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Viv to mauricianisme !

29 novembre 2009, 06:12

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Il y a des portes qu’il vaut mieux ne pas ouvrir en politique. Mais malheureusement, nos politiciens   avides de marquer quelques points auprès de certains électorats   cèdent systématiquement à la tentation de s’y engouffrer. Xavier Duval ne déroge pas à la règle. Dimanche dernier, lors de la célébration du 155e anniversaire du temple tamoul Kaylasson à Port-Louis, il a fait la démonstration que le gouvernement pratique toujours obstinément le clientélisme ethnique. Au passage, Duval décrédibilise également le Festival International Kreol (FIK). Expliquons-nous…
 

A Kaylasson, le ministre du Tourisme a annoncé, sous la clameur, la tenue, en avril prochain, d’un Festival Tamoul, coïncidant avec Varusha Pirappu, le nouvel an tamoul. L’annonce aurait pu être banale. Mais l’explication de Duval perturbe. « Parey couma nou fine demar festival kreol», a-t-il tenu à préciser pour justifier la création du festival tamoul. Ainsi les festivals organisés dans le pays obéissent à une logique de clientélisme ethnique. A ce titre, doit-on donc s’attendre à la naissance d’un festival hindou, islamique ou chinois ?
 

Ce ne serait en rien étonnant. Car les mêmes causes produisent les mêmes effets. En effet, toute décision du pouvoir perçue comme étant avantageuse à une communauté déclenche immédiatement des revendications chez d’autres à Maurice. On l’a vu avec les «Speaking Unions». Initialement pensées comme des institutions pour la promotion de nos langues ancestrales, elles sont vite devenues des administrations totems, symboles du pouvoir de telle ou telle ethnie. La même logique a été suivie dans l’élaboration des «Cultural Centres». Pour l’heure il n’existe que le centre Mandela, le centre islamique ainsi que le centre tamoul en gestation. Mais on peut raisonnablement s’attendre à ce que d’autres centres culturels soient mis en chantier à l’approche des élections.
 

En attendant, attardons-nous sur le FIK. La déclaration de Duval est lourde de sens. Car elle ôte au festival la dimension nationale et trans-ethnique qu’on voulait lui donner à l’origine. Si le Festival Tamoul célèbre la culture, l’histoire, la danse ou la contribution de la communauté tamoule à Maurice, on va devoir conclure que le FIK ne célèbre la richesse que d’une communauté. Les propos de Duval poussent à cette conclusion….
 

L’élan unitaire – «mauricianiste»   qui avait été célébré lors de la première édition du FIK en 2006 se désagrège. A l’époque, on avait envie de se dire «tous créoles». Mais Xavier Duval vient nous rappeler en 2009 que c’est peine perdue, car chacun aura «son festival». On n’a qu’à se dire comme à l’ancienne, «tous hindous», «tous musulmans»  etc…

 
C’est paradoxal, ce sont les «cautions créoles» du FIK qui dénoncent subtilement le tournant ethnique que prend cette manifestation à Maurice. Cette semaine, notre confrère Week-End Scope cite deux artistes créoles : «Je ne me retrouve pas dans ce concept ( ndlr viv to créolité) car il y a trop de confusion. La créolité est une définition controversable, il y a trop de manipulation autour de ça», prévient Marousia Bouvery. Tandis qu’Eric Triton, dans le même article, dit sa confusion. Vit-il sa créolité ou vit-il son mauricianisme ? «C''est le mauricianisme qui l'emporte», tranche-t-il. Nous sommes à des années lumière de l’approche clientéliste de Xavier Duval.

 
C’est à se demander si nos politiques, en élaborant leurs ciblages ethniques écoutent ceux là mêmes qu’ils sont censés séduire à travers leurs festivals. En effet, combien sommes-nous à vouloir une multiplication de festivals ethniques ? Et combien d’entre nous jugeons davantage utile de n’avoir qu’un seul grand festival national – qu’il s’appelle FIK ou pas   célébrant la diversité culturelle, cultuelle et historique des Mauriciens. C’est le seul festival qui vaille le coup d’être organisé. Tous les autres ne sont que de vulgaires opérations visant à grappiller un peu de sympathie. A Xavier Duval, il faut dire « Viv to mauricianisme ! »

Rabin BHUJUN