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Kronik KC Ranzé
La population humaine va s’effondrer…
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Kronik KC Ranzé
La population humaine va s’effondrer…
Pendant des années, sous l’influence des descendants de Malthus et, plus près de nous, sous l’inspiration du Club de Rome et de Paul R. Ehrlich (l’auteur de The Population Bomb), l’humanité a été consciente de et s’est focalisée sur sa démographie galopante qui mènerait à la surexploitation des ressources de la planète, à de la pollution accélérée, à un excès d’urbanisation, et éventuellement à la famine.
Il en résultait les premières prises de conscience écologistes, des efforts substantiels pour améliorer la productivité agricole (et accélérer la révolution verte de Norman Borlaug) et de vastes campagnes de contrôle des naissances.
En Chine la “one child policy” fut imposée sur plusieurs générations avec beaucoup de succès et le taux de remplacement naturel (soit le taux de fertilité moyen des femmes), qui était de 7.51 en 1963, est passé sous le taux de remplacement naturel de 2.1 depuis 1991 et ne cesse de baisser depuis, atteignant même 1.16 en 2021. Ce qui va maintenant causer d’immenses problèmes d’un autre type !
En Inde, l’approche fut différente et consistait à encourager plutôt la stérilisation – tant masculine que féminine –, le gouvernement, au-delà d’offrir gratuitement des préservatifs et des pilules du lendemain, payant 3 000 roupies indiennes à chaque femme qui acceptait d’être stérilisée et 4 000 roupies à chaque homme. Allez donc retrouver les arguments «rationnels» utilisés par les politiciens indiens à l’époque pour expliquer cet exemple de plus de la discrimination des genres ! Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, des 36 États indiens, seuls cinq affichaient, en 2021, un taux de fertilité de plus que 2.1 et de ceux-ci, seul le Bihar montre un taux supérieur à 2.1 tant dans sa partie urbaine que rurale.
L’Inde et la Chine pèsent lourd avec des populations qui s’ajoutent à 2,9 milliards de citoyens, soit 36 % de la population mondiale. Le succès de leurs politiques de contrôle des naissances a été tel que tous les continents proclament maintenant un taux de fertilité de moins que 2.1, à la seule exception de l’Afrique, dont le taux prend aussi une pente descendante, mais qui en est toujours à 4.1 en moyenne en 2024 (Maurice est le pays le moins fertile d’Afrique, à 1.41). Une autre manière de le dire est de souligner que 70 % de la population actuelle vit dans un pays où les naissances sont insuffisantes pour que la population ne baisse pas et que, le continent africain sera le seul à voir progresser sa population jusqu’à la fin du siècle, passant des 1,4 milliard du jour à presque 4 milliards (voir illustration). La population mondiale atteindrait son maximum en 2085 et devrait, ceteris paribus, s’écrouler ensuite.
Pourquoi est-ce important tout ça ?
D’abord, parce que les tendances actuelles laissent voir que presque tous les pays du monde, à part l’exception africaine, vont rapidement devoir confronter des situations où les garderies et les écoles vont se vider alors que les maisons de retraite vont déborder ! Le financement des retraites des vieux de plus en plus nombreux, qui vont vivre de plus en plus longtemps, alors que la production nationale va baisser dans le sillage d’une réduction massive des économiquement actifs, est un défi colossal ! Par ailleurs, s’il y a bien moins de consommateurs, les modèles économiques classiques basés sur la «croissance», vont s’effondrer…
Certains prônent une politique de «faire plus d’enfants», mais aucun pays au monde n’a réussi à faire entendre raison aux familles (ou aux femmes) sur cette question, ni en Chine, ni au Japon, ni en France, ni en Scandinavie… quelles qu’aient pu être les politiques de soutien envisagées pour la natalité.
