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Hippisme

Le business model actuel de Lee Shim est-il viable?

28 mars 2024, 18:00

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Le business model actuel de Lee Shim est-il viable?

Jean-Michel Lee Shim détient un monopole dans l’industrie hippique, avec les risques que cela comporte…

Avec le Mauritius Turf Club (MTC) horsjeu depuis 2023, People’s Turf Plc (PTP) de Jean-Michel Lee Shim est le seul maître à bord sur la scène hippique. Vient, dès lors, histoire de prêter main-forte aux desseins de PTP, Global Equestrian Ltd, la compagnie de Lee Shim qui lease des chevaux. Cela dit, outre une saison 2024 qui tarde à débuter et des difficultés à faire l’unanimité parmi les turfistes, il est légitime, à ce jour, de se poser des questions sur le business model de Jean-Michel Lee Shim. Se dirige-t-on enfin vers le nouvel envol de l’industrie comme promis par certains au sein du gouvernement ou est-ce plutôt la fin prochaine des courses à Maurice ?

Avant de nous pencher sur l’avenir des courses dans la durée, faisons un tour d’horizon sur la saison 2024. Celle-ci n’a pas encore commencé alors qu’on entame bientôt le mois d’avril. Les galops viennent tout doucement de reprendre au Champ-de-Mars. Le brouillard autour de ce qui se passe au niveau de l’entraînement à Petit-Gamin. Autant de faits qui mettent à mal cette échéance du 4 mai voulue par l’empire de Lee Shim ! Ce n’est pas tout ! La problématique des handlers, de l’assurance des jockeys, de la piste après travaux et le choix d’un nouveau starter viennent corser la situation.

Maintenant, admettons que la saison commence à la date prévue, soit le 4 mai. Que tous les soucis en marge de cette saison dénuée d’engouement soient résolus. Une autre question émerge inévitablement. Quel sera l’attrait de la compétition à venir ? Avec une population équine actuelle vieillissante, dont l’organisme a été mis à rude épreuve l’an dernier, et seulement 78 nouveaux, «ce sera difficile», estime un observateur, «de faire mieux que les années précédentes». Inutile non plus de compter sur les grands rendez-vous pour attirer les foules : «The Gatekeeper pu kontinye bat zot tou par 4 ou 5 longer.»

Comprenons bien une chose. Le principal investisseur pour l’achat de chevaux en ce moment est Global Equestrian Ltd (GEL). La compagnie de Jean-Michel Lee Shim achète les chevaux de l’étranger et les met en lease aux éventuels propriétaires. «Faute de trouver des propriétaires pour tous, certains sont alors donnés, sous forme d’investissement, aux entraîneurs présents au Champ-de-Mars», explique-t-on.

GEL étant l’épine dorsale de l’industrie actuellement, vu qu’elle possède la majorité des chevaux dans l’île, le modèle que l’empire de Lee Shim propose, analyse un ancien président du MTC, «n’est pas le meilleur». «GEL a construit son business model sur l’achat en masse de chevaux mais des chevaux de mauvaise qualité.» Cela, «dans le but de permettre à l’industrie de tourner». «Des chevaux de qualité médiocre n’attirent pas le betting.» Le betting justement «n’a jamais été aussi bas à Maurice».

Le pire, enchaîne cet ancien président du MTC, «c’est que le désintérêt des turfistes se situe aussi autour d’un monopole de Lee Shim dans tous les compartiments de cette industrie». Comprenez par là qu’il possède «la plupart des chevaux, qu’il organise les courses et qu’il tient le betting». Un ancien commissaire du MTC trouve que «c’est trop de pouvoir entre les mains d’une seule personne».

Par conséquent, les investissements de propriétaires mauriciens individuellement «se sont réduits comme une peau de chagrin». Plusieurs passionnés de la chose hippique et propriétaires au temps du MTC préfèrent investir en Afrique du Sud. D’une part, «parce que le stake money est meilleur» et d’autre part, «parce que… Lee Shim n’y est pas».

Un avocat passionné de courses pose la question suivante : «Que va-t-il se passer si GEL, PTP et Lee Shim n’arrivent plus à soutenir les dépenses liées à l’organisation de courses ? Ou tout simplement que Lee Shim en a marre !?» «Ce sera la fin de l’industrie !», a-t-il répondu. «La fin veut surtout dire plus de travail pour tous ceux qui dépendent de cette industrie pour vivre.»

