C’est effectivement une bonne chose, l’introduction du permis à points. Dans le sondage de lexpress. mu, ils sont d’ailleurs 70 % d’internautes, au mercredi 16 janvier à midi, à se prononcer en faveur de cette mesure. Cependant, comme l’ont souligné de nombreux automobilistes, un mode de vie dépend de ce que la société vous offre en termes d’infrastructures et de facilités. C’est, aujourd’hui, le grand défi de la société mauricienne. On nous impose la modernité alors que la société, elle-même, fonctionne selon des archaïsmes.

Il y a un soupçon idéologique qui s’est installé. Les règles ne s’appliqueraient- elles qu’aux citoyens lambda ? On distribue des points. Normalement, c’est un procédé qui sert à récompenser quelqu’un, à reconnaître ses mérites et dans, le pire des cas, à l’évaluer à la baisse. Désormais, nous sommes dans un processus où les points sont des pénalités.

C’est un moyen de vous mettre hors du circuit.

Personne ne le conteste, les routes font trop de victimes. Il faut donc prendre des mesures.

Décourager ces automobilistes inconscients et insouciants. Mais, une fois de plus, la question se pose : comment mettre en équation un mode de vie avec ce que la vie, elle- même, nous propose ? Une vie qui semble bien souvent injuste.

Car, elle applique ses lois en fonction des personnes qui se présentent à elle. La critique vient de ceux qui sont déçus ou impuissants, dit- on. Peut- être. Ce n’est toutefois pas un hasard si on parle, à présent, de l’indice du bonheur, par exemple. Tout peut être comptabilisé.

La part du hasard et de la contingence a disparu. Il n’y a de réel que ce qui peut fi gurer dans des schémas. Dans le monde du travail, la même logique s’applique depuis des décennies.

On mesure, on calcule et souvent, à la fin de l’exercice, on vire.

La peur s’est installée. Il faut prétendre être heureux pour gagner des points. Il faut se montrer performant pour gagner des points. Il faut savoir conduire pour ne pas perdre des points.

La vie déroule et on se dépouille du bonheur.

Parce qu’il y a cette obsession de ne pas être à la hauteur. Chacun est sur ses gardes. Chacun surveille l’autre. Chacun veut surtout sauver sa peau. On manipule même la parole pour en faire une arme qui va blesser l’autre.

Le monde pouvait avoir un autre visage.

Sans faire preuve d’angélisme, on aurait pu s’attendre à plus de solidarité. S’attendre à une vie qui ne se mesure pas en points ou en indices. Mais, nous sommes dans une autre logique. Nous sommes dans l’oubli de ce qui nous fait.