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Kronik KC Ranzé

Infrastructures: Ça va tenir ?

30 mars 2025, 03:49

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Infrastructures: Ça va tenir ?

Cela ne peut impacter que nous !

Vous avez donc dû, comme nous, avoir des raisons de vous plaindre des services de téléphone et d’internet récemment ? Le phénomène est épisodique et l’échantillon anecdotique, mais quel que soit le fournisseur de service, les conversations téléphoniques sont assez régulièrement saccadées et donc incomplètes, les appels se terminent involontairement et les écrans affichent laborieusement le message : «Reconnecting» ; un message qui, par ailleurs, ne se concrétise que rarement… D’autre part, c’est plus qu’une impression que les signaux internet sont ‘plus faibles’, puisque les connexions au modem, longtemps stables, doivent maintenant être assez régulièrement rétablies manuellement dans ‘Settings’.

Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond et auquel il ne faut pas s’habituer.

D’autant que les télécommunications étaient, jusqu’à récemment, et de loin, le service le plus performant du pays ; les autres grinçant, crissant et menaçant de céder…

On connaît le service d’approvisionnement en eau, bien sûr ! Sur le lit doré d’une promesse 24/7, on a dépensé beaucoup d’argent et remplacé des kilomètres de tuyaux en mauvais état, mais le taux de perdition a AUGMENTE, passant d’environ 58 % à 62 % en dix ans! Devons-nous conclure que les nouveaux tuyaux perdent plus d’eau qu’auparavant ?

Ce qui est certain c’est que l’année 2015 avait commencé avec plein d’espoir. Le titre de couverture du rapport annuel CWA était: TIME FOR CHANGE ! Possiblement sur la base d’un accord signé en 2013 entre le ministère de l’Energie et la Singapore Cooperation Enterprise (SCE) pour une réduction des fuites dans l’une des six zones d’approvisionnement de la CWA, c.-à-d. le Upper Mare aux Vacoas Zone où les taux de perdition étaient alors de 59 %. L’objectif de ce seul projet qui «revolves around Rs 1 billion» nous dit le rapport annuel 2015 de la CWA, était de réduire la perdition à 44 %. Je n’ai pas pu localiser le rapport final et ses résultats…, mais ce qui est connu, c’est que les équipes de la CWA ont, une fois formées par SCE et ses partenaires, assumé l’avenir, le projet de privatisation envisagé avec Suez-Lyonnaise en 2018, ayant été torpillé notamment par les syndicats (*) et le gouvernement reculant alors avec mollesse.

Le choix était fait : le privé ayant besoin de profits et donc de prix ‘économiques’, le gouvernement choisissait plutôt le statu quo et le ‘fer semblan’ avec des subventions grandissantes à la clé, tant pour couvrir les pertes que pour ‘développer’ les services de la CWA… Résultat ? La CWA doit Rs 3,9 milliards et ne peut rembourser ses dettes ! Qui va rembourser, vous croyez, si ce n’est nous-même qui payons les taxes et la TVA ?

Tous les choix ont des conséquences. Pour ne pas payer l’eau plus cher, est-on toujours prêt à y accéder de manière plutôt hasardeuse chaque année et à laisser le poids financier inévitable continuer à grever le budget central ?

M. le ministre Assirvaden nous fera peut être, un jour, bientôt, un bilan exhaustif et transparent de la décade perdue depuis 2015, de nos succès et de nos défaites, des coûts et des conséquences ainsi que de son plan de «changement» à lui ?

Ce qui est certain, c’est qu’il ne s’agit pas seulement des Rs 700 millions récents de Maunthoorah censés remplacer 437 kms de tuyaux, loin de là, mais d’une foirade globale qui dure depuis longtemps, qui coûte de plus en plus cher et qui amenait à terme, le PM Pravind Jugnauth à déclarer, mine grise, que ‘dilo 24/7’ ne voulait pas nécessairement dire de l’eau accessible… 24 heures par jour, 7 jours sur 7 !

Ce que 24/7 voulait effectivement dire est resté plutôt mystérieux…, ce qui ne l’a sûrement pas aidé lors du 60/0 des dernières élections !

Au téléphone, à l’internet et à l’eau, ajoutons maintenant l’électricité aussi !

Dans le bilan laissé par le gouvernement précédent, on a tellement farfouillé avec les décisions pourtant vitales de production énergétique, que cet été on a frôlé la catastrophe et même vécu quelques mini-délestages, n’était-ce une campagne in extremis pour consommer moins en période de pointe. Certains moteurs, trop vieux, méritaient d’être remplacés depuis longtemps. La maintenance se fait plus rarement que nécessaire, puisque l’on a besoin de toutes les capacités disponibles, en quasi permanence, pour répondre à la demande de pointe. L’ambition de se défaire du charbon et de produire 60 % d’énergie renouvelable à horizon 2030 est définitivement plombée à l’heure qu’il est, ce pourcentage ayant BAISSE de 24 % en 2020 à 19,2 % en 2022 et 17,2 % en 2023 ! C’est, dès lors, stupéfiant de lire le PS du ministère écrire, dans le rapport annuel de 2023-24 que ces objectifs sont «well under way» !?