Un proche de Lee Shim est catégorique : «Sans Lee Shim, ce serait déjà la fin pour l’industrie hippique.» D’autres diront que Lee Shim essaie par tous les moyens de «bien faire les choses malgré la situation» mais que «la malchance, les gens de mauvaise foi, l’attachement lié à l’organisateur historique qu’est le MTC et le sentiment erroné qu’il a tout volé de celui-ci jouent contre lui».

Un ancien officiel du MTC dit, lui, que «Lee Shim est responsable de la situation actuelle». «On lui a confié un bijou, un bijou, certes, pas bien poli non plus sous le MTC, mais lui, il l’a brisé», devait-il renchérir. «Voyez toutes les critiques à l’encontre de PTP sur les réseaux sociaux à chaque fois qu’on écrit à son sujet.»

Dans quelle mesure a-t-il fait du mal à cette industrie ? Selon l’ancien officiel du MTC : «L’État a rendu la vie dure au MTC dès le départ. Il n’y a jamais eu de same level playing field pour tous. PTP et Lee Shim ont été clairement favorisés. Ce qui a causé l’exode de plusieurs propriétaires mauriciens vers l’Afrique du Sud. Aussi, la confiance de plusieurs turfistes s’est érodée. Entre soupçon de courses pas nettes et manque de professionnalisme, les gens ne jouent plus !»

Pour un employé de PTP, «le MTC aurait été seul on board s’il avait accepté la proposition du gouvernement et de Kamal Taposeea à l’époque». «Ne venez pas dire que Lee Shim aurait tout acheté ! Il aurait eu des restrictions d’achat sur les actions.» Malgré tout, toujours selon l’employé, «Lee Shim a sauvé les courses d’une mort certaine». Qu’initialement, Lee Shim n’avait «nullement l’intention d’organiser les courses à Maurice». «Qu’il l’a fait pour prolonger sa passion et pour sauver les emplois.» Pour un observateur, «Lee Shim pa fer kas dan organizasion lekours. Li net ena pu kont lor so bann busines, dont SMS Pariaz».

Un come-back du MTC ?

Dans l’idéal, plusieurs turfistes souhaitent un retour aux affaires du MTC. Entre l’expertise, l’histoire et le professionnalisme, malgré «certains travers», fait ressortir un chroniqueur hippique connu, «le MTC a quand même 200 ans d’histoire». «Rien que de retrouver l’atmosphère des loges et du paddock ce serait formidable…»

Les élections législatives approchent à grands pas. Le dénouement de ce scrutin pourrait bien repositionner le MTC sur l’échiquier hippique. «Reste qu’on n’en est pas encore là», soutient un ancien administrateur du MTC. Il est d’avis que «la politique n’aurait jamais dû entrer au Champ-de-Mars dès le départ».

Notre homme fera une réflexion fracassante : «Et même si le gouvernement actuel est arrivé à la conclusion qu’il a misé sur le mauvais cheval, il ne va certainement pas changer son fusil d’épaule maintenant. Tout simplement parce que certains officiels et autres figures du MTC d’avant font de la politique active pour l’opposition.»

Une entente PTP-MTC est-elle possible à l’avenir ? Pour plusieurs personnes, dont d’anciens officiels de tous bords et les turfistes en général, «ce serait intéressant. Pour le bien-être de cette industrie dans le marasme depuis trop longtemps, car cette devise de “the winner takes it all” n’a rien offert de bon jusqu’ici. La perception que les courses ne sont pas personnifiées en un seul homme, comme en ce moment, serait une très bonne entreprise».

À vrai dire, estime un journaliste, «l’Etat à son rôle à jouer». «Que ce soit avec le MTC ou PTP. Dans la mesure où l’État est condamné à venir en aide à cette industrie sous forme de Special Annual Grant. Car, si le MTC revient demain, qui va investir dans les chevaux alors que le fret coûte Rs 700 000 ? Donc, l’avenir des courses, ce n’est pas seulement l’affaire de PTP ou du MTC mais de toute l’industrie…» Les Totes ainsi que la compagnie de Remote Betting devraient aussi être appelés à mieux assister cette industrie en perte de vitesse.