligatoires tous les cinq ans, est-on à la fois pro-Navin, pro-Anerood et pro-Paul ? Sûrement pas ! Nous avons soutenu les trois initiatives pour ce qu’elles apportent au pays, pas parce que nous sommes partisans du leader politique engagé en la circonstance. Si l’on critique les petites faveurs découlant de la proximité du pouvoir du pandit Sungkur, de Midas Ltd ou de Mme Soornack, le contrat de location du Sun Trust avec le ministère de l’Education orange (non défendu par la suite en cour de justice), le « festival de la terre » de Duval ou l’octroi d’un « petit » terrain du gouvernement à la préférée du ministre Ganoo, souffre-t-on de schizophrénie en étant à la fois contre Ramgoolam, Jugnauth, Duval et Bérenger ? Mais évidemment pas, puisque l’on ne parle que de la bonne gouvernance violée dans chaque cas.
Voilà, cependant, quelques exemples de la pénible situation de notre pays qui se trouve souvent incapable de s’élever au-dessus de considérations émotionnelles primaires (« nou bann » et « zot bann ») pour distinguer le principe en jeu et l’appliquer objectivement à tous, sans émotion et de manière équitable. Ce n’est peut-être pas encore désespéré, mais c’est quand même plutôt grave. Car le fait est que l’émotionnalité (un autre mot à inventer !) religieuse, ethnique ou politique domine toute analyse de nos problèmes locaux, est en train de nous éloigner de la logique, des principes et des raisonnements cartésiens. Qui sont seuls à même de nous tirer sûrement et solidement vers les lendemains meilleurs auxquels nous aspirons tous. Et le mal pourrait être en train de se répandre, malgré les progrès bien réels de la cause du mauricianisme ! (Voir le numéro hors-série de l’express du 16 décembre 2013)
Car c’est par les mêmes mécanismes que nous vivons et assimilons les images réductrices de créoles « faiseurs » et ayant le sens prononcé de la « fête », de Blancs arrogants et accapareurs alors qu’ils ne le sont pas tous, de musulmans décrétés intolérants parce qu’une poignée d’entre eux imposent à un commerce (Food Lover’s Market, par exemple) ou à un restaurant (Dragon Vert) de ne pas servir du porc, d’hindous « incompétents » ou « indisciplinés» parce que largement associés à des services gouvernementaux qui ne marchent pas toujours correctement.
N’est-ce pas ainsi, aussi, que quelques blogueurs à la tête pourrie de préjugés reprochaient à l’express, en décembre, le fait que ses quatre « Savates d’or » 2013 - Yatin Varma, Anil Bachoo, Teemul Gokool et Satyendra Peerthum - étaient tous hindous, y voyant la preuve du « racisme » de notre journal ?
Il n’y a pas de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Dans ce même numéro spécial de fin d’année, les trois Mauriciens de l’année, soit les trois héros de l’accident de Sorèze, s’appellent Deepchand Gunness, Ramesh Bundhoo et Sanjay Ramdhayan…
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