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Jean Claude de l’Estrac: «Il faut de nouvelles têtes à tous les échelons de la hiérarchie politique»
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Jean Claude de l’Estrac: «Il faut de nouvelles têtes à tous les échelons de la hiérarchie politique»
Jean Claude de l’Estrac, observateur politique.
La campagne électorale semble se précipiter. Sinon, comment expliquer que le gouvernement tire ses munitions dès à présent, alors que ces «douceurs», comme la pension à Rs 13 500, ont une date de péremption très courte ? Si les anciens, des politiciens d’expérience mais âgés, seront encore de la bataille cette année, au vu du besoin de changement des électeurs, ils devraient s’entourer de nouvelles têtes et préparer la relève, estime Jean Claude de l’Estrac.
L’on s’agite beaucoup dans le landerneau politique, êtes-vous de ceux qui pensent que les élections se tiendront plus rapidement que prévu initialement ?
Sans doute ! Ce qui a changé la donne calendaire, c’est l’obligation légale pour le gouvernement de tenir une élection partielle suite à la vacance parlementaire provoquée par la révocation inexpliquée de l’ancien ministre Hurdoyal, ou de tenir plus rapidement des législatives pour l’éviter. Aucun esprit avisé ne prévoit une partielle à si haut risque pour le pouvoir à quelques mois des échéances nationales.
C’est ce qui expliquerait, selon vous, l’accélération de la distribution des douceurs électorales ?
C’est une hypothèse. Je ne vois pas l’intérêt du gouvernement d’épuiser ses munitions électorales, notamment l’augmentation de la pension de vieillesse, s’il ne peut pas capitaliser sur ses bonnes retombées dans le court terme. Ce genre de douceur possède une date de péremption très courte. Une tournée au supermarché peut annuler l’essentiel du feelgood factor.
Il y a peut-être une autre explication. On pourra dire que j’ai un esprit tortueux. Mais je connais assez bien le monde de la politique. Les mesures populaires annoncées ces jours-ci le sont par Pravind Jugnauth. Il en tire une gloriole politique. Celles qui pourraient être annoncées dans un discours du budget seront celles de Padayachy. On parlera après du budget Padayachy comme hier on parlait des budgets Lutchmeenaraidoo ou Sithanen. Mais on a bien vu combien Jugnauth garde ses ministres dans l’ombre et combien eux-mêmes disent n’exister que par le patron…
Pendant ce temps, ne trouvez-vous pas que l’opposition parlementaire qui se présente en alternance peine à s’imposer ?
C’est bien l’impression que l’on a mais il y a une explication à ce démarrage lent. Un plan à trois est parfois compliqué. Il semblerait que la répartition des investitures, une question sensible, soit maintenant bouclée. Mais nous n’avons pas encore eu droit à une annonce officielle de la concrétisation de cette alliance.
Entre-temps en termes d’investiture, c’est le Parti travailliste le grand gagnant ?
Je ne suis pas choqué par le nombre relativement élevé d’investitures obtenues par Navin Ramgoolam. Pour deux raisons : la première est que le leader de cette alliance, Premier ministre désigné, doit s’assurer d’une majorité parlementaire ; la deuxième raison est encore plus déterminante. Compte tenu de la configuration des circonscriptions, et se basant sur les résultats des dernières élections, il est clair que le Parti travailliste se trouvera souvent sur les fronts les plus hasardeux même s’il est vrai que l’apport du MMM renforce nettement les chances de leur alliance.
Il paraît que certains dirigeants du PMSD ne sont pas satisfaits du nombre d’investitures obtenues. Ce qui provoque des spéculations sur un possible réalignement du parti. Qu’en pensez-vous ?
Je ne crois pas Xavier Duval suicidaire. Le PMSD pourrait effectivement obtenir trois fois plus de tickets chez le MSM. Mais avec trois fois moins de chances de faire élire ses candidats. La problématique des investitures est à double volet : le nombre et l’électibilité. Et puis se pose pour Duval un problème de moralité et de crédibilité quand on connaît les raisons de sa démission du gouvernement Jugnauth.
Vous n’avez pas cessé dans des déclarations publiques d’appeler l’opposition parlementaire à se positionner en gouvernement de transition face au MSM et à ses alliés. Qu’entendez-vous exactement par cette formule ?
Ma réflexion tire son origine d’un constat que personne ne conteste. Il y a dans le pays l’aspiration à un renouveau politique. Ce désir de changement est très marqué chez les jeunes électeurs. On a pu le constater, sondage après sondage.
Or, on ne peut pas dire que le trio de tête de l’alliance de l’opposition parlementaire, Ramgoolam, Bérenger et même Duval, compte tenu de leur âge, et surtout de leur longévité sur la scène politique, est capable d’incarner le renouveau et le changement. Mais ce sont ces dirigeants qui vont quand même conduire la prochaine bataille électorale face au pouvoir. Cette bataille sera rude, elle n’est pas à la portée des partis non parlementaires qui peinent à émerger et qui ne feront qu’éparpiller les voix des électeurs de l’opposition.
Et Pravind Jugnauth a de solides arguments…
Il ne reste qu’une option : que les anciens, des hommes politiques d’expérience par ailleurs, s’entourent de nouvelles têtes, à tous les échelons de la hiérarchie politique ; qu’ils disent clairement se présenter pour préparer la relève, qu’ils conduisent de fait une élection de transition. Forte de cette audace, l’opposition augmenterait considérablement ses chances électorales.
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