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Législatives post-dissolution

«La France est dans un chaos incroyable…»

12 juin 2024, 20:00

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«La France est dans un chaos incroyable…»

Contre toute attente, la France a rejoint la liste des pays qui se rendent aux urnes pour des élections nationales cette année. Dimanche, le président Emmanuel Macron a dissous le Parlement après la victoire massive de l’extrême droite aux élections européennes. Alors que beaucoup s’interrogent sur cette manœuvre, des conseillers des Français de l’Étranger, pour Maurice, estiment que les résultats ne sont pas si surprenants… Toutefois, les résultats ici ne sont pas tout à fait semblables à ceux de l’Hexagone.

Selon le journal Le Monde, le président français s’attendait à faire un score entre 20 % et 22% aux élections pour les députés du Parlement européen. Mais la liste soutenue par le parti au pouvoir a recueilli 14,6 % des suffrages. Le Rassemblement national (RN), parti d’extrême droite, a fait plus que le double, soit 31,4 %. Dans la foulée, Emmanuel Macron a dissous l’Assemblée pour redonner le pouvoir au peuple de s’exprimer. Cette décision est diversement commentée, même dans ses rangs, d’autant que cette possibilité n’a été évoquée qu’en petit comité avec ses proches collaborateurs, toujours selon Le Monde.

À Maurice, les résultats entre la majorité présidentielle et le RN sont différents. Sur les 10 480 électeurs inscrits, seuls 1 910 Français de l’étranger se sont déplacés aux urnes. Le candidat de l’extrême droite, Jordan Bardella, a eu 348 voix, alors que Valérie Hayer, la candidate de la majorité, est arrivée en tête avec 388 voix. Marion Maréchal Le Pen, autre candidate de l’extrême droite (du parti d’Éric Zemmour), a eu 350 voix. Ce qui fait qu’elle arrive en deuxième position alors qu’en métropole, elle ne fait que 5,47 %. Manon Aubry, de l’extrême gauche, a recueilli 184 voix. François Xavier Bellamy, candidat de la droite traditionnelle, a eu 137 voix alors que celui de la gauche traditionnelle, Raphaël Glucksmann, a eu 221 voix. Mais si l’on ajoute les autres candidats à tendance extrême droite, Asselineau et Philippot, celle-ci obtient tout de même 40 % des suffrages. Toutefois, dans la totalité de la circonscription no 10, qui couvre 46 pays, dont Maurice, c’est la candidate de l’extrême gauche, Manon Aubry, qui est arrivée en tête avec 21,1% des voix.

Comment s’expliquent ces différences ? Charles de Loppinot, conseiller pour les Français de l’étranger à Maurice, pense que les Français résidant à l’étranger ne vivent pas au jour le jour ce qui se passe dans l’Hexagone. «La France est dans un chaos incroyable. Les préoccupations principales du moment tournent autour de la sécurité et de l’immigration. Il y a aussi le pouvoir d’achat.» Xavier Dubourg de la Tour, autre conseiller, tient le même discours. Selon lui, ce résultat aux élections européennes reflète le climat actuel en France. «Les Français ont besoin d’être rassurés. Or, les indicateurs économiques, sécuritaires et sociaux ne vont pas dans le bon sens.» Raison pour laquelle les électeurs ont fait ce choix en particulier. «Ils ont exprimé le rejet d’une Europe qui continue à se détériorer. C’est un vote pour eux et pour leurs enfants», ajoute Xavier Dubourg de la Tour.

Les deux parlent d’une même voix en disant que les résultats ne sont pas une surprise. «D’ailleurs, l’extrême droite dont on parle n’est que la droite, car la droite traditionnelle a doucement migré vers le centre, puis, vers la gauche», fait ressortir Xavier Dubourg de la Tour. Pour lui, il y a un gros travail à faire car pendant des années, il y a eu trop de laisser-aller. Il est rejoint dans ses propos par Charles de Loppinot. «Mon père, qui était fermier, louait des terres pour travailler. Aujourd’hui, il est à la retraite. Lui qui a travaillé pendant toute sa vie, gagne moins qu’un immigré en situation irrégulière.»

Toutes ces raisons, avancent les deux conseillers, expliquent le résultat du Rassemblement national aux élections européennes. Cependant, les deux conseillers ont un avis divergent concernant la dissolution de l’Assemblée nationale, qui a pris le pays par surprise. Xavier Dubourg de la Tour estime qu’Emmanuel Macron a tiré les conclusions qui s’imposent de ces suffrages. «Suite au vote de dimanche dernier, il a estimé que son assemblée ne représentait plus la voix du peuple.» Mais Charles de Loppinot avance qu’à un mois des Jeux Olympiques, ce n’était certainement pas le bon moment pour prendre une telle décision, d’autant plus qu’il y avait d’autres solutions. «Il faut comprendre que c’était des élections européennes, pas nationales. Une telle décision, sans réflexion, est problématique. Le président aurait pu attendre après les jeux. Ou encore, essayer de conclure une alliance avec Les Républicains et durcir un peu sa politique en matière d’immigration. Mais là, nous voyons bien que c’est un président qui est arrivé au pouvoir sans expérience du terrain.»

Quant aux résultats des législatives, qui auront lieu les 30 juin et 7 juillet, ils sont incertains. «C’est la grande question. Est-ce que cela reflétera le vote sanction des résultats européens ? On ne le sait pas encore», dit Xavier Dubourg de la Tour.

Quel impact sur Maurice ?

«Les résultats des élections européennes sont un coup fatal au président Macron», estime Faizal Jeerooburkhan, observateur politique de Think Mauritius. «Il pensait être bien plus à l’aise et a finalement dû donner les élections demandées par le Rassemblement national depuis longtemps.» L’observateur précise que le président français a justifié sa décision par les désordres lors des débats à l’Assemblée nationale française, mais cela semble être un prétexte. «Déjà, il doit faire face à un jeune de 28 ans qui prétend au poste de Premier ministre. Si la droite se rassemble, ce sera encore plus difficile pour lui.» Faizal Jeerooburkhan fait le parallèle avec Maurice, où les élections municipales ont toujours été refusées par le pouvoir en place, et que la date des élections générales est jalousement gardée. «Est-ce que le Premier ministre subira le même sort ? On verra.» Le problème de la France, estime-t-il, est que la richesse nationale n’est pas équitablement partagée. Cela se répète dans d’autres pays comme l’Italie et l’Allemagne, voire Maurice. «Par opposition, dans les pays nordiques comme la Suède, le Danemark et la Finlande, où la distribution est équitable et les écarts entre les riches et les pauvres sont moins importants, ceux avec un programme nationaliste ont moins de chance.» De plus, ces pays font face à une immigration massive, qui cause un débalancement social. Si le gouvernement français passe à droite, il y aura indéniablement un impact sur Maurice, dit-il, car les deux pays ont des liens étroits. «Beaucoup de piliers de l’économie reposent sur la France, comme le tourisme ou l’investissement à travers l’immobilier.» Les gouvernements de droite, poursuit-il, ont une autre approche envers les pays en voie de développement. «Il se peut que la politique en matière de mouvements ou de financements soit durcie, ce qui aura certainement un impact économique et social sur Maurice.»

Source France Diplomatie .png

(Pour les candidats minoritaires : Toussaint, Governatori et Wehrling sont des écologistes, Thouy est du parti animaliste, qui défend les animaux, le chanteur Francis Lalanne a eu une voix, Alexandre est pro-européen, Jean Lassalle est de l’Alliance rurale. Arthaud est de Lutte ouvrière, Deffontaines est communiste.)