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Chagos
La souveraineté de Maurice reconnue
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La souveraineté de Maurice reconnue
Photo: AFN Diego Garcia
Le Royaume-Uni reconnaît enfin la souveraineté de Maurice sur les Chagos, y compris sur Diego Garcia. C’est ce qui ressort d’un communiqué conjoint Maurice Royaume-Uni sur l’accord politique entre les deux pays, après un entretien entre Pravind Jugnauth et son homologue britannique, sir Keir Starmer, hier. L’information, qui nous est parvenue à la mi-journée du Royaume Uni, a été officialisée par le Government Information Service en début d’après-midi. L’accord signé en octobre 2024, qui prendra la forme d’un traité, marque un tournant en reconnaissant officiellement la souveraineté de Maurice sur l’ensemble de l’archipel des Chagos, y compris de Diego Garcia. Toutefois, un compromis a été trouvé concernant cette dernière île, qui héberge la base militaire américaine. Pour une période initiale de 99 ans, le Royaume-Uni pourra poursuivre l’exploitation de la base militaire, mais sous la souveraineté de Maurice.
Dans une déclaration conjointe, Pravind Jugnauth et sir Keir Starmer précisent que l’accord est un modèle de diplomatie pragmatique où, d’une part, Maurice obtient enfin la reconnaissance de sa souveraineté sur les Chagos, une revendication centrale de sa politique étrangère depuis des décennies, et, d’autre part, les États-Unis, principal allié du Royaume-Uni dans la région, conservent leur présence militaire stratégique sur Diego Garcia, tout en reconnaissant la légitimité des revendications mauriciennes. L’accord stipule également que le Royaume-Uni et Maurice s’engagent à finaliser rapidement un traité et des instruments juridiques pour concrétiser ces dispositions.
Le traité visera à clarifier tous les aspects liés à la gestion de l’archipel, notamment les modalités de gouvernance, les droits de pêche et la protection de l’environnement. Il permet également à Maurice de mettre en œuvre un programme de réinstallation pour les Chagossiens sur les autres îles de l’archipel, à l’exclusion de Diego Garcia. La réinstallation des Chagossiens est un enjeu humanitaire de première importance, car ces derniers ont été chassés de leur terre natale dans les années 1960 et 1970, et beaucoup d’entre eux vivent encore en exil, notamment à Maurice, au Royaume-Uni et aux Seychelles.
Volet humanitaire
Le volet humanitaire de cet accord est fondamental, car il reconnaît les torts infligés aux Chagossiens par leur expulsion forcée et ouvre la voie à des réparations concrètes. Le traité inclura la création d’un fonds fiduciaire capitalisé par le Royaume-Uni, destiné à soutenir le bien-être des Chagossiens et financer un programme de relogement pour les Chagossiens sur les autres îles de l’archipel. Ce fonds permettra également de fournir des aides financières et sociales aux Chagossiens vivant en exil, leur offrant ainsi une opportunité de reconstruire leur vie dans des conditions plus dignes. La question de la réinstallation des Chagossiens, souvent négligée dans les négociations précédentes, occupe une place centrale dans cet accord.
Les Chagossiens, dépossédés de leur terre il y a plus de 50 ans, ont vu leur cause entendue grâce à des voix comme Charlézia Alexis, Lisette Aurélie Talat, Mimose Furcy, Rita Bancoult et Liseby Elysé, entre autres membres du Groupe réfugiés Chagos (GRC). Olivier Bancoult, leader du GRC, a rencontré le Premier ministre mauricien à son bureau après l’annonce de l’accord. Jeremy Corbyn, ancien leader du Parti travailliste à la Chambre des communes, a aussi joué un rôle pour la recherche d’une solution concernant le sort des habitants des Chagos, expulsés de leur archipel. Il avait promis de «réparer une des injustices de l’histoire» en cédant les îles.
Coopération
Au-delà de la question de la souveraineté, l’accord ouvre la voie à une nouvelle ère de coopération entre Maurice et le Royaume Uni dans plusieurs domaines clés, notamment le développement économique et la protection de l’environnement. Le Royaume Uni s’engage à fournir un soutien financier substantiel à Maurice, comprenant un paiement annuel pendant la durée de l’accord. Ce financement sera utilisé pour des projets d’infrastructures, notamment dans les secteurs de l’énergie, des transports et du développement urbain. L’accord inclut également un volet environnemental crucial, avec la création d’une Aire marine protégée dans l’archipel des Chagos, sous la gestion de Maurice. Cette initiative, qui avait été un point de discorde entre les deux nations, est désormais perçue comme une priorité commune.
