Publicité
La pompe ou le gouffre
Ce mardi 15 avril, en pleine PNQ, Joe Lesjongard a voulu rappeler au gouvernement ses propres engagements. Dos au mur, index sur les colonnes du Price Stabilisation Account (PSA), débit rapide, ton sec, Michaël Sik Yuen, ministre du Commerce, a rétorqué : Rs 567 millions d’excédents attendus, oui, mais pour réparer un déficit abyssal de Rs 2,8 milliards. Le PSA, c’est cette caisse invisible qui encaisse ou comble les variations du marché mondial pour éviter au citoyen le yo-yo à la pompe. Mais quand la caisse est vide, c’est le portefeuille du citoyen qui prend.
Mieux encore : la State Trading Corporation (STC) aurait contracté des emprunts de Rs 8,1 milliards en devises étrangères. Pourquoi ? Parce que le pays n’a pas assez de dollars en circulation pour payer ses cargaisons de pétrole. Il ne s’agit plus d’idéologie. Il s’agit d’arithmétique. On ne peut pas baisser les prix quand on importe à perte. Et quand le FMI et Moody’s sont aux aguets, le risque n’est plus seulement économique : il devient systémique.
Alors oui, en théorie, le calcul du prix des carburants est «technique». C’est ce que Kreshan Purmah, président du Petroleum Pricing Committee (PPC), tente d’expliquer avec une pédagogie presque émouvante. Il évoque des moyennes sur six mois, des primes ajoutées par les vendeurs, des taux de fret et des assurances. Il déroule sa formule comme un professeur de mathématiques face à une classe de terminale peu réceptive. Mais la classe ici, c’est le peuple. Et le peuple, lui, ne comprend qu’une chose : le litre d’essence est toujours aussi cher. Pire encore, le pain et le riz ration ne baissent pas non plus. Le caddie est toujours aussi léger, la colère toujours aussi lourde.
C’est là que le Premier ministre sort du bois. Dans une déclaration sobre à l’express hier, Ramgoolam rappelle qu’il a «le courage de dire la vérité». Il martèle que la situation est «pire qu’on ne l’imaginait», qu’il a dû garder les Finances parce que le fardeau est trop lourd pour un simple ministre. C’est une manière élégante de dire : on ne savait pas dans quel gouffre on allait. On promettait des ponts sans avoir vu la rivière.
La politique, c’est facile en campagne. C’est facile d’être généreux quand les caisses sont fermées. C’est facile de dire «on enlèvera la TVA sur les carburants» quand on ne voit pas la courbe de la dette grimper à Rs 644 milliards, soit 90,4 % du PIB. C’est plus difficile quand Moody’s menace de faire passer le pays en catégorie «junk». Plus difficile quand on découvre que gouverner, ce n’est pas distribuer, mais arbitrer.
Ce que cette affaire révèle, c’est le divorce entre la parole politique et la mécanique budgétaire. Le citoyen, lui, ne veut pas de graphiques. Il veut du concret. Il veut une baisse à la pompe, une baisse dans son caddie. Mais en face, le ministre Sik Yuen n’a que des courbes descendantes, des dettes grimpantes, et un Price Stabilisation Account qui peine à respirer.
Publicité
Publicité
Les plus récents