Les raisons du déclin des naissances sont multiples et l’équation complexe, mais élever un enfant, surtout en milieu urbain, est difficile et coûteux au point où de nombreuses familles optent maintenant pour des animaux domestiques à la place ! Parmi les autres explications de cette baisse de natalité, la révolution sexuelle qui libérait la femme de son rôle prédestiné pendant des siècles… de mère et de ménagère ! Aucun retour en arrière ne semble maintenant possible. Aujourd’hui, la femme souhaite poursuivre son éducation, sa carrière, son plaisir d’être autonome et libre et, selon le documentaire Birth Gap’(*) du démographe Stephen J. Shaw, elles ont aussi tendance à remettre à plus tard leur décision d’avoir des enfants… et puis, pris dans l’engrenage, il est souvent trop tard ! Sans compter que la probabilité d’un ovule fertilisé diminue fortement avec l’âge…
En fait, il est inexact de dire qu’il y a une tendance à de plus petites familles chez celles qui ont des enfants, le nombre d’enfants restant étonnamment stable à ce niveau. Ce qui est notoire par contre, selon Shaw, c’est l’explosion du nombre de familles, de couples (et de femmes) SANS ENFANTS ! Elles sont 1/3 des familles au Japon et aux États-Unis, 2/5e des familles en Italie et 45 % en Corée du Sud. En Chine, le pourcentage de familles sans enfants est en croissance régulière et trouve des corrélations directes avec l’urbanisation et l’éducation supérieure des femmes. Trouver un partenaire «à la hauteur» des attentes est aussi de plus en plus cité comme une raison de ne pas se marier et de rester sans enfants…
Toutes ces tendances se retrouvent partout au monde et même si nous n’avons pas pu trouver des statistiques locales sur le nombre de femmes qui sont sans enfants, les projections sont claires : le nombre de naissances est sous la barre du remplacement de 2.1 depuis 1985 et a été réduit à 1.41 en 2021. Si la population a encore grandi depuis 1985, c’est que l’espérance de vie a bien progressé, soit par 12.5 ans en 56 ans !
En 2014, quand la pension universelle (la Basic Retirement Pension) était à Rs 3 623, on comptait 4.6 personnes économiquement actives pour chaque pensionné. Selon les projections, ce taux passerait à 2.4 en 2034 et 1.6 en 2054 ! Entre-temps, la pension est passée à Rs 13 500, on promet plus encore «si possible», l’âge de la retraite est toujours à 60 ans – même si l’on vit plus longtemps – et il n’y a aucun «ciblage». Ici, comme ailleurs, pour tous ceux qui sont accrochés, mordicus, à la croissance économique et à la croissance des marchés, ça va être catastrophique !
Il n’y a pas 36 000 solutions à ce défi.
À court terme, certains pays vont favoriser l’immigration. Mais comme le dit Elon Musk : d’où viendront ces immigrés dont les pays à faible natalité auront besoin à tous les niveaux ? De l’Afrique ? Et quand l’Afrique aussi passera sous les 2.1 de remplacement naturel, que va-t-on faire ? À Maurice, en compétition avec le reste du monde, les portes ouvertes suffiront-elles ?
Parmi les autres possibilités : la robotisation et l’IA semblent promettre qu’il est possible de produire autant avec moins de bras, c.-à-d. d’être plus productif. C’est possible. Est-ce probable ? Elon Musk semble penser que la machine va devenir plus intelligente que l’homme, mais, en attendant, les réductions de populations (donc de consommateurs) dans les marchés à plus forts pouvoirs d’achat, sur les 25-30 ans qui suivent, l’inquiètent au plus haut point. On le comprend.
Jack Ma (le concepteur d’Alibaba) voit l’avenir avec moins de travail et plus de temps libre pour «être humain» et jouir de la vie. Il entrevoit la semaine de 12 heures (3 jours de 4 heures par semaine). On peut tous souhaiter qu’il ait raison, mais il resterait quand même quelques petites questions douloureuses à régler ? Comment, en effet, valoriser le travail de chacun en fonction de sa contribution, sans créer d’autres inégalités encore plus criantes qu’aujourd’hui ?
Je ne serais plus de ce monde quand l’effondrement des populations dans plus de 70 % des pays de la planète va mordre. Ceux qui naissent aujourd’hui et tous ceux qui ont 25 ans et moins vont inévitablement passer une partie de leur vie à payer pour le manque de prévoyance que nous aurions pu démontrer ces jours-ci…
Oublions pour peu, les problèmes de la planète. Que se propose-t-on de faire ici, à Maurice où l’on manque déjà de main-d’oeuvre ? À la veille d’élections, ne serait-il pas clairvoyant de la part de ceux qui sollicitent nos votes de nous dire s’ils y voient un problème méritant solution et ce que leur plan (s’ils en ont un !) implique ? Pour commencer, le gouvernement peut-il, enfin, rendre transparentes ses projections pour la CSG ? Projections qu’il a refusé de partager jusqu’ici ! Trop troublant pour les petites têtes que nous sommes ? C’est pourtant le b.a.-ba d’une démocratie ! Ou alors, devrions-nous conclure que nous sommes déjà à court de démocrates à la tête du pays ?
(*) https://www.youtube.com/watch?v=f3lUEnMaiAU
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