L’archipel des Chagos abrite l’une des plus grandes réserves marines du monde, avec une biodiversité exceptionnelle. En matière de sécurité, Maurice et le Royaume Uni ont convenu de coopérer étroitement pour lutter contre des menaces, telles que la pêche illégale, la migration irrégulière, et le trafic de drogues et d’êtres humains dans la région de l’océan Indien. La base militaire de Diego Garcia continuera de jouer un rôle central dans ces efforts, avec un accent particulier sur la sécurité maritime et la lutte contre la criminalité transnationale. L’accord met également l’accent sur la protection de l’environnement.
L’accord a bénéficié du soutien actif des partenaires internationaux, en particu lier les États-Unis et l’Inde. Les négociations entre le Royaume-Uni et Maurice concer nant la souveraineté sur le Territoire britannique de l’océan Indien (BIOT) et l’archipel des Chagos ont débuté en novembre 2022. Jusqu’à présent, 12 séries de pourparlers ont eu lieu, la dernière étant une déclaration officielle faite, le 10 septembre, par David Lammy, le secrétaire d’État aux Affaires étrangères, du Commonwealth et du développement à la Chambre des communes. Lors d’une rencontre le 23 juillet entre le Premier ministre britannique et son homologue mauricien, il avait été convenu de poursuivre les discussions sur cette question complexe et ancienne. David Lammy avait souligné que trouver une résolution était dans l’intérêt des deux parties et constituait le meilleur moyen de protéger les intérêts nationaux du Royaume-Uni. Pour renforcer ces efforts, Jonathan Powell a été nommé comme envoyé du Premier ministre pour les négociations sur la souveraineté des BIOT/Chagos. Autre fait intéressant est que le Premier ministre du Royaume Uni, alors avocat spécialisé dans les droits de l’homme au Doughty Street Chambers de Londres, est un ami proche de Philippe Sands, King’s Counsel, qui a été le conseiller juridique de Maurice pour le dossier des Chagos ces 13 dernières années.
Pour rappel, les habitants des Chagos, citoyens britanniques, ont été exilés de leur terre natale en 1968 par des ordres in Council sous le gouvernement du Premier ministre travailliste Harold Wilson. Le gouvernement travailliste de Starmer rétablit ainsi un tort causé par le gouvernement travailliste d’Ha rold Wilson. Le Royaume-Uni avait connu un isolement diplomatique croissant concernant sa revendication sur ce qu’il appelle le BIOT. Cette situation a été exacerbée par les résolutions successives de diverses instances des Nations unies, y compris la CIJ et l’Assemblée générale, qui se sont majoritairement prononcées en faveur de Maurice. Ces organes ont demandé au Royaume-Uni de renoncer à ce qu’on appelle souvent sa «dernière colonie en Afrique».
La CIJ, dans un avis consultatif rendu en 2019, avait déclaré que le Royaume-Uni devait mettre fin à son administration du BIOT et avait encouragé le retour de ces îles à Maurice. Malgré ces pressions, le gouvernement britannique avait jusqu’à présent maintenu sa position, arguant que le BIOT était un territoire stratégique pour ses intérêts militaires et de sécurité. Ce développement majeur pourrait aussi entraîner des répercussions importantes pour les réfugiés sri lankais qui sont actuellement bloqués sur l’île, en attente d’une décision du gouvernement britannique concernant leur demande d’asile.
Le PM Pravind Jugnauth
«Notre République vit un jour historique. Je suis fier d’annoncer que le Royaume-Uni reconnaît la souveraineté des îles Chagos, y compris Diego Garcia. Certains disaient que c’était impossible. Un petit pays comme le nôtre a réussi à mener une bataille contre deux grandes puissances, car nous sommes restés guidés par nos convictions. Rappelons le vote historique des Nations unies en juin 2017, où 94 pays ont voté en notre faveur. Sir Anerood Jugnauth avait remis sa robe d’avocat pour plaider une dernière fois dans sa carrière devant la Cour internationale de justice, qui a rendu un verdict sans appel. Depuis 2022, de nombreuses discussions ont eu lieu, et cela n’a pas été facile. Aujourd’hui, nous avons remporté une victoire qui restera gravée dans l’histoire. Le Royaume-Uni a reconnu la tragédie vécue, et un accord sous forme de traité a été conclu, permettant aux Chagossiens de retourner sur les îles Peros Banhos et Salomon. Tous les gouvernements concernés sont d’accord que les États-Unis continuent d’opérer sur Diego Garcia. Le Royaume Uni s’est également engagé à faciliter les visites et à travailler ensemble. Cinquante-six ans après notre Indépendance, la décolonisation est enfin complète. Notre hymne national résonne encore plus fort sur notre territoire.»
