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Questions à…Keegan Etwaroo
«On n’obtient pas un terrain de l’État sans donner de l’argent»
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Questions à…Keegan Etwaroo
«On n’obtient pas un terrain de l’État sans donner de l’argent»
L’un des dénonciateurs de l’affaire «Stag Party» revient sur ce scandale et maintient qu’il a dit la vérité. Il révèle des détails troublants sur l’implication de l’«Attorney General», Maneesh Gobin, de l’ancien président du Sugar Investment Trust et «Principal Inspector» au «Registry of Associations», Rajesh Ramnarain, et de l’ex-secrétaire parlementaire privé, Rajanah Dhaliah, dans les transactions pour obtenir le bail du terrain de chasse à Grand-Bassin. Keegan Etwaroo souligne que l’enquête en cours suscite des interrogations sur sa lenteur.
Revenons-en au début de cette affaire. Pourquoi avez-vous décidé de vous rendre à l’Independent Commission against Corruption (ICAC)?
C’est Ajay Jeetoo qui s’est d’abord rendu à l’ICAC. Les enquêteurs de l’ICAC ont contacté la secrétaire de l’Eco Deer Park Association, qui ne voulait pas y aller seule. Ajay Jeetoo l’a accompagnée et c’est là qu’il a tout révélé à l’ICAC. Il a mentionné mon nom dans cette affaire et une semaine après, l’ICAC m’a appelé. J’y suis allé volontairement pour donner ma version des faits. Il fallait que j’explique ce qui s’était passé.
Avez-vous une quelconque immunité de l’ICAC ?
Si l’ICAC ne m’avait pas donné des garanties, je n’aurais certainement rien raconté. Les enquêteurs m’ont fait comprendre que je n’aurais aucun problème dans cette affaire, et qu’Ajay Jeetoo et moi serons des témoins dans l’enquête. De toute façon, je n’ai fait que dire la vérité et ce qui s’est passé.
Pourquoi avez-vous accepté de donner de l’argent pour le renouvellement du bail ?
Ce terrain était autrefois occupé par les amis de son père qui, à un certain moment, ne pouvaient plus l’entretenir. Ses amis lui ont proposé d’être actionnaire et de prendre en charge le terrain, et c’est ce que nous avons fait. On n’obtient pas un terrain de l’État sans donner de l’argent. Ils m’avaient demandé Rs 3,5 millions. En vendant mon JCB et d’autres biens, j’ai pu donner Rs 3,2 millions. J’ai donné l’argent en plusieurs tranches entre septembre 2020 et 2021. Je remettais l’argent à Ajay Jeetoo, et c’est lui qui le donnait à Rajesh Ramnarain et à Rajanah Dhaliah dans leurs bureaux. Tous ceux qui souhaitent obtenir un terrain de l’État doivent donner de l’argent. Ce n’est pas un cas isolé, mais personne ne l’avoue.
Revenons sur cette fameuse fête sur le ranch de Grand-Bassin. Étiez-vous présent ?
Des personnes comme moi ne sont pas invitées à ce genre de fête. Ils organisent souvent de telles festivités où seules les VIP sont conviées. Moi, je gérais simplement le ranch et je m’occupais des animaux. Ajay Jeetoo gérait l’Eco Deer Park Association et avait des contacts avec ces personnes importantes. C’est lui qui était l’intermédiaire entre elles et moi. Le jour de la fête, j’y suis allé officieusement pour voir ce qui se passait car je devais m’assurer à qui il donnait bien mon argent. J’y étais ; j’ai vu qui étaient présents à la fête. Mo’nn al louké mwa…
«J’ai des cerfs (...) qui sont dans des conditions déplorables et sont en train de mourir»
Maneesh Gobin et Rajanah Dhaliah y étaient-ils ?
Oui, ils y étaient avec d’autres personnes. Il est vrai que ce jour-là, il y avait du whisky et un cerf, mais je ne peux pas en dire plus pour le moment. J’ai déjà fait ma déposition à l’ICAC. C’est à elle d’agir.
Êtes-vous satisfait de la façon dont se déroule cette enquête ?
Rajesh Ramnarain et Rajanah Dhaliah ont déjà été arrêtés… L’enquête prend tout son temps et tarde à mon avis. L’ICAC dispose déjà de tous les éléments, et aurait dû procéder à d’autres arrestations et convocations. Maneesh Gobin était là-bas et est au courant de tout. L’ICAC aurait déjà dû le convoquer ou l’arrêter. L’ICAC doit surtout enquêter sur ces personnes qui réclament de l’argent et non sur celles qui dénoncent. Le dénommé Jeetoo a dénoncé cette affaire, et je n’ai fait que donner ma version des faits.
Qu’en est-il de ce ranch actuellement ?
Après l’arrestation de Shaan Kumar Choolun, le président de l’Eco Deer Park Association, le bail du terrain de chasse de State Land Dayot a été résilié. Le ranch a été placé sous scellés ; donc personne n’y a accès. Les occupants du terrain avaient 48 heures pour évacuer les lieux. Comme Shaan Choolun a été arrêté quelques jours avant pour blanchiment d’argent, il n’a pas pu faire le nécessaire pour l’évacuation du ranch. On aurait dû nous donner au moins trois mois pour retirer tous nos animaux. Depuis avril, nous avons fait une demande auprès du ministère de l’Agro-industrie pour pouvoir faire sortir les animaux, mais jusqu’ici, nous n’avons pas eu la permission. J’ai des cerfs qui valent plus de Rs 2 M sur le ranch, qui sont dans des conditions déplorables et sont en train de mourir. Shaan Kumar Choolun, qui réside au Morne, a déposé une Precautionary Measure au poste de police de Grand-Bassin, en présence de son avocat, Me Yash Bhadain. Shaan Kumar Choolun avait expliqué aux enquêteurs qu’il prendrait possession du terrain car il n’avait reçu aucune ordonnance du tribunal pour quitter les lieux. Mais nous ne pouvons toujours pas le faire. Pourtant, il y a des personnes qui sont en train de tuer les cerfs sur le ranch et les vendent illégalement. Nous n’avons même pas le droit de nous rendre au ranch.
«Des personnes comme moi ne sont pas invitées à ce genre de fête (...) mo’nn al louké mwa…»
Êtes-vous toujours recherché par la police pour tentative de meurtre ?
C’est là encore une autre persécution. Les images des caméras de surveillance ne démontrent aucune tentative de la sorte, et la police ne m’a toujours pas arrêté ni interrogé jusqu’à ce jour. Certains policiers admettent qu’ils ont commis une erreur ce jour-là et qu’il n’y a rien contre moi. On a voulu me piéger, tout comme l’affaire des plants de cannabis dans mes poulaillers. Je maintiens que je gagne très bien ma vie avec mes poules et je n’ai nullement besoin de planter quelques plants de cannabis pour gagner de l’argent. Pendant tout ce tempslà, pourquoi la police n’est-elle jamais venue faire une descente ? Il y a des choses qui sont évidentes.
Regrettez-vous d’avoir dénoncé ces personnes à l’ICAC ?
Depuis cette affaire, ma famille et moi vivons constamment dans la peur. C’est une pression car, à chaque fois, il faut faire attention à ne pas se faire piéger. Après 17 heures, ma mère et mon épouse ne veulent plus que je quitte la maison. Maintenant, il faut aussi faire attention à l’endroit où je gare ma voiture, de peur qu’il y ait d’autres accusations. C’est devenu un stress permanent de vivre ainsi, alors que ceux concernés sont toujours en liberté et ne sont nullement inquiétés. Ma famille est victime de complot.
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