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Kevin Perticots, footballeur

«J’ai dû choisir entre le travail et le sport»

16 septembre 2023, 20:00

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«J’ai dû choisir entre le travail et le sport»

Ce jeune homme de 27 ans, qui a été le chouchou des Mauriciens pendant les Jeux des îles de l’océan Indien (JIOI) en 2019, a dû choisir son travail au détriment du football lors des derniers JIOI, qui se sont tenus à Madagascar. Kevin Perticots revient sans détour sur sa passion et sur ses contraintes…

Vous n’avez pas participé aux JIOI, cette année, alors que vous étiez la star de ces jeux en 2019. Pourquoi ?

La raison est simple : j’ai pris de l’emploi au Central Electricity Board (CEB) et j’ai dû faire un choix difficile. Cela alors que je figurais sur la liste des sélectionnés et que j’ai participé à tous les entraînements. J’ai expliqué ma situation aux entraîneurs, qui m’ont affirmé que j’avais le droit d’être released de mon travail pour y participer. Toutefois, si je me blessais pendant les jeux, j’aurais dû prendre un congé de maladie, étant donné que je suis toujours à l’essai, je n’ai pas droit à ce congé. Je ne pouvais prendre un tel risque.

Vous le dites vous-même, le football ne nourrit pas son homme…

Oui effectivement. L’avenir dans le football est compliqué. Il y a de bons moments comme de mauvais moments. Il y a des cas où des footballeurs, qui évoluent au sein des certains clubs, ne perçoivent pas de salaire mensuel. Si vous n’avez pas un travail à côté, la vie est compliquée…

Que faites-vous actuellement au niveau du sport ?

Depuis 2015, j’évolue au sein du Pamplemousses SC mais j’ai décidé, il y a un mois, de prendre un nouveau challenge, qui est celui d’intégrer un autre club, La Cure Waves. On m’a approché, on m’a expliqué le projet et je me suis laissé tenter par cette nouvelle aventure. On verra par la suite. Mon objectif demeure le même, à savoir celui de remporter des coupes pour mon club, aider ma nouvelle équipe à remporter les championnats. Le travail continue et mo pou manz ar li...

Pensez-vous que le sport, en particulier les sportifs, ne sont pas suffisamment valorisés dans le pays ?

Comme je vous l’ai dit avant, le football ne paie pas, le jeune doit travailler, accepter un emploi à côté pour pouvoir progresser dans sa vie. Les sportifs ne sont pas valorisés dans le sens où pour arriver à un haut niveau, il faut beaucoup de sacrifices, comme négliger sa vie de famille, ses entraînements et tout ce qui vient avec pour aller représenter son pays et faire briller le quadricolore. À quelles fins ? Pou gagn zis enn mersi boukou ek apre zot blie ou ? Les sportifs en général, et pas juste les footballeurs, n’obtiennent aucune reconnaissance par rapport au travail qu’ils abattent. Si vous voulez réussir dans la vie, vous ne pourrez le faire en comptant uniquement sur le sport.

C’est ce qui s’est passé dans votre cas ?

Oui, c’est ce qui s’est passé avec moi. Avant les JIOI de 2019, ils m’ont beaucoup encouragé. Ils m’ont dit que mes efforts allaient payer mais après les jeux, il n’en a été rien. Il y a eu des promesses mais je n’ai rien vu à mon niveau. Ils m’ont promis du travail, une maison, mais après quand j’ai cherché ces personnes, elles n’étaient plus là pour moi.

Le foot ne permettant pas de subvenir à ses besoins, est-ce pour cette raison que certains se tournent vers le trafic de drogue ?

Cela ne concerne pas uniquement les footballeurs mais aussi les autres sportifs. Certains n’ont pas fait de grandes études et se sont tournés vers le sport pour faire quelque chose de bien dans leur vie. Puis, ils découvrent qu’ils n’iront pas très loin avec le sport. Comme je l’ai dit, il y a des clubs qui ratent le salaire mensuel, c’est à ce moment que quelques-uns décident de se tourner vers le trafic de drogue, qui est un moyen rapide de se faire de l’argent.

Quel est, selon vous, l’avenir du football à Maurice ? Y a-t-il des opportunités pour les jeunes qui aspirent à y jouer ?

Il y a des possibilités à Maurice. Par exemple, avec l’académie de Liverpool, les jeunes ont l’opportunité de faire des stages à l’étranger, en Angleterre. Ils peuvent percer dans le football à l’international. Leurs efforts ne sont alors pas vains, ils sont récompensés par la suite. De plus, pour que le football se fasse une place à Maurice, il faut davantage d’infrastructures, d’investissements et d’encadrement. Pour que les jeunes puissent vouloir se tourner vers le sport, il faut qu’ils soient stables mais pas que l’on ajoute du stress et des problèmes supplémentaires sur leur tête. Zot bizin alez dan seki zot pe fer…Nous avons des talents à Maurice.

Plusieurs footballeurs mauriciens ont eu l’occasion de poursuivre leur carrière à La Réunion, qu’en pensez-vous ?

La Réunion a un bon niveau. Il y a beaucoup plus d’opportunités là-bas qu’ici. Si un footballeur a la possibilité d’aller évoluer à l’île Sœur, je l’encourage à foncer, à saisir cette belle opportunité.

Avez-vous l’intention de participer aux JIOI de 2027 ou aux éliminatoires la Coupe du monde contre le Cameroun en novembre prochain ?

Oui, définitivement, je le ferai si j’ai cette chance. Le football est dans mon sang et fait partie intégrante de ma vie. Je ne pourrai m’arrêter, ni l’abandonner. Si les critères sont favorables, je donnerais tout pour mon pays.