Olivier Bancoult, leader du GRC
«Le 3 octobre marque un jour historique pour l’île Maurice et les Chagossiens. C’est une étape importante, marquant la reconnaissance par le Royaume-Uni de l’injustice faite aux Chagossiens. Je me réjouis de cette décision, c’est un moment de joie non seulement pour Maurice, mais également pour l’ensemble des Chagossiens. Je rends hommage aux femmes chagossiennes, pionnières de ce combat, bien qu’elles ne soient plus parmi nous, leur héritage et leur combat perdurent. J’espère que les Chagossiens auront la priorité pour le retour sur leurs terres, même si l’accès à Diego Garcia reste pour l’instant limité en raison de la présence de la base militaire. Je salue les efforts du Premier ministre pour avoir régulièrement consulté les Chagossiens tout au long des négociations.»
Jean-François Nellan, de Chagossian Voices en Angleterre
«Nous déplorons l’exclusion de la communauté chagossienne des négociations ayant conduit à cette déclaration d’intention commune concernant la souveraineté de notre terre natale. Les Chagossiens ont appris cette issue par les médias et demeurent impuissants et sans voix dans la détermination de leur propre avenir ainsi que celui de leur patrie. Les opinions des Chagossiens, habitants autochtones des îles, ont été systématiquement et délibérément ignorées, et nous exigeons une pleine inclusion dans la rédaction du traité.»
Xavier-Luc Duval, leader du PMSD
«Je félicite le gouvernement pour l’accord historique conclu entre Maurice et le Royaume Uni concernant l’archipel des Chagos. Cette entente marque l’aboutissement d’une longue lutte pour la reconnaissance de notre souveraineté. Elle témoigne de la persévérance de la diplomatie mauricienne et ouvre un nouveau chapitre dans nos relations avec le Royaume-Uni (...).»
Joe Biden, président américain
«I applaud the historic agreement and conclusion of the negotiations between the Republic of Mauritius and the United Kingdom on the status of the Chagos Archipelago. It is a clear demonstration that through diplomacy and partnership, countries can overcome long-standing historical challenges to reach peaceful and mutually beneficial outcomes. This agreement affirms Mauritian sovereignty over the Chagos Archipelago, while granting the United Kingdom the authority to exercise the sovereign rights of Mauritius with respect to Diego Garcia. Diego Garcia is the site of a joint US-UK military facility that plays a vital role in national, regional, and global security. It enables the United States to support operations that demonstrate our shared commitment to regional stability, provide rapid response to crises, and counter some of the most challenging security threats we face. The agreement secures the effective operation of the joint facility on Diego Garcia into the next century. We look forward to continuing our strong partnership with Mauritius and the United Kingdom in upholding a free and open Indo-Pacific.»
Antony Blinken, secrétaire d’État des États-Unis
«The United States welcomes today’s historic agreement between the Republic of Mauritius and the United Kingdom on the status of the Chagos Archipelago. The Administration has strongly supported negotiations between the two countries over the past two years and is pleased to see the successful outcome of this diplomatic effort. Under the terms of the new agreement, the United Kingdom will agree that Mauritius is sovereign over the Chagos Archipelago, including Diego Garcia, site of a joint US-UK military facility. In turn, the UK will exercise the sovereign rights and authorities of Mauritius with respect to Diego Garcia in accordance with the terms of the agreement. This agreement will secure the operational future of the joint US-UK military facility on Diego Garcia into the next century. Diego Garcia plays a vital role in U.S. efforts to establish regional and global security, respond to crises, counter some of the most challenging security threats of our time. Today’s agreement reflects the power of diplomacy to solve long-standing challenges, our shared commitment to a free and open Indo-Pacific region, our continued close collaboration with Mauritius on a wide range of bilateral, regional, and multilateral issues, and, above all, the strong partnership of Mauritius, the United Kingdom, and the United States.»
James Cleverly, ancien ministre britannique des Affaires étrangères
«Faible, faible, faible ! Le parti travailliste a menti pour accéder au pouvoir. Ils avaient dit qu’ils seraient irréprochables, qu’ils n’augmenteraient pas les impôts, qu’ils tiendraient tête à l’Union européenne, qu’ils seraient patriotes. Mensonge !»
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