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Portrait d’un intolérant
Le MSM a raison. L’express s’est effectivement trompé en estimant le nombre des sympathisants que ce parti a réuni le 1er mai à St-Pierre. Il nous faut donc rétablir les faits. Selon notre estimation, le MSM n’a pas attiré 4 000 mais plutôt 3 000 partisans. Pour arriver à cette conclusion, nous avons consciencieusement évalué la foule, confronté nos estimations avec celles d’autres confrères – journalistes et photographes – ainsi que des habitués des meetings. C’est un travail de rigueur.
Mais pour accepter les faits en toutes circonstances, il faut être raisonnable et démocrate. Manifestement, Pravind Jugnauth n’est ni l’un, ni l’autre.
L’homme a un passif lourd. Pendant qu’il était ministre de septembre 2000 à juillet 2005, il nous avait déjà donné un aperçu de son intolérance. En effet, comme ministre des finances, Pravind Jugnauth s’était irrité des interrogations de l’express-dimanche sur sa gestion de la dette et du déficit public. En représailles, il avait boycotté le journal.
Choisissant de décliner toute demande d’entretien ou invitation à commenter l’actualité économique.
Souvent le passage dans l’opposition – a fortiori le karo kann extraparlementaire – assagit les plus réfractaires et les rend humbles. Cela n’a pas été le cas pour Pravind Jugnauth. A peine a-t-il chaussé les grands souliers de son papa qu’il redouble de véhémence envers la presse et plus précisément l’express. Qui, selon lui, n’existe que pour lui nuire.
Dédaignant le dialogue, incapable de comprendre qu’il ne fait l’objet d’aucune cabale, Pravind Jugnauth s’attaque systématiquement au rédacteur- en-chef de l’express, Raj Meetarbhan, à ses congrès et meetings.
Pravind Jugnauth choisit l’insulte pour décrédibiliser le journal.
Mais les faits sont têtus et l’express continue à les relayer. Comme quand il rapporte que le meeting MSM du 1er mai 2008 n’a mobilisé qu’une assistance maigrelette. Une vérité difficile à avaler… Pravind Jugnauth réagit avec virulence en boycottant l’express et l’express-dimanche. Nous ne serons désormais plus invités à couvrir les activités du MSM.
Un boycott inutile car les deux journaux continuent à informer leurs lecteurs de ses activités. Notamment durant la campagne pour la partielle de Quartier-Militaire/Moka Durant celle-ci, la presse et les radios privées remarquent le vigoureux coup de main du Parti travailliste et d’organisations sectaires à Pravind Jugnauth. Elles en font donc état. Mais une fois de plus, le leader du MSM nie les faits.
Dénonce une énième campagne pour le déstabiliser. En réaction, ses attaques envers l’express s’intensifient.
Notamment quand il parle de « sa malpropté zournal ki apel l’express- la… mem pou al toilet pas bon ca » et appelle ses partisans à ne plus acheter le journal.
Se sentant pousser des ailes, croyant revenir bientôt au pouvoir grâce à une alliance avec le Parti travailliste, Pravind Jugnauth ne cesse de radicaliser son langage face aux titres de La Sentinelle. Sans doute se sent-il soutenu, voire encouragé, par son nouveau boss, Navin Ramgoolam. Qui voue lui-même une hargne tenace à la presse indépendante. Vendredi Jugnauth persiste et signe.
« L’express, l’express-dimanche ek Radio One, mo dir bizin boycott sa bann zournal ek sa radio-là. » Il déverse ensuite un chapelet d’insultes contre Jean-Claude de l’Estrac, directeur exécutif de La Sentinelle, et Raj Meetarbhan. Tant de constance dans ses attaques ne pouvait que dégénérer.
Ainsi hier, en découvrant l’estimation des foules du 1er mai, le MSM voit rouge. Et S h o w k u t a lly Soodhun prend la tête d’une foule de 150 personnes – dont d’autres responsables du MSM - pour agresser des journalistes de La Sentinelle et dégrader les locaux de nos bureaux à Port- Louis. La menace de Soodhun est précise : « Zordi reklam; fim pou zoue pli tard. » Il faut comprendre et craindre que le MSM ne compte pas arrêter ses actions violentes.
Quelle ironie ! Nous célébrons aujourd’hui la Journée mondiale de la liberté de la presse décrétée par les Nations Unies. En cette occasion, nous ne pouvons que nous inquiéter que l’un des trois « grands » partis politiques du pays estime normal de recourir à la violence comme mode de dialogue avec la presse.
Si campé dans l’opposition, un parti recourt à de telles méthodes détestables, on se demande à quelles solutions extrêmes elle recourra si jamais elle arrive au pouvoir. Mais qu’importe, la meilleure réponse que la presse libre peut donner à cette tentative d’intimidation, est de redoubler de rigueur dans son travail. C’est justement ce que nous allons faire. N’en déplaise à Monsieur Jugnauth.
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