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Questions à... Olivier Chavy

«La politique tarifaire des compagnies aériennes devrait être mieux alignée sur la saisonnalité et la demande»

5 février 2025, 18:02

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«La politique tarifaire des compagnies aériennes devrait être mieux alignée sur la saisonnalité et la demande»

Olivier Chavy ,Chief Executive Officer de The LUX Collective

Le CEO de The LUX Collective revient sur l’impact de la politique tarifaire des compagnies aériennes sur l’industrie hôtelière. Selon lui, cette politique devrait être mieux ajustée à la saisonnalité et à la demande, pour éviter des disparités avec la stratégie des hôteliers. Si Maurice a retrouvé ses taux d’occupation d’avant la pandémie, la concurrence reste rude et les défis environnementaux et sociaux sont au cœur des préoccupations. Olivier Chavy souligne également l’importance de maintenir une synergie entre les différents acteurs du secteur et de veiller à la formation et à la rétention des talents pour éviter les pénuries de main-d’œuvre.

En termes de taux d’occupation et de revenus, avez-vous retrouvé les niveaux d’avant la pandémie ?

Oui, aussi bien en volume qu’en recettes moyennes. Nous avons retrouvé des niveaux prépandémie, notamment grâce aux voyages dits revenge travel, avec une clientèle qui revient. C’est très encourageant. Ce qui est particulièrement intéressant, c’est que ces performances ont été enregistrées pendant les basses saisons. Nous avons réalisé d’excellents résultats en juin, juillet, août et septembre, bien au-delà des niveaux pré-Covid, alors qu’en novembre, décembre et janvier, nous étions en-dessous. En moyenne sur l’année, nous restons au-dessus des niveaux d’avant la pandémie.

D’où vient principalement votre clientèle et avez-vous observé des changements récents dans sa provenance ?

Des pays émergents comme la Russie, l’Arabie saoudite et l’Afrique du Sud prennent une place importante. En revanche, la clientèle chinoise n’est pas encore revenue. La clientèle indienne, quant à elle, continue d’affluer grâce au hub d’Air Mauritius. Sur les marchés français, anglais et allemand, ainsi que sur le segment des tour-opérateurs, nous enregistrons de bons résultats.

Croyez-vous que le marché hôtelier à Maurice soit saturé ?

Le taux d’occupation ainsi que les arrivées à Maurice sont en hausse. Je ne pense donc pas que le marché soit saturé. À l’échelle mondiale, la demande touristique progresse de 6 % par an, tandis que l’offre augmente de 4 %, ce qui laisse de la place pour de nouveaux hôtels. Cette dynamique s’applique également à Maurice, où la demande suit la croissance des arrivées. Par ailleurs, la dépense moyenne par touriste a augmenté. Certains hôtels peuvent enregistrer un taux d’occupation plus faible, mais avec des recettes moyennes plus élevées. Avec une bonne stratégie marketing et un positionnement efficace, la saturation ne devrait pas être un problème.

Toutefois, il est essentiel que tous les acteurs du tourisme – compagnies aériennes, ground handlers, hôteliers – travaillent en synergie pour éviter un effet de saturation. L’aérien est un maillon clé car sans lui, nous ne pouvons rien faire, et inversement. Les réglementations strictes en matière de développement hôtelier limitent également les risques de saturation. Celle-ci ne deviendrait un problème que si des projets étaient lancés sans vision ni cohérence. Pour l’instant, le nombre de chambres évolue en parallèle avec l’augmentation des arrivées. Sommes-nous proches d’un seuil critique ? Difficile à dire.

L’engagement environnemental et social influence-t-il les attentes et l’expérience de vos clients ?

Nous communiquons énormément. Il n’y a pas que l’environnement à protéger, mais aussi les communautés locales. Chacun de nos hôtels est très impliqué auprès d’elles. Nous soutenons, entre autres, les petits villages de pêcheurs et les enfants. Chaque client est ainsi sensibilisé. À Grand-Gaube, par exemple, nous emmenons les enfants de nos clients visiter des ruches pour leur faire découvrir l’activité des abeilles. Nous produisons aujourd’hui 400 kg de miel. Dans certains de nos hôtels, nous avons également une junk gallery, où les enfants transforment en œuvres d’art des objets qu’ils ramassent sur les plages. L’expérience de nos clients intègre ainsi pleinement ces dimensions environnementales et sociales.

Comment évaluez-vous la stratégie actuelle de l’industrie hôtelière pour répondre à la demande croissante et diversifier l’offre d’hébergement ?

La concurrence est féroce. Nous avons les Seychelles, Zanzibar, les Maldives… Chaque destination resort possède ses propres atouts. L’accès et les infrastructures jouent un rôle crucial. Les facilités aéroportuaires, le nombre de licences accordées aux compagnies aériennes et la fréquence des rotations via les grands hubs sont des éléments essentiels pour soutenir la croissance du secteur hôtelier à Maurice.

Quelles sont, selon vous, les principales opportunités et défis pour l’avenir du tourisme à Maurice ?

L’opportunité réside dans une meilleure coordination des stratégies entre les différents acteurs du secteur. Cela existe déjà, mais il y a encore des améliorations à apporter. Par exemple, la politique tarifaire des compagnies aériennes devrait être mieux alignée sur la saisonnalité et la demande. Actuellement, on observe des prix très élevés de septembre à décembre, puis une baisse en fin d’année, faute de remplissage suffisant. Or, cela va souvent à l’encontre de la stratégie des hôteliers, qui proposent des offres spéciales en octobre et novembre avant d’augmenter leurs tarifs pour optimiser leurs revenus.

On dit souvent que Maurice est une destination chère. Partagez-vous cet avis ?

Nous sommes aussi chers que les Maldives et les Seychelles. Je ne pense pas que Maurice soit une destination coûteuse lorsqu’on prend en compte l’ensemble de l’expérience offerte dès l’arrivée du client sur l’île. Les prix sont relativement similaires à ceux d’autres destinations concurrentes. Mais Maurice, ce n’est pas seulement une destination, c’est un tout. Les visiteurs s’y sentent en sécurité, le climat y est relativement prévisible, et la population mauricienne est reconnue pour sa gentillesse et son sens du service. Ces atouts font toute la différence par rapport à d’autres destinations.

La dépendance aux marchés touristiques traditionnels est-elle risquée ?

Non, les marchés traditionnels assurent un matelas de business extrêmement important. On ne dépendra jamais assez de ces marchés. Les marchés traditionnels aident à remplir les places dans les avions et les hôtels à Maurice. Ils ont besoin de nous tout comme nous avons besoin d’eux.

Le manque de main-d’œuvre vous affecte-t-il ?

Nous travaillons énormément sur la formation, la rétention, le respect, la bienveillance et la santé mentale, de sorte que nous ne sommes pas en pénurie.

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