Le vieillissement de la population, qui est en soi un progrès de notre civilisation à saluer (on a pu allonger l’espérance de vie, contrairement à d’autres pays en développement) et la baisse de la fécondité (fruit d’une campagne assidue du «Mauritius Family Planning») posent des défis considérables. Dans cette optique, le «Family Planning and Demographic Yearbook» du ministère de la Santé, publié jeudi, dépasse de loin le cadre de la santé publique et touche pratiquement tous les sphères et aspects de la société mauricienne, tous âges et secteurs confondus.

Sur le plan humain d’abord, l’enjeu pour nos décideurs actuels et futurs est de garantir un digne vieillissement de nos aînés – 30,2 % de notre population seront du 3e âge dans 40 ans, de quoi faire bondir les propriétaires d’autobus ou ceux responsables de la gestion de notre fonds de pension. Ce chamboulement de la structure d’âge requiert une adaptation de toute la société et devra être pensé et préparé dès maintenant de manière holistique. Les conditions doivent être réunies pour assurer des soins de santé spécialisés, des infrastructures et des loisirs appropriés, un niveau de sécurité intérieure renforcé, un urbanisme et une ambiance propices au vieillissement.

Un premier constat qui nous saute aux yeux en lisant le rapport : alors que le vieillissement de notre population et l’espérance de vie progressent, la croissance démographique, elle, sera négative à partir de 2032. Ce qui sousentend que de moins en moins de jeunes ou personnes issues de la population active devront prendre en charge de plus en plus de personnes âgées.

Cette transition démographique va bien évidemment impacter nos services de santé, surtout si nos infirmiers et médecins continuent, après leur formation chez nous, d’émigrer vers le Nord, où le manque de professionnels de la santé est un problème croissant, voire alarmant. À titre d’exemple, l’Allemagne seule compte actuellement plus de 2 millions de personnes en dépendance et d’ici à 2050 ce nombre va atteindre 4,5 millions. Selon les calculs des experts, l’Allemagne aura besoin de 783 000 personnels supplémentaires dans ses centres de santé et à ce jour personne ne sait d’où viendront ces forces supplémentaires…

Il devient limpide que nous aurons besoin de mobiliser toutes nos ressources humaines pour prendre soin de nos aînés. Pour cela, il importe d’arrêter le «brain drain» qui exporte un nombre inquiétant de nos meilleurs cerveaux vers les pays riches. Et pour que ceux-ci restent à Maurice, ou reviennent, il faut que les vieux réflexes de nos vieux dirigeants et les mentalités et clivages changent. Le monde change, la population changera, notre système politique, lui, reste figé, comme une statue en bronze sur le front de mer. On a besoin urgemment que nos dinosaures politiques cèdent leur place aux jeunes pour prendre en charge, dès maintenant, les défis de demain, afin d’assurer une retraite paisible et méritée à ceux qui nous ont mis sur cette terre…