Quelles sont les décisions pour l’avenir, maintenant que nous avons pris tellement de retard au niveau de la production et que la demande (surtout de pointe…) n’a attendu personne ? Les contrats des IPPs qui ont quand même fourni jusqu’à 47 % des ressources énergétiques, bon an mal an, lors de ces 30 dernières années, à la demande du gouvernement d’ailleurs qui – rappelons-le – ne croyait pas alors possible que le CEB puisse investir autant, vont-ils être renouvelés? Cela paraît inévitable, maintenant que le pays est coincé par le temps ! Le charbon sera-t-il, in extremis, remplacé par des copeaux de bois, plus chers, ou du fatak, pour assouvir les objectifs du renouvelable ? Aurons-nous droit à la transparence des contrats cette fois-ci au moins, même si pour Agaléga, ça semble enfin, contredisant Mme Sushma Swaraj, ancienne ministre des Affaires étrangères de l’Inde, passablement… foutu ?

Ou allons-nous désormais entendre l’ancien gouvernement, devenue la nouvelle opposition, réclamer, à son tour, que l’on publie l’accord Agaléga «en toute transparence» ?

Ce ne serait pas le comble…

Parmi les autres infrastructures nationales, notons le port, dont la productivité améliorée va être cruciale pour la fiabilité de nos connexions maritimes ; l’aéroport – Airport Holdings devant répondre à la demande grandissante, notamment avec une nouvelle tour de contrôle engluée dans la controverse et MK qui saigne toujours ; le contrôle des déchets (la promesse de l’ancien gouvernement étant que, grâce à l’économie circulaire, il y aurait 70 % déchets en moins(**) à Mare-Chicose jusqu’en 2030 et finalement les routes qui méritent d’être rafistolées dans de nombreux endroits, y compris sur certaines de nos routes principales et qui demandent à être étendues rapidement pour tenter, au moins, d’inverser un ratio de véhicules par kilomètre de route qui atteignait déjà 212 en 2022 versus… 59 en 1989.

Ajoutons-y la Wastewater Management Ltd dont les résultats ne sonnent pas non plus à gloire. Un peu comme à la CWA, le gouvernement a choisi de ne pas augmenter les tarifs facturés depuis plus qu’une décade, créant ainsi un déficit grandissant de Rs 443 m pour des revenus de… Rs 499 m, pour l’année 2022/23. Cette année-là, la WMA complétait seulement 4 projets totalisant Rs 373 m, signait 3 nouveaux contrats pour Rs 215 m et gérait 15 projets ‘ongoing’. Et empruntait déjà Rs 4,4 milliards, sans espoir d’équilibrer ses comptes…

La réalité des coûts, c’est pour quand ?

Pour boucler la boucle, comment ne pas mentionner les drains qui ont occupé tant d’attention dans les budgets de ces dernières années ? En effet un budget de 3 ans de Rs 11,7 milliards pour 1 700 projets, voté en 2021, montrait apparemment, à l’arrivée, 596 projets complétés (35 %) pour Rs 4,9 milliards (42 %), rien n’étant cependant précisé sur la qualité des travaux ou sur leur fonctionnalité ; les bassins de rétention, par exemple, se remplissant forcément de boue à chaque grande pluie, diminuant ainsi les capacités de… rétention ! On s’y est préparé ?

En conclusion, l’héritage que nous laisse le gouvernement sortant sur le plan des infrastructures, comporte d’énormes lacunes et de très nombreux défis. En partie parce que l’on choisissait d’investir ailleurs, comme dans le métro (Rs 35 milliards), Safe City (Rs 21 milliards) ou Côte d’Or (Rs 6 milliards).

L’ironie veut que ce seront les nouveaux dirigeants qui seront, dans pas longtemps, si ce n’est déjà le cas, interpellés sur les améliorations qu’ils auront été capables d’apporter à l’héritage Lepep…

Le Performance Based Budgeting (PBB) voté au Parlement en mars réintroduit un procédé initié en 2008/09 par Rama Sithanen et aboli par Pravind Jugnauth, quand il était ministre des Finances, car estimé trop ‘compliqué’. Cette structure rend les ministres et les bureaucrates principaux directement redevables des dépenses budgétaires votées et arrive à propos quand on constate, à nouveau, le rapport du directeur de l’Audit qui souligne un fout-pas-malisme général menant, typiquement, à ce que seulement 38 % des recommandations de l’an dernier aient été concrétisées ! La même attitude, doublée de considérations tant népotiques qu’électoralistes, menait au constat que des 8 000 maisons NSLD qui devaient être livrées en septembre 2024, seulement 38 (0,5 %) l’ont été effectivement, alors que les autorités ‘responsables’ suggéraient plutôt 796 unités au Directeur de l’Audit (10 %)…

IL FAUDRA CHANGER ! Pour ne pas mourir couillon…

D’autant plus que l’infrastructure humaine, de son côté, se zombiefie (***),…


(*) https://defimedia.info/radhakrisnasadien-privatisation-has-always-resultedhigher-prices

(**) https://edbmauritius.org/renewable-energy

(***) https://lexpress.mu/s/les-grands-titres-de-lexpress-de-ce-jeudi27-mars-2025-543